Les jurisprudences du cabinet de Maître ROUSSEL :

Tribunal Judiciaire de Vannes, Chambre Correctionnelle, jugement sur intérêts civils du 19 avril 2024, n°20007000027

Tribunal Judiciaire de Quimper, 1ère Chambre, jugement du 11 juillet 2023, n°22/01435

 

I- Les Faits

  • Jugement du Tribunal Judiciaire de Vannes de 2024 :

Monsieur R, âgé de 22 ans, a été victime d’une agression ayant entrainé une fracture mandibulaire bifocale déplacée.

Son taux de déficit fonctionnel permanent (DFP) a été évalué par un Expert Judiciaire à 5%, au regard « d’une très discrète hypoesthésie localisée sur le territoire du V2, des épisodes de claquements bilatéraux de l’articulation temporo-mandibulaire néanmoins sans subluxation associée, une certaine anxiété psychologique focalisée. Taux de déficit fonctionnel permanent : 5% selon barème droit commun ».

 

  • Jugement du Tribunal Judiciaire de Quimper de 2023 :

Monsieur P, âgé de 62 ans, a contracté une infection nosocomiale à la suite d’une chirurgie de la cataracte de l’œil gauche.

Son taux de déficit fonctionnel permanent a été évalué par un collège d’Experts Judiciaires à 25%, au regard de « la perte fonctionnelle de l’œil gauche avec perte de la vision binoculaire entrainant des troubles de la vision des reliefs et de l’évaluation des distances ».

 

II- Demande d’indemnisation du DFP selon une indemnité journalière viagère

Dans ces deux affaires, Maître ROUSSEL a notamment soulevé devant les juridictions bretonnes que la méthode d’indemnisation du déficit fonctionnel permanent selon un point d’incapacité permet d’indemniser le déficit physique ou psychique objectif de la victime, mais ne permet pas de parvenir à une indemnisation complète puisqu’elle n’intègre pas les souffrances morales permanentes et l’atteinte subjective à la qualité de vie.

Dès lors, l’’indemnisation forfaitaire de ce préjudice sur la base d’une valeur moyenne du point d’incapacité permanente ne répare pas les différentes composantes du déficit fonctionnel permanent et est donc contraire au principe de réparation intégrale et d’appréciation in concreto des préjudices.

Par ailleurs, compte tenu du caractère viager des différentes composantes de ce préjudice, le principe d’une indemnisation évaluée sur une base journalière doit être retenue.

 

III- Décision

  • Tribunal Judiciaire de Vannes, Chambre Correctionnelle, jugement sur intérêts civils du 19 avril 2024, n°20007000027:

« C’est à très juste titre que la partie civile rappelle que l’indemnisation forfaitaire que constitue l’indemnisation « au point » est contraire au principe de réparation intégrale dans la mesure où l’application d’un barème inéquitable selon le sexe et l’âge de la victime ne prenant pas en considération la réalité de la durée pendant laquelle la partie civile va effectivement devoir vivre avec son déficit fonctionnel permanent ne peut aboutir à une réparation intégrale.

L’indemnisation du déficit fonctionnel permanent constitue après consolidation la suite de l’indemnisation du déficit fonctionnel temporaire et il conviendra dès lors d’indemniser la partie civile sur la base d’une indemnité journalière qui seule permet pour la victime de prendre en compte de façon intégrale le taux de déficit retenu et la durée durant laquelle elle sera amenée à vivre avec ce déficit. »

 

Quid de la méthode ?

Déficit Fonctionnel Permanent 5% X 32 € (déficit fonctionnel temporaire : 30 € + Souffrances morales permanentes : 2 €) = 1,60 €

  • Arrérages échus (date de la consolidation à la date de la liquidation) :

1038 jours X 1,60 € = 1.660,80 €

  • Arrérages à échoir :

1,60 € X 365 jours X 73,231* = 42.776,90 €

 * Euro de rente viagère d’un homme âgé de 26 ans à la date de la liquidation selon le barème de la Gazette du Palais 2022 avec taux d’actualisation à -1%

  • TOTAL :  Taux de DFP à 5% = 44.427,70 €

 

  • Tribunal Judiciaire de Quimper, 1ère Chambre, jugement du 11 juillet 2023, n°22/01435

« Si le médecin expert s’est limité à une évaluation du déficit fonctionnel permanent par référence au barème médical, l’indemnisation du préjudice doit être majorée pour prendre en compte les douleurs associées à l’atteinte séquellaire et les troubles dans les conditions d’existence.

En l’espèce, les experts ont retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 25%, en raison « de la perte fonctionnelle de l’œil gauche avec perte de la vision binoculaire entraînant des troubles de la vision des reliefs et de l’évaluation des distances », les experts indiquant que le taux proposé l’a été en fonction du barème indicatif d’évaluation des taux d’incapacité en droit commun du concours médical.

Ainsi, les experts ont évalué la seule atteinte à l’intégrité physique de la victime, et non pas les souffrances morales endurées depuis la consolidation et les troubles ressentis par Mr P dans ses conditions d’existence, troubles dont la réalité ne peut être contestée au vu des attestations (…)

 

Quid de la méthode ?

Déficit fonctionnel permanent 25% X 35 € (déficit fonctionnel temporaire : 30 € + Souffrances morales permanentes : 5 €) = 8,75 €

  • Arrérages échus (date de la consolidation à la date de la liquidation):

2231 jours X 8,75 € = 19.521,25 €

  • Arrérages à échoir:

8,75 € X 365 jours X 16,949* = 54.130,87 €

 * Euro de rente viagère d’un homme âgé de 70 ans à la date de la liquidation selon le barème de la Gazette du Palais 2022 avec taux d’actualisation à -1%

  • TOTAL:  Taux de DFP à 25% = 73.652,12 €

 

IV- Portée

Malheureusement, ces deux décisions ne sont pas définitives puisque mes adversaires ont interjeté appel.

Deux Chambres de la Cour d’Appel de Rennes seront donc prochainement amenées à se prononcer sur la méthode d’indemnisation du déficit fonctionnel permanent selon une indemnité journalière viagère.

Certains arrêts de la Cour d’Appel de Rennes sont porteurs d’espoir :

  • Ex : Cour d’Appel de RENNES, 5ème Chambre, arrêt du 26 octobre 2022, n°19/03930: indemnisation du taux de DFP de 38% sur une base journalière viagère de 30 €.

Pour en savoir plus sur le cabinet et/ou pour toute question, vous pouvez contacter Maître Aurore ROUSSEL, Avocat en dommage corproel et droit médical à Nantes: https://www.rousselavocat.com/