Le partage d’une succession ou le partage après divorce en Alsace-Moselle combine les dispositions des articles du code civil et celles spécifiques de la loi du 1er juin 1924 « mettant en vigueur la législation française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ».
Selon le code civil, « les successions s’ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt » ( article 720 ) et, comme pour le divorce ( article 267 du code civil ) il s’ensuit en principe le partage des biens.
Le partage n’est toutefois pas automatique, et il n’a pas lieu tant qu’il n’est pas demandé soit par les héritiers dans le cas d’une succession, soit par l’un des conjoints dans le cas d’un divorce.
Le partage peut être demandé à tout moment et ce droit pour tout indivisaire, héritier ou divorcé, est imprescriptible.
Le partage s’effectue amiablement quand tous les intéressés sont d’accord.
Ce n’est qu’en cas de désaccord, soit sur l’ouverture du partage, soit sur les opérations de partage, que le tribunal doit être saisi d’une demande de partage judiciaire.
Cette procédure de partage judiciaire est soumise en Alsace-Moselle aux dispositions spéciales du Titre VI de la loi du 1er juin 1924 relatif à la « procédure de partage et vente judiciaire d’immeubles » ( articles 220 à 261 de la loi ), ainsi qu’au code local de procédure civile.
Il sera présenté comment s’organise le partage judiciaire en Alsace-Moselle.
1°) La demande de partage :
Selon l’article 2 de l’annexe du Nouveau Code de Procédure Civile, le partage judiciaire et la vente judiciaire d’immeubles dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle restent soumis à la loi du 1er juin 1924.
Dans ces matières, les dispositions du N.C.P.C. ne sont dons pas applicables
En vertu de l’article 3 de l’annexe et des articles 221 de la loi de 1924 et L.223-5 du code de l’organisation judiciaire, les tribunaux d’instance sont seuls compétents pour connaître en premier ressort du partage judiciaire.
Le tribunal territorialement compétent est celui du lieu d’ouverture de la succession, ou du lieu du domicile du défendeur ou de situation des biens immobiliers pour les partages autres que successoraux.
L’article 221 de la loi dispose : « Chaque partie intéressée est en droit de demander l’ouverture de la procédure.
« La demande doit indiquer clairement les parties intéresées et la masse à partager et contenir les propositions éventuelles sur le choix du notaire.
« Si plusieurs tribunaux d’instance sont compétents, le demandeur a le droit de choisir entre eux. Si la demande en partage a été formée par plusieurs intéressés, celle qui est la première en date fixe la compétence du tribunal.
« Le tribunal compétent pour le partage d’une succession est également compétent pour le partage des communautés de biens, successions et autres masses qui en dépendent. Sur la demande de l’une des parties intéressées, le juge peut néanmoins, s’il le trouve utile, prononcer la distraction de la procédure de l’une de ces masses. »
Ce dernier paragraphe vise par exemple le cas où le défunt, qui était divorcé, décéde avant que le partage des biens communs ait été réalisé.
Il en résulte deux masses à partager : la masse des biens communs avec son ex-conjoint, et la masse des biens du défunt entre ses héritiers.
Dans cette hypothése, le tribunal saisi, soit par l’un des héritiers, soit par l’ex-conjoint, ordonne dans une même décision le partage des deux masses.
Le tribunal vérifie que la demande est bien fondée :
Article 222 : « Si d’autres renseignements sont nécessaires avant de statuer sur la demande, le tribunal saisi a à les provoquer, soit en demandant des éclaircissements oraux au demandeur, soit en lui donnant des injonctions à cet égard.
Le tribunal assure le respect du principe du contradictoire en transmettant aux autres parties intéressées la demande en ouverture du partage ainsi que les autres conclusions, et il leur fournit l’occasion de faire des propositions sur le choix du notaire.
2°) La décision du tribunal :
Article 223 : « Si la demande est reconnue non fondée ou inadmissible, ou si elle ne peut être complétée, le juge doit la rejeter. Dans le cas contraire, il renvoie les parties devant le notaire qu’il désigne pour procéder au partage.
« Si les circonstances s’y prêtent, un autre notaire peut être chargé de certaines parties de la procédure. Les prescriptions ci-dessus sont applicables si, dans le cours de la procédrue, la désignation ou le remplacement d’un notaire deviennent nécessaires.
« La désignation d’un notaire pour les opérations de partage implique la mission de procéder le cas échéant à l’inventaire.
La décision du tribunal est notifiée aux parties par LR / AR ( article 5 de l’annexe du N.C.P.C.)
Les parties disposent d’un délai de quinze jours pour former un recours contre la décision. Ce recours, dénommé pourvoi immédiat, est présenté au tribunal ayant rendu la décision. Le tribunal accepte ou non de réviser sa décision. Si le tribunal maintien sa décision, il renvoit la procédure devant la cour d’appel qui statuera. ( article 7 de l’annexe )
Le pourvoi est, en principe suspensif, et l’exécution de la décision ordonnant le partage est suspendue jusqu’à l’expiration du délai de quinze jours et, en cas de recours, jusqu’à la décision de la cour d’appel ( article 5 de l’annexe ).
3°) La mission du notaire :
Quand la décision ouvrant le partage est devenue définitive, « le tribunal adresse au notaire commis l’ordonnance avec les actes et le certificat constatant l’époque où la décision a acquis l’autorité de la chose jugée » ( article 223 ).
Article 224 : « Le notaire invite le demandeur à fournir toutes justifications utiles concernant l’objet de la demande et à faire des propositions précises sur le mode et les bases du partage qu’il provoque ».
Le demandeur doit fournir ces informations sous peine d’extinction de la procédure : « Si, dans les six mois , après que la décision a obtenu l’autorité de la chose jugée, le demandeur ou une autre partie intéressée ne remplit pas les conditions prévues par l’alinéa précédent, la procédure est à considérer comme éteinte. »
Le notaire convoque les parties à un jour fixé pour les débats, au moins quinze jours avant. Si une des parties est domicilié en dehors des trois départements, le délai de convocation est de un mois.
Le notaire communique aux parties les propositions du demandeur, mais cette obligation n’est pas sanctionnée par la nullité au cas où elle ne serait pas respectée.
En cas de non-comparution les absents sont présumés consentir au partage.
Le notaire dresse un procès verbal des débats ( article 225 ).
4°) Les mesures d’expertise visant à déterminer la valeur des biens, la possibilité de partage en nature et pour former les lots :
A la demande des parties une expertise peut être ordonnée. Elle est obligatoire en présence de mineurs ou d’incapables majeurs, lorsque que des biens immobiliers doivent être attribués.
Si les parties sont d’accord sur le choix du ou des experts, ceux-ci sont assermentés par le notaire. En revanche en cas de désaccord, le notaire soumet le choix de l’expert au tribunal.
Le ou les experts effectuent la mission qui leur a été confiée en convoquant les parties et remettent au notaire leur rapport. Celui-ci avise les parties qu’elles peuvent en prendre connaissance à son étude, et sur leur demande il leur en adresse une copie ( article 227 ).
5°) La vente des biens :
Article 228 : « Si le partage en nature n’est pas faisable sans qu’il en résulte une dépréciation des biens à partager, ceux-ci doivent être vendus, à moins que toutes les parties se soient entendues autrement. »
La vente des meubles se fait aux enchères publiques.
La vente des immeubles a lieu par voie d’adjudication devant le notaire chargé du partage. Les parties s’accordent sur les propositions de prix. A défaut d’entente, le prix est fixé par un ou trois experts.
Les conditions de l’adjudication sont régies par les articles 243 à 256 relatifs à la « vente judiciaire d’immeubles ».
6°) Les attributions aux copartageants :
« Le notaire convoque les parties aux fins d’établir les masses, de fixer les droits de chaque intéressé, de former les lots et de procéder ensuite au tirage au sort de ces lots ».
En cas de désaccord sur le tirage, les objections doivent être soulevées devant le notaire avant ledit tirage au sort. Après celui-ci, même d’une partie seulement des lots, il ne peut plus être soulevé d’opposition. ( article 231 )
S’il n’y a pas d’objections, ou si celles-ci ont été tranchées par le tribunal, le notaire établit l’acte de partage qu’il remet au tribunal pour homologation.
Le juge peut demander au notaire de compléter ou modifier l’acte de partage et, en présence de mineurs ou de majeurs incapables, il doit s’assurer que leurs intérêts sont sauvegardés. ( article 235 )
Une fois homologué, l’acte de partage est revêtu de la force exécutoire, et est transmis au notaire.
L’exécution forcée est ainsi attaché à l’acte de partage, qui a force obligatoire pour les parties qui n’avaient pas participé aux opérations de partage. ( article 236 ).
7°) Les contestations durant les opérations de partage :
Les parties intéressées peuvent soulever des contestations sur les opérations de partage. Si le différend ne peut être réglé devant le notaire, celui-ci doit dresser un procès-verbal de difficultés et renvoie les parties à saisir le tribunal par voie d’assignation ( article 232 ).
Un partage partiel peut néanmoins être réalisé sur les points non litigieux, en réservant de partager les points contestés après que le tribunal ait statué ( article 233 )
8°) Les frais du partage :
Les frais de procédure ainsi que ceux des opérations de partage sont à la charge de la masse ( article 240 ).