L'indemnisation du déficit fonctionnel permanent en cas de faute inexcusable de l'employeur

 

L’article L452-1 du Code de la sécurité sociale dispose « lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants ».

Ainsi, l’article L452-3 du Code dispose « indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit (…), la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. (…))

Le Conseil Constitutionnel a décidé, dans une décision en date du 18 juin 2010, que les dispositions des articles L451-1 et L452-1 à 5 du code de la sécurité sociale n’étaient pas contraires ni au principe de responsabilité ni au principe d’égalité ni a aucun droit ou liberté que la Constitution garantit.

Néanmoins, le Conseil émettait une réserve d’interprétation en jugeant « qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de ce texte (article L452-3 du Code de la Sécurité sociale) ne sauraient toutefois, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes, devant les mêmes juridictions, puissent demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ».

Dès lors, la liste éditée à l’article L452-3 du Code ne saurait être limitative (2ème Civ, 30 juin 2011).

 

La question restait de savoir quels étaient les postes de préjudice couverts par le livre IV du Code de la Sécurité sociale.

A titre d’exemple, la Cour de cassation jugeait que la rente versée à la victime d’un accident du travail indemnisait d’une part les pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité, et d’autre part le déficit fonctionnel permanent, de sorte que celui-ci était couvert par le livre quatre du code de la sécurité sociale.

Or, par un arrêt du 20 janvier 2023, la Cour de cassation,( n°20.23-673) en Assemblée plénière, a jugé que la rente accordée à la victime d’un accident du travail n’avait pas vocation à indemniser le déficit fonctionnel permanent.

Cette décision est à saluer, dès lors qu’elle permet une meilleure indemnisation de la victime d’un accident du travail et une meilleure égalité entre l’indemnisation des victimes de droit commun et celle des victimes d’accidents ou de maladies du travail.

 

En effet, rappelons que le déficit fonctionnel permanent est défini dans la nomenclature DINTILHAC comme « la réduction définitive du potentiel physique et psychosensoriel ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable (…) »

Ainsi doivent être indemnisées à ce titre les souffrances physiques et psychologiques post consolidation et les troubles ressentis dans les conditions d’existence.

Rappelons que la rente prévue au livre IV du code de la sécurité sociale est basée sur le salaire précédemment perçu par le salarié.

Dès lors, seuls les préjudices patrimoniaux notamment la perte de gains professionnels futurs nous semblaient être indemnisés par cette rente.

 

Alors que la victime de droit commun bénéficiait d’une indemnisation distincte tant au titre de la perte de gains professionnels futurs, que de l’incidence professionnelle, que du déficit fonctionnel permanent, la victime d’un accident du travail devait se contenter d’une seule indemnisation pour ces trois postes de nature différente.

L’arrêt de l’Assemblée plénière vient corriger cette injustice.

 

https://www.courdecassation.fr/decision/63ca685359756f7c906ce1ef