La Cour de cassation, dans son infinie sagesse, a rendu trois avis ce 21 janvier 2013 éclairant la procédure d’appel dans les matières avec représentation obligatoire. Ils sont reproduits ci-après.
Les processualistes et praticiens apprécieront sans conteste les trois sujets abordés et les réponses apportées aux questions posées, lesquelles semblent prendre en considération les difficultés nées de la mise en oeuvre du décret Magendie et semblent vouloir les résoudre sans rajouter à une architecture déjà lourde et au droit existant très contraignant.

L’avis n°1300005 précise que les parties peuvent toujours développer leur argumentation et invoquer de nouveaux moyens jusqu’à la clôture de l’instruction. Il s’agit là d’un avis respectant l’appel entendu comme constituant une voie d’achèvement. La Cour de cassation ne souhaite pas enfermer le procès aux premières conclusions échangées et aux seuls moyens y figurant.
La tentation était pourtant grande chez certains magistrats du second degré de juridiction de ne permettre aux parties qu’une simple réplique aux conclusions adverses et de leur interdire d’ajouter des moyens nouveaux après leur premières écritures, considérant que les moyens de droit devaient être tous contenus dans les conclusions signifiées dans les délais des articles 908 pour l’appelant et 909 pour l’intimé.
Il ne faut pas oublier que l’obligation de concentration des moyens oblige le plaideur à développer l’ensemble de ceux-ci. Il est heureux qu’il n’ait pas  seulement 3 mois (article 908) ou 2 mois pour le faire (article 909).

L’avis n°1300003 porte sur la question de la communication des pièces en cause d’appel, question rendue d’autant plus délicate depuis un précédent avis en date du 25 juin 2012. La Cour de cassation estime donc désormais que le conseiller de la mise en état n’a pas compétence pour juger de la recevabilité des pièces «invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions».
Reste cependant une inconnue de taille. En effet, le défaut de communication des pièces simultanément à la signification des conclusions constitue-t-il une fin de non recevoir régularisable?  On peut le penser et ce, d’autant plus que le décret Magendie n’enferme pas la communication des pièces dans un délai à peine de nullité de celle-ci et que l’avis n°1300005 autorise les parties à développer leurs arguments et moyens  jusqu’à la clôture de l’instruction.

Enfin, l’avis n°1300004 précise la nature des conclusions visées par les articles 908 et 909 du code de procédure civile. la Cour de cassation estime qu’il s’agit des conclusions au fond, évidemment, mais encore des écritures qui «soulèvent un incident de nature à mettre fin à l’instance».
La nouveauté de cet avis réside dans la seconde branche de l’alternative. Des conclusions d’incident  sont de nature à satisfaire aux prescriptions des articles 908 et 909 du code de procédure civile, si tant est qu’elles soulèvent un incident de nature à mettre fin à l’instance.
Il faut donc exclure de cette catégorie les conclusions à fin de radiation sur le fondement de l’article 526 du code de procédure civile, lesquelles ne mettent pas fin à l’instance, la radiation étant une simple mesure d’administration judiciaire, voire les exceptions dliatoires (sursis à statuer, dépaysement de l'article 47 par exemple). Si cependant la radiation est prononcée avant l'expiration des délais prévus aux articles 908 & 909, il faut surveiller ceux-ci qui reprendront leur cours dès l'affaire reportée au rôle après complète exécution, les délais de procédure étant des délais préfix et la radiation n'entraînant qu'une suspension de l'instance (art. 377 du cpc).
 
Avis n° 1300005 du 21 janvier 2013 (Demande n° 1200018) - ECLI:FR:CCASS:2013:AV00005
n° RG 12/00237 ainsi libellée :
« Dans la procédure d’appel en matière civile contentieuse avec représentation obligatoire, l’appelant peut-il, dans un second jeu de conclusions signifiées et remises plus de trois mois après la déclaration d’appel, articuler des moyens nouveaux (fins de non recevoir ou moyens de fond) non soulevés dans ses premières conclusions d’appel, et non suscités par une évolution du litige susceptible d’avoir été provoquée par les conclusions signifiées entre-temps par l’intimé ?
Dans la négative, quelle est la sanction applicable ? »
Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire et les conclusions de M. Mucchielli, avocat général, entendu en ses conclusions orales ;
EST D’AVIS QUE :
Dans la procédure ordinaire avec représentation obligatoire en appel, les parties peuvent, jusqu’à la clôture de l’instruction, invoquer de nouveaux moyens.
Président : M. Lamanda, premier président

Avis n° 1300003 du 21 janvier 2013 (Demande n° 1200017) - ECLI:FR:CCASS:2013:AV00003
Vu la demande d’avis formulée le 17 octobre 2012 par la cour d’appel de Paris, reçue le 31 octobre 2012, dans l’instance n° RG 12/00529 ainsi libellée :
« Le conseiller de la mise en état qui, en vertu des articles 907 et 763 du code de procédure civile, a pour mission de veiller au déroulement loyal de la procédure, spécialement à la ponctualité de l’échange des conclusions et de la communication des pièces, a-t-il compétence pour écarter les pièces qui n’auraient pas été communiquées conformément aux dispositions de l’article 906 du même code ? Si la compétence du conseiller de la mise en état est retenue, est-il seul compétent ? Ses ordonnances ont-elles, de ce chef, autorité de la chose jugée au principal ? Peuvent-elles être déférées par simple requête à la cour dans les quinze jours de leur date ? »
Sur le rapport de M. Pimoulle, conseiller, et les conclusions de M. Mucchielli, avocat général, entendu en ses conclusions orales ;
EST D’AVIS QUE :
Le conseiller de la mise en état n’est pas compétent pour écarter des débats les pièces, invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions.

Président : M. Lamanda, premier président

Avis n° 1300004 du 21 janvier 2013 (Demande n° 1200016) - ECLI:FR:CCASS:2013:AV00004
Vu la demande d’avis formulée le 18 octobre 2012 par le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Versailles, reçue le 23 octobre 2012, dans l’instance n° RG 12/02578 ainsi libellée :
« Les conclusions visées par les articles 908 et 909 du code de procédure civile sont-elles nécessairement des conclusions au fond devant la cour, ou peut-il s’agir de conclusions saisissant le conseiller de la mise en état d’un incident tendant à obtenir la radiation du rôle de la cour par application de l’article 526 du même code, ou, plus généralement, tendant à mettre fin à l’instance ou a en suspendre/interrompre le cours ? »
Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire et les conclusions de M. Lathoud, avocat général, entendu en ses conclusions orales ;
EST D’AVIS QUE :
Les conclusions exigées par les articles 908 et 909 du code de procédure civile sont toutes celles remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ces textes, qui déterminent l’objet du litige ou soulèvent un incident de nature à mettre fin à l’instance.
Président : M. Lamanda, premier président

Maître Alexis Devauchelle
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