Avec ce troisième confinement à la suite de la nouvelle vague de la COVID 19, tel le phœnix, l’attestation de déplacement dérogatoire renait de ses cendres.

Dans une cacophonie totale sur les fameuses exceptions permettant de sortir le bout de son nez, les autorités nous le rappellent : gare au malheureux voyageur pris par la patrouille sans son précieux sésame rempli en bonne et due forme.

Ce message est clairement relayé par les médias à grand renfort de discours dits pédagogiques.

Or, un arrêt du Conseil d’Etat du 22 décembre dernier n’aura pas échappé au juriste.

Le régime de ce laissez-passer est défini par l’article 4 II du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire.

Celui-ci expose : II. - Les personnes souhaitant bénéficier de l'une de ces exceptions doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d'un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l'une de ces exceptions.

La Haute juridiction en tirant toutes les conséquences avait ainsi pu juger : L'obligation de se munir d'un tel document, qui est dépourvue d'ambigüité et contribue à garantir le respect des mesures de confinement, […] ne prévoit aucun formalisme particulier, de sorte que tout document apportant des justifications équivalentes peut être produit à cette fin. (CE, 22 décembre 2020, n° 439956).

Or, le décret n° 2021-296 du 19 mars 2021 prescrivant les mesures pour ce nouveau confinement, s’il a modifié les exceptions à l’interdiction de circuler, n’a pas changé la formulation de cet article 4 II et cette jurisprudence reste opérante pendant ce troisième confinement qui commence.

L’attestation de déplacement dérogatoire n’a ainsi rien d’obligatoire ! Elle n’a pas plus de valeur qu'un autre justificatif légitimant le déplacement (convocation, facture de retour de courses...).

Le ministre de l’Intérieur s’est félicité des contrôles opérés pendant le deuxième confinement et menace d’intransigeance pour ce troisième. Au regard de cette jurisprudence, combien de verbalisations à 135 euros l’ont été sans base légale ou le seront car ce précieux document sera absent ou mal rempli ?