NON : dans un arrêt en date du 18 juillet 2023, la Cour administrative d’appel de Paris a jugé que le préfet de la Seine-Saint-Denis était  fondé à soutenir qu'en procédant à la titularisation de M. C..., le maire de la commune de Bobigny a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que celui-ci, était apte, compte tenu de cette situation de cumul non autorisé et quelles que soient par ailleurs ses compétences professionnelles, à exercer les fonctions d'attaché territorial.


Aux termes de l'article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : «  I. - Le fonctionnaire consacre l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. Il ne peut exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit, sous réserve des II à V du présent article. Il est interdit au fonctionnaire : 1° De créer ou de reprendre une entreprise lorsque celle-ci donne lieu à immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou à affiliation au régime prévu à l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, s'il occupe un emploi à temps complet et qu'il exerce ses fonctions à temps plein ; 2° De participer aux organes de direction de sociétés ou d'associations à but lucratif ; (...) ». Il résulte de ces dispositions que l'exercice d'une activité privée par un fonctionnaire constitue une dérogation au principe général selon lequel il consacre l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées par l'administration.

Préalablement à l'exercice d'une activité privée, l'agent public, occupant un emploi à temps complet doit soumettre une demande d'autorisation à l'autorité hiérarchique dont il relève. Par ailleurs, aux termes de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction en vigueur, dont il a été fait application pour le recrutement de M. C... qui s'est vu reconnaître la qualité de travailleurs handicapé le 8 janvier 2019 : «  Par dérogation à l'article 36, les fonctionnaires peuvent être recrutés sans concours : / a) En application de la législation sur les emplois réservés ; (...) Les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail peuvent être recrutées en qualité d'agent contractuel dans les emplois de catégories A, B et C pendant une période correspondant à la durée de stage prévue par le statut particulier du cadre d'emplois dans lequel elles ont vocation à être titularisées. Lorsque le recrutement est opéré dans un cadre d'emplois nécessitant l'accomplissement d'une scolarité dans les conditions prévues à l'article 45,, la durée du contrat correspond à la durée de cette scolarité augmentée de la durée du stage prévue par le statut particulier du cadre d'emplois dans lequel les intéressés ont vocation à être titularisés. Le contrat est renouvelable, pour une durée qui ne peut excéder la durée initiale du contrat. A l'issue de cette période, les intéressés sont titularisés sous réserve qu'ils remplissent les conditions d'aptitude pour l'exercice de la fonction. / Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application de l'alinéa précédent, notamment les conditions minimales de diplôme exigées pour le recrutement en qualité d'agent contractuel en catégories A et B, les modalités de vérification de l'aptitude préalable au recrutement en catégorie C, les conditions du renouvellement éventuel du contrat, les modalités d'appréciation, avant la titularisation, de l'aptitude à exercer les fonctions. »

L'article 8 du décret n° 96-1087 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique, pris pour l'application de l'article 38 précité, dispose que : « A l'issue du contrat, l'appréciation de l'aptitude professionnelle de l'agent par l'autorité territoriale est effectuée au vu du dossier de l'intéressé et après un entretien de celui-ci. (...) /I. - Si l'agent est déclaré apte à exercer les fonctions, l'autorité territoriale procède à sa titularisation. »

Il ressort des pièces du dossier que pendant la période d'un an préalable à sa titularisation, au cours de laquelle il exerçait à temps complet les fonctions d'adjoint au chef du service des manifestations publiques de la commune de Bobigny, et encore à la date de sa titularisation, M. C... exerçait les fonctions de dirigeant d'une société ayant une activité commerciale de transports routiers de frets interurbains, sans en avoir obtenu ni demandé l'autorisation.

Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir qu'en procédant à la titularisation de M. C..., le maire de la commune de Bobigny a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que celui-ci, était apte, compte tenu de cette situation de cumul non autorisé et quelles que soient par ailleurs ses compétences professionnelles, à exercer les fonctions d'attaché territorial.

SOURCE : CAA de PARIS, 7ème chambre, 18/07/2023, 22PA02330, Inédit au recueil Lebon