Dans un arrêt qui reçoit les honneurs de la publication au bulletin, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a tranché : même le liquidateur judiciaire doit appliquer la clause d’agrément d’un bail commercial.


Source : Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 19 avril 2023, 21-20.655, Publié au bulletin.

A l’origine de ce contentieux, une SCI consent un bail commercial à une société, qui se retrouve peu après, placée en redressement judiciaire, transformé ensuite en liquidation judiciaire.

La clause d’agrément doit être respectée par le liquidateur judiciaire, lors de la cession d’un bail commercial, peu importe les circonstances : que la cession soit isolée (bail seulement) ou incluse dans la cession globale du fonds de commerce.

Quelques semaines plus tard, la bailleresse réagit à ces procédures collectives. Elle :

  • délivre au liquidateur judiciaire précédemment nommé, un commandement de payer les loyers postérieurs au jugement d’ouverture,
  • et sollicite par requête, résiliation du bail.

Dès le lendemain, et au visa de l’article L642-19 du Code de commerce, le liquidateur judiciaire saisit le juge commissaire aux fins de faire autoriser la cession de gré à gré du fonds de commerce, lequel inclus obligatoirement le bail commercial.

L’ordonnance rendue par le juge commissaire, en dépit de l’opposition formulée par la bailleresse, autorise ladite cession au profit d’une troisième société. La bailleresse interjette appel.

Les juges du fond ont considéré, pour confirmer l’ordonnance rendue par leur confrère, que la clause d’agrément incluse dans le bail commercial « pour toute cession de bail » ne s’appliquait pas en cas de cession du fonds de commerce. La bailleresse se pourvoit en cassation.

Les juges du Quai de l’Horloge censurent leurs collègues du fonds en ces termes :

« 11. Il résulte (…) qu’en cas de liquidation judiciaire, la cession du droit au bail, seule ou même incluse dans celle du fonds de commerce, autorisée par le juge-commissaire, se fait aux conditions prévues par le contrat à la date du jugement d’ouverture, à l’exception de la clause imposant au cédant des obligations solidaires avec le cessionnaire. En conséquence, le bailleur est fondé à se prévaloir de la clause du bail prévoyant l’agrément du cessionnaire par le bailleur ».

Toutes les clauses du bail commercial doivent donc s’appliquer, à une seule exception, celle relative à la solidarité du cédant avec le cessionnaire.

En conséquence, lorsque le liquidateur désigné envisage une cession du fonds de commerce au cours de la procédure collective, il est tenu de se conformer aux clauses du bail commercial, et notamment à celle prévoyant l’agrément du cessionnaire par le bailleur, lequel conserve donc toute sa place même en cas de liquidation judiciaire.

 

https://www.village-justice.com/articles/clause-agrement-bail-commercial-meme-liquidateur-judiciaire-doit-appliquer,46597.html