Il a fallu la loi dite DATI du 24 novembre 2009 pour que les détenus âgés bénéficient selon des conditions assouplies d'un aménagement de leur peine.

L’article 729 du code de procédure pénale fixe les règles d’octroi de la libération conditionnelle et son dernier alinéa précise le cas des détenus âgés de plus de 70 ans :

«Lorsque le condamné est âgé de plus de soixante-dix ans, les durées de peines accomplies prévues par le présent article ne sont pas applicables et la libération conditionnelle peut être accordée dès lors que l'insertion ou la réinsertion du condamné est assurée, en particulier s'il fait l'objet d'une prise en charge adaptée à sa situation à sa sortie de l'établissement pénitentiaire ou s'il justifie d'un hébergement, sauf en cas de risque grave de renouvellement de l'infraction ou si cette libération est susceptible de causer un trouble grave à l'ordre public. »


Détenu à 70 ans. Il faut chercher le sens de la peine à cet âge là.

Une punition? Les problèmes de santé la font relativiser.

Les établissements pénitentiaires ne sont pas adaptés à un public âgé et c'est la raison consensuelle retenue pour justifier la mesure "de faveur".

Or, disons le, à cet âge, le risque de récidive est plus que théorique.

Pour l'aménagement d'une peine de prison ferme, on ne saurait, comme pour les détenus "ordinaires", poser trop de conditions liées à des efforts de réinsertion.

Trouver un logement (adapté à l'âge et à la dépendance) est donc pratiquement la seule condition, souvent déjà assez difficile à remplir.

Evidemment, c'est une importante distorsion par rapport aux autres détenus qui doivent notamment avoir accompli la moitié de leur peine.

Ce qui amène d'ailleurs parfois à estimer "prématurée" une demande d'un vieux papy candidat à la libération conditionnelle dans ces conditions.

Sauf que c'est l'esprit de la loi.

La plus grande difficulté pour son application, c'est la modification du système de pensée des agents du SPIP (service pénitentiaire d'insertion et de probation), voire des magistrats (procureurs naturellement mais de manière plus surprenante juges d'application des peines).

La frilosité parfois constatée dans l'application, au nom du peuple français, de la loi votée par ses représentants tient sans doute à l'écho médiatique démesuré des rares cas de réitération d'infractions de condamnés en aménagement de peine, d'autant plus rares qu'ils sont âgés.

Pourtant, les victimes, l'opinion publique seraient troublées d'apprendre que des cas de récidives auraient scandaleusement pu être évités si la loi avait simplement été appliquée et que, sans cette crainte irrationnelle, un aménagement de peine avait été octroyé.

La libération conditionnelle permet de réduire considérablement le risque de récidive. Plus elle est mise en place tôt dans l'exécution de la peine, plus elle est efficace. Plus la personne qui en bénéficie est âgée et plus la récidive diminue.

Il est vrai que les données criminologiques existantes et propres à apaiser cette crainte irrationnelle de la récidive ne sont pas diffusées par les grands médias populaires à l'occasion de faits divers à fort impact émotionnel.

On l'a vu au sujet des permissions de sortir récemment: avocats ou magistrats "rament" (sans démériter) lorsqu'il s'agit de convaincre le grand public de se défaire des idées savamment distillées par les lobbies de la sécurité et de la peur. Juges et parties, leur science est rapidement discréditée comme partisane, aussi fantaisiste que soit l'idée qu'ils soient des mercenaires du mal contre le bien.

Comme après un crash aérien, des experts viennent au JT de 20h rappeler que l'avion est le moyen de transport le plus sûr, à quand l'interview d'une Annie KENSEY (Prison et Récidive - Ed. Armand Colin) à la suite d'un sujet sur un crime abominable passant en boucle sur tous nos écrans ?