NON: si le trouble dans les conditions de vie directement causé par l'expropriation est indemnisable lorsqu'il constitue un dommage matériel, le préjudice moral causé aux expropriés par la perte forcée de leur bien n'est pas indemnisable.

En l'espèce, les consorts X. font grief à l'arrêt de la Cour d'appel de les débouter de leur demande d'indemnisation formée au titre de troubles dans leurs conditions de vie, alors, selon le moyen, que tout exproprié a droit à une juste et préalable indemnité couvrant l'intégralité des préjudices causés par l'expropriation. Ils soutiennent qu'en refusant d'indemniser le trouble dans les conditions de vie consécutif à la perte forcée de leur bien par les expropriés, au prétexte que la loi ne permettait pas la réparation d'un préjudice de cette nature, quand les biens expropriés constituaient leur domicile depuis plus de trente ans, tandis que l'un deux, âgé de 78 ans et lourdement handicapé, y recevait des soins médicalisés, ce dont il résultait que les expropriés subissaient, du fait de l'expropriation, une charge spéciale et exorbitante, source d'un déséquilibre, et qui, à ce titre, devait être indemnisée, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble les articles 545 du code civil, 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Dans son arrêt en date du 16 mars 2011, la Cour de cassation considère que si le trouble dans les conditions de vie directement causé par l'expropriation est indemnisable lorsqu'il constitue un dommage matériel, la cour d'appel, qui était saisie d'une demande d'indemnisation du préjudice moral causé aux expropriés par la perte forcée de leur bien, a retenu à bon droit, sans violer l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui n'exige qu'une indemnisation raisonnablement en rapport avec la valeur des biens expropriés, ni les autres textes visés au moyen, que ce préjudice n'était pas indemnisable.

SOURCE: Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 16 mars 2011, 09-69.544, Publié au bulletin.