On ne le répétera jamais assez : en matière de droit du travail, les associations, quelque soit leur objet, sont soumises aux mêmes règles qu’une entreprise commerciale de droit privé.

 

Toutes les associations doivent donc prêter une attention particulière à l’environnement juridique applicable à leurs salariés : embauche et rédaction du contrat, durée du travail et contrôle du temps de travail, et, bien évidemment rupture du contrat de travail sont soumis à la législation du travail, ressortant du Code du travail, et de la convention collective applicable, le cas échéant.

 

L’arrêt rendu le 3 février 2016 par la Chambre sociale de la Cour de cassation vient rappeler cette réalité concernant l’obligation de reclassement pour une association par ailleurs membre d’une fédération. (Cass. Soc 3 février 2016, n° 14-28979)

 

Il ne s’agit pas d’une solution complètement nouvelle, la jurisprudence ayant déjà été amenée à se prononcer sur ce point. (Voir par exemple, dans le cadre d’un licenciement pour inaptitude physique, Cass soc 6 janvier 2010, n° 08-44113)

 

Mais cette règle doit être rappelée, diffusée et explicitée, afin de permettre aux associations d’appréhender certaines règles qui parfois semblent écrites pour des entreprises à but lucratif.

 

En l’espèce, une association, reconnue d’utilité publique, avait embauché en 2007 une salariée en qualité d’animatrice-coordinatrice d’ateliers-relais intervenants auprès de collégiens en difficulté.

 

En 2010, suite à la suppression de la subvention versée par l’état, et destinée à financer les classes relais, l’association se trouve contrainte de réorganiser son activité et de procéder à la suppression du poste de l’intéressée.

 

Elle procède donc au licenciement pour motif économique de cette salariée.

 

Celle-ci conteste alors devant la juridiction le bien fondé de ce licenciement, en invoquant plusieurs motifs, et notamment l’absence de caractère réel et sérieux des difficultés économiques, ainsi que le non-respect de l’obligation de reclassement à son égard.

 

Dans un arrêt rendu le 31 janvier 2014, la Cour d’appel de Nancy déboute la salariée de l’intégralité de ses demandes en estimant notamment que le licenciement était fondé sur un motif économique réel et sérieux et que l’association, ayant proposé deux postes de reclassement en interne à la salariée, avait satisfait son obligation sur ce point.

 

La salariée se pourvoit en cassation, en contestant non seulement le bien fondé du motif économique invoqué, mais également l’absence de recherche exhaustive de solutions de reclassement.

 

C’est sur le périmètre de l’obligation de reclassement que tout va se jouer.

 

En effet, et tout au long de la procédure, l’association a rappelé qu’elle a procédé aux recherches de reclassement nécessaires et qu’elle a proposé deux solutions de reclassement, en interne, à la salariée concernée, préalablement à son licenciement.

 

La salariée a expressément refusé la première proposition et n’a pas répondu à la deuxième proposition faite par son employeur.

 

Mais pour la Cour de cassation, ces recherches ne sont pas suffisantes, et elle c’est pour cette raison qu’elle casse l’arrêt au visa de l’article L.1233-4 du Code du travail, en jugeant  que « le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que si le reclassement de l’intéressé dans l’entreprise, et, le cas échéant, dans le groupe auquel appartient l’entreprise n’est pas possible. ».

 

 

Ainsi, lorsqu’une association doit procéder à une recherche de reclassement, elle doit, comme une entreprise à but lucratif, étendre à sa recherche au groupe auquel elle appartient.

 

En pratique, si l’association est membre d’une fédération, elle doit impérativement étendre sa recherche à l’ensemble de cette fédération. S’il existe dans celle-ci des postes équivalents à celui supprimé, ils doivent être proposés au salarié concerné.

 

Cette décision applicable au licenciement pour motif économique, est également transposable à la recherche préalable de reclassement pour un salarié déclaré inapte à son poste de travail.

 

Dès lors, l’association doit prendre le soin, lorsqu’elle est dans la nécessité de mettre en place ce type de licenciement, de bien circonscrire le champ d’application de son obligation de reclassement.

 

Rappelons que dans son arrêt du 6 janvier 2010 (précité), la Cour de cassation a validé le raisonnement de la Cour d’appel qui  a jugé que « l'existence d'associations, regroupées au sein d'une fédération, ayant des activités de même nature au sein desquelles la permutation de tout ou partie du personnel était possible » permettait de délimiter le périmètre de cette obligation de reclassement.

Cela donne une piste de réflexion à l’association, qui devra en tout état de cause interroger les adhérents de la fédération, afin de connaitre les éventuelles postes disponibles.

 

Ceux qui connaissent un peu le monde associatif et le fonctionnement d’une fédération peuvent mesure les difficultés pratiques de la mise en œuvre d’une telle recherche.

 

En effet, l’objet de la fédération, qui est également une association, est de regrouper des associations qui ont toutes un objet proche ou qui œuvrent dans le même sens. Souvent, en dehors du montant de la cotisation exigée pour adhérer à la fédération (montant parfois très faible), il n’existe pas de rapport économique entre les associations qui demeurent toutes juridiquement et financièrement autonomes.

 

Dès lors, le lien entre les différentes associations au sein d’une même fédération peut être particulièrement ténu, pour ne pas dire inexistant, ce qui ne rend que plus délicat la mise en place d’une recherche effective et sérieuse.

 

Elle reste cependant nécessaire, car la sanction du défaut de recherche de solution de reclassement est sévère : le licenciement est considéré comme sans cause réelle et sérieuse et les dommages et intérêts sont octroyés en fonction du préjudice subi par le salarié.