OUI : dans un arrêt en date du 06 octobre 2015, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé qu’au regard des préconisations du médecin du travail, qu'il souhaitait au demeurant joindre par téléphone peu avant l'altercation, un fonctionnaire ne peut être regardé comme ayant commis une faute personnelle en refusant d'effectuer les tâches qui lui avaient été confiées par son supérieur hiérarchique en qualité de conseiller clientèle.


En l’espèce, l’altercation entre M. B... et son supérieur hiérarchique le 12 mars 2009, qui a conduit l'intéressé à faire une crise nerveuse, est intervenue sur le lieu et dans le temps du service.

Que si la société Orange soutient que M. B... aurait commis une faute personnelle en refusant d'effectuer le travail qui lui avait été confié le matin même, il ressort des pièces du dossier que le médecin du travail, s'il avait, le 3 mars 2009, déclaré que M. B... était apte à une reprise d'activité à mi-temps thérapeutique avait, en revanche, précisé qu'était contre-indiquée une reprise sur un poste de conseiller clientèle.

Qu'il est cependant constant qu'en dépit de cette contre-indication, c'est sur un poste de conseiller clientèle que M. B... a été affecté dès sa reprise d'activité.

Qu’au regard des préconisations du médecin du travail, qu'il souhaitait au demeurant joindre par téléphone peu avant l'altercation, il ne peut être regardé comme ayant commis une faute personnelle en refusant d'effectuer les tâches qui lui avaient été confiées par son supérieur hiérarchique en qualité de conseiller clientèle.

Par ailleurs, si la société Orange fait état de ce que les conséquences dudit accident résulteraient de l'état de santé antérieur du requérant et, plus précisément, de la dépression pour laquelle il avait été en arrêt de travail depuis le mois de septembre 2007, il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport d'examen psychiatrique établi par le docteur C… à la demande du comité médical France Télécom, que l'état de santé de M. B... s'était sensiblement amélioré ce qui, d'ailleurs, avait permis une reprise d'activité à temps partiel thérapeutique et qu'il existe un lien direct et certain entre l'altercation du 12 mars 2009 et la rechute anxio-dépressive de l'intéressé.

POUR MEMOIRE : l’administration, sauf à commettre une faute de service, est tenue de prendre en compte les recommandations de la médecine du travail.

Aux termes de l’article 24 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985, le médecin du travail est habilité à proposer des aménagements de poste de travail ou de conditions d'exercice des fonctions, justifiés par l'âge, la résistance physique ou l'état de santé des agents. Lorsque l'autorité territoriale ne suit pas l'avis du service de médecine préventive, sa décision doit être motivée par écrit et le CHSCT doit en être tenu informé.

Bien que ces avis ou propositions ne lient pas l’employeur, le Conseil d’Etat précise qu’« il lui incombe de les prendre en compte ».

En effet, comme tout employeur, l’autorité territoriale doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de ses agents. Il lui appartient d'assurer, « sauf à commettre une faute de service », la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires concourant au respect de cette obligation.

Voir en ce sens : Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 12/05/2022, 438121