NON: dans la mesure où à ce stade de la délibération, la procédure n'a pas encore été organisée et les soumissionnaires n'étaient pas connus et que le conseiller municipal, qui avait un lien de parenté avec le président de la société candidate au marché public, n'avait pas siégé à la commission d'appel d'offres et n'avait pris aucune part dans le choix de l'entreprise attributaire.

Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation (...) . / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat ». Aux termes de l'article L.551-10 du même code : « Les personnes habilitées à engager les recours prévus aux articles L.551-1 et L.551-5 sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par le manquement invoqué (...) ». En application de ces dispositions, il appartient au juge des référés précontractuels de rechercher si l'entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auxquels ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente . En l'espèce, la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES a lancé, le 30 août 2011, une procédure d'appels d'offres ouvert pour la passation d'un marché de travaux portant sur l'amélioration de son réseau d'eau potable. Par lettre du 25 novembre 2011, la commune a informé la société Bâtiment Industrie Réseaux, qui s'était portée candidate à l'attribution du marché, que son offre avait été rejetée sans être examinée au motif que cette société « a des liens avec un des membres du conseil municipal ». Saisi par la société Bâtiment Industrie Réseaux sur le fondement des dispositions de l'article L.551-1 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a, par l'ordonnance attaquée du 26 décembre 2011, annulé la procédure de passation du marché à compter de la remise des offres et enjoint à la commune, si elle entendait conclure le contrat, de reprendre la procédure à ce stade. Le juge des référés a relevé que Mme Valérie A, conseillère municipale de Saint-Maur-des-Fossés déléguée à l'urbanisme, avait un lien de parenté avec le président de la société Bâtiment Industrie Réseaux, était actionnaire de cette société et avait participé à la délibération du conseil municipal autorisant le lancement de la procédure de passation du marché, mais que, d'une part, à ce stade de la délibération, la procédure n'avait pas encore été organisée et les soumissionnaires n'étaient pas connus et que, d'autre part, Mme A n'avait pas siégé à la commission d'appel d'offres et n'avait pris aucune part dans le choix de l'entreprise attributaire. Dans son arrêt en date du 9 mai 2012, le Conseil d'Etat a considéré qu'ayant, ce faisant, porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation, le juge des référés, s'agissant de travaux habituels dont l'utilité n'était pas contestée et sur la définition et le lancement desquels il n'est pas allégué que l'intéressée aurait exercé une influence particulière, n'a ni inexactement qualifié ces faits ni commis d'erreur de droit en jugeant qu'ils n'étaient pas susceptibles de faire naître un doute sur l'impartialité du pouvoir adjudicateur et, qu'en conséquence, en éliminant par principe l'offre de la société Bâtiment Industrie Réseaux, celui-ci avait méconnu le principe de libre accès à la commande publique et manqué à ses obligations de mise en concurrence. Il suit de là que le pourvoi de la COMMUNE DE SAIT-MAUR-DES-FOSSES doit être rejeté.

SOURCE:Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 09/05/2012, 355756, Publié au recueil Lebon