Le Pacte Dutreil est un dispositif qui permet de réaliser de substantielles économies d’impôts en cas de transmission à titre gratuit de titres d’une société opérationnelle.
L’article 787 B du code général des impôts prévoit que lorsque les titres d’une société opérationnelle font l’objet d’une transmission à titre gratuit, couplée à un engagement de conservation, une exonération de droits de mutation à titre gratuit peut s’appliquer pour les trois quarts de leur valeur (sans limitation de montant).
Cela signifie qu’en cas d’acquisition à titre gratuit de parts sociales ou d’actions d'une société opérationnelle, - et sous réserve que diverses conditions impératives soient remplies -, seule 25% de la valeur de ces titres serait soumise aux droits de mutation à titre gratuit.
Ce type de mutation peut être réalisé sous la forme d’une donation, ou peut faire l’objet d’une transmission par décès.
L’exonération partielle s’applique pour l’essentiel aux transmissions à titre gratuit de parts sociales ou actions d’une société opérationnelle, ainsi qu'aux transmissions de titres de sociétés holdings animatrices de groupe.
Cet article a pour objet de traiter ce dernier cas de figure.
Pour bénéficier de l'exonération Dutreil, il est impératif que l’activité d’animation de la société holding soit prépondérante.
Pour qu’une holding soit considérée comme animatrice, elle doit participer activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle de ses filiales.
Le cas échéant, la holding doit rendre des services à ses filiales. Il s’agit en général de services administratifs, comptables, financiers ou juridiques.
La doctrine administrative précise que si la société holding ne remplit pas les conditions requises pour être qualifiée d’animatrice, la transmission à titre gratuit de ses titres ne peut bénéficier de l’exonération partielle prévue dans le cadre du dispositif Dutreil (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10).
Selon la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation, la prépondérance de l’activité d’animation est admise dès lors que la valeur vénale des titres des filiales du groupe représente au moins 50% de l’actif total de la société holding (Cass. com. 14-10-2020 n° 18-17.955FS-PB).
Dans un arrêt en date du 3 mars 2021, la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a pris le soin de mentionner que la qualification de holding animatrice est exclue si la société ne détient pas de participation dans une société opérationnelle, ou que la mise en œuvre de moyens de contrôle sur ses filiales n’est pas démontrée (Cass. com. 3-3-2021 n° 19-22.397 FS-PR).
A noter que dans un arrêt en date du 24 octobre 2022, la Cour d’Appel de Paris a jugé que la prépondérance de l’activité d’animation s’apprécie au regard de la valeur des filiales, mais également de celles d’autres actifs éventuellement affectés à l’activité d’animation (CA Paris 24-10-2022 n° 21/00555).
Par ailleurs, dans un arrêt récent en date du 15 mars 2023, la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a considéré que l’existence d’une convention d’animation entre la holding et ses filiales n’est pas suffisante pour apporter la preuve du caractère animateur de la société holding (Cass. com. 15-3-2023 n° 21-10.244 F-D).
Quoi qu'il en soit, il est impératif que l’activité d’animation soit préexistante à la donation pour bénéficier du dispositif d’exonération partielle (Cass. com. 11-5-2023 n° 21-16.923, 21-16.924 et 21-16.925 F).
Cela signifie concrètement que la transmission de titres d’une holding nouvellement constituée est inéligible au dispositif du Pacte Dutreil.
Cela étant, le redevable qui revendique l’exonération partielle doit être en mesure d'apporter la preuve du rôle d’animation joué de manière effective par la société holding au jour de la transmission de ses titres.
En l'état actuel de la jurisprudence, l’exercice d'une animation effective par la société holding d’un groupe de sociétés doit être caractérisé avant-même la conclusion de l’engagement collectif de conservation (ou dans les deux années antérieures à la transmission, ou au décès, en cas d’engagement réputé acquis).
S’il n’est pas possible d’apporter la preuve du caractère animateur de la holding au moment de la transmission, il pourrait être envisagé de se placer sous le régime des sociétés interposées prévu à l’article 787 B, b, 3 du code général des impôts.
Dans ce dernier cas de figure, l’engagement de conservation ne porterait pas sur les titres de la société holding (passive), mais sur les participations détenues dans ses filiales opérationnelles. C’est la société holding (avec le cas échéant d’autres actionnaires) qui souscrirait cet engagement de conservation.
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Didier MAJEROWIEZ
Avocat au Barreau de Paris
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