Les avocats constatent régulièrement que de nombreux particuliers se présentent en audience devant des juridictions où la représentation par un avocat n'est pas obligatoire (Juge des contentieux de la protection, Tribunal judiciaire en procédure orale ou Tribunal de commerce) en ignorant tout, ou presque, de l'attitude à adopter à l'occasion de ce qui est souvent une première rencontre avec le monde judiciaire.

En dépit des explications qui peuvent leur être prodiguées par les magistrats et les avocats, cette inexpérience des particuliers peut les empêcher de présenter correctement leur argumentation et retarder le déroulement de la procédure.

Le présent article souhaite donc apporter aux particuliers quelques conseils afin de leur permettre de se présenter en audience avec les informations nécessaires au bon déroulement de la procédure.

Nous étudierons dans une première partie l'assignation proprement dite, avant d'évoquer dans un second article le déroulement des audiences.

PREMIERE PARTIE - COMMENT REAGIR A L'ASSIGNATION ?

Un huissier s'est présenté à votre adresse et vous a remis (ou a essayé de vous remettre) une assignation . Cette assignation vous demande de vous présenter devant le Juge de Proximité, le Tribunal d'Instance ou le Tribunal de Commerce (attention, les conseils qui vont suivre ne concernent particulièrement que ces trois juridictions et non les juridictions pénales, administratives, sociales ... ou encore le Tribunal de Grande Instance, sauf en référé). L'assignation mentionne que vous pouvez vous présenter et vous défendre seul, tout en ayant la possibilité de vous faire assister ou représenter par un avocat. Que faire ?

Premier conseil : Ne pas rester inactif. Dans le cas contraire, un huissier reviendra frapper à votre porte dans quelques semaines pour vous signifier une décision de justice prononcée en votre absence, puis la faire exécuter.

Il est très probable que vous ayez déjà reçu des courriers vous alertant sur le sérieux de la situation : mises en demeure, courriers d'avocats, interventions d'un cabinet de recouvrement ... Désormais, votre situation a pris une nouvelle dimension. La personne qui vous a assigné en justice a engagé des frais pour qu'une décision judiciaire soit rendue dans le litige qui vous oppose ; par exemple, pour que vous soyez condamné à lui payer une somme d'argent.

Cette décision lui permettra ensuite de faire procéder à l'exécution forcée des condamnations qu'elle aurait obtenues à votre encontre. Concrètement, elle pourra notamment requérir les services d'un huissier pour faire procéder à la saisie de vos biens.

Deuxième conseil : Evaluer la situation. Lire attentivement l'assignation, comprendre qui vous assigne, relever les faits et documents qui sont mentionnés (et plus particulièrement les faits qui vous sont probablement reprochés) et les demandes formulées à votre encontre.

Troisième conseil : Définir votre position. De manière simple, deux choix s'offrent à vous :

Premier choix : Vous considérez que la personne qui vous assigne a raison, que les faits sont exacts et complets, et que ses demandes sont raisonnables et fondées. Dans ce cas, il peut être encore temps d'écrire à cette personne ou à l'avocat la représentant (si un avocat intervient, il sera mentionné sur l'assignation) pour recherche une solution amiable.

Mais votre interlocuteur (avocat, entreprise de recouvrement, service contentieux ou comptabilité) doit pouvoir considérer cette proposition comme sérieuse. Il est donc recommandé, d'une part, qu'elle soit détaillée (par exemple, si vous proposez le règlement d'une dette en plusieurs fois, précisez les dates, au jour près si nécessaire, notamment si certaines de vos rentrées ou sorties d'argent arrivent à des moments particuliers du mois, et précisez également les montants), et d'autre part, qu'elle permette un règlement rapide du conflit (il faut éviter les échéanciers sur des durées manifestement excessives).

Conservez une copie de cette lettre, qu'il est préférable d'adresser en courrier recommandé avec accusé de réception. Sauf à ce qu'il s'agisse d'une question de principe ou que vous ne soyez pas considéré comme sérieux et fiable en raison de votre comportement passé, vous avez de bonnes chances qu'une telle proposition soit acceptée, quitte à devoir assumer en plus le paiement des frais de justice déjà engagés par votre adversaire.

Attention, il est important de noter qu'une telle proposition pourra être considérée comme une reconnaissance que les sommes sont effectivement dues, et qu'en conséquence, il vous sera presque impossible de les contester par la suite devant le juge si votre adversaire refuse d'accepter votre proposition et poursuit la procédure.  

Dans l'hypothèse où votre adversaire est représenté par un avocat, recourir vous-mêmes aux services d'un avocat pour formuler vos propositions vous permettra de limiter ce risque. En effet, les courriers entre avocats sont confidentiels.

De plus, l'analyse juridique du dossier par un avocat peut également remettre en cause votre appréciation du bien-fondé des demandes de votre adversaire en mettant par exemple en évidence une faute qu'il aurait commise ou une disposition de la loi qui vous bénéficie.

Si votre proposition est acceptée, votre adversaire pourra vouloir formaliser votre proposition sous la forme d'un accord transactionnel. Cet accord vous sera adressé pour que vous le signiez et pourra ensuite être soumis au Tribunal ou au Juge pour être homologué. L'homologation donne à l'accord une valeur similaire à un jugement. Si la transaction prévoit une sanction en cas de non-respect de son contenu, cette sanction pourra donc être mise à exécution par un huissier. En pratique, cette sanction sera généralement l'exigibilité immédiate de la totalité des sommes dues. Soyez donc certain de pouvoir tenir vos engagements.

Second choix : Vous considérez que vous avez de bonnes raisons de discuter les faits, et surtout les demandes adverses. Dans ce cas, sauf à être réellement sûr de vous et des éléments en votre possession ou que l'enjeu soit dérisoire, il est dans votre intérêt de solliciter l'assistance d'un avocat, et ce même s'il n'est pas obligatoire devant ces juridictions. En effet, un avocat sera mieux à même de vous informer sur vos chances de succès, de vous conseiller sur la conduite à adopter et de présenter une argumentation juridique pertinente en réponse aux demandes de votre contradicteur.

Certes, les services d'un avocat ne sont pas gratuits. Ses honoraires sont à mettre en relation avec l'enjeu du litige. Toutefois, vous devez savoir que le coût des services d'un avocat peut être réduit. Comment ?

  • D'abord, vérifiez dans vos contrats d'assurances si vous disposez d'une assurance de protection juridique au titre de laquelle votre assureur peut prendre en charge (en totalité ou partiellement) les frais d'avocats que vous serez amené à engager. Vous conservez la liberté de choisir votre avocat, l'assureur de protection juridique ne pouvant vous en proposer un qu'après demande écrite de votre part.
  • Ensuite, vérifiez si, en fonction de vos revenus, vous pouvez bénéficier de l'aide juridictionnelle (pour plus de précisions sur ce point, je vous renvoie sur le site du Ministère de la Justice : https://www.justice.fr/simulateurs/aide-juridictionnelle). Si vous faites une demande d'aide juridictionnelle, informez-en le Tribunal et votre adversaire par courrier en justifiant de cette demande et sollicitez un renvoi lors de l'audience dans l'attente de la décision du bureau d'aide juridictionnelle.
  • Enfin, pensez que votre adversaire, s'il perd, peut être condamné à vous payer une somme au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, supposé en théorie couvrir notamment les frais d'avocats (mais n'espérez pas en être remboursé en totalité). Bien sûr, si vous perdez, vous pourriez être condamné à payer une somme à ce titre.