EN BREF: si la suspension de l'exécution d'une décision administrative peut avoir des effets sur la situation concurrentielle entre deux sociétés, la société qui forme tierce opposition à cette décision doit pouvoir justifier d'un droit qu'elle aurait tenu directement de cette décision, et auquel l'ordonnance en suspendant l'exécution aurait, par suite, préjudicié.

En application de l'article R.832-1 du code de justice administrative : « Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision ». En l'espèce, par ordonnance du 12 janvier 2012, le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L.521-1 du code de justice administrative, a prononcé la suspension de l'exécution de la décision du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) du 14 octobre 2011 modifiant le taux de participation de l'assuré aux frais d'acquisition de la spécialité Metéospasmyl commercialisée par la société Mayoly Spindler pour le porter de 70 à 85 % à compter du 1er novembre 2011. La SOCIETE CEPHALON FRANCE, qui commercialise la spécialité pharmaceutique Spasfon ayant fait l'objet d'une mesure identique d'augmentation du taux de participation de l'assuré, qu'elle n'a pas contestée au contentieux, et qui n'a pas été appelée à la cause par le juge des référés, forme tierce opposition à cette ordonnance au motif qu'elle préjudicierait à ses droits. Elle fait valoir à ce titre que, si ces deux spécialités ne sont pas substituables au sens strict, elles constituent des alternatives thérapeutiques visant toutes deux le traitement des troubles fonctionnels intestinaux et sont considérées tant par les patients que les prescripteurs comme des spécialités substituables, de sorte que la différence de taux de prise en charge par l'assurance maladie résultant de l'ordonnance qu'elle conteste crée une distorsion de concurrence qui s'est déjà traduite par une évolution sensible des volumes de ventes respectifs de ces deux produits. Dans son arrêt en date du 4 avril 2012, le Conseil d'Etat considère que, si la suspension de l'exécution de la décision du directeur de l'UNCAM peut avoir des effets sur la situation concurrentielle entre les deux sociétés, la SOCIETE CEPHALON FRANCE ne justifie pas pour autant d'un droit qu'elle aurait tenu directement de cette décision, et auquel l'ordonnance en suspendant l'exécution aurait, par suite, préjudicié. Il suit de là que sa requête en tierce opposition n'est pas recevable.

SOURCE: Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 04/04/2012, 356401, Publié au recueil Lebon