Un propriétaire peut se voir imposé un preneur avec lequel il sera lié par un bail, dans l'hypothèse où l'exploitant antérieur ne se trouve pas en règle avec le contrôle des structures des exploitations agricoles.

Un tel bail "forcé" découle des dispositions de l'article L 331-10 du Code rural et de la pêche maritime.

Au préalable, cette procédure suppose que tel fonds soit mis en valeur par un exploitant qui contrevient au contrôle des structures. Le contrevenant peut être, soit le propriétaire lui-même (situation de faire-valoir direct), soit l'exploitant choisi par ce dernier (faire-valoir indirect : prêt usage, bail rural, ....).

L'exploitant en place peut se trouver en contravention, soit parce qu'il n'a pas demandé d'autorisation d'exploiter alors que sa situation l'exige (1), soit parce que, ayant essuyé un refus d'exploiter de la part de l'administration, il continue, malgré tout, à mettre en valeur le fonds (2).

(1) Si l'exploitant en place n'a pas déposé de demande d'autorisation d'exploiter alors qu'il doit le faire (agrandissement au-delà du seuil de contrôle par exemple), l'administration peut lui délivrer une mise en demeure de présenter une telle demande dans un délai qu'elle détermine (lequel délai ne peut être inférieur à un mois).

Passé ce délai et dans le cas où l'exploitant n'aurait pas obtempéré, l'administration peut alors lui notifier une seconde mise en demeure : mise en demeure de cesser l'exploitation (dans un délai de même durée).

(2) A supposer que l'exploitant ait bien déposé la demande d'autorisation d'exploiter (soit spontanément, soit après avoir reçu une mise en demeure de déposer une telle demande), mais qu'il ait essuyé un refus (en particulier parce qu'un concurrent a bénéficié de l'autorisation d'exploiter le même fonds), et dans l'hypothèse où il continuerait à mettre en valeur les terres, l'administration peut alors lui notifier une mise en demeure de cesser l'exploitation dans un délai de même durée.

Si, dans l'un ou l'autre de ces cas de figure, le propriétaire n'a pas retenu un nouvel exploitant à l'expiration de l'année culturale au cours de laquelle la mise en demeure de cesser l'exploitation est devenue définitive, toute personne intéressée peut saisir le tribunal paritaire des baux ruraux pour que lui soit accordé le droit d'exploiter le fonds. La décision alors rendue vaudra bail, le tribunal devant fixer le montant du fermage ainsi que les conditions de jouissance.

Une telle issue suppose toutefois que plusieurs conditions soient satisfaites.

Que la mise en demeure de cesser l'exploitation adressée à l'exploitant en place soit définitive, les recours possibles étant alors épuisés.

Que l'administration accepte de communiquer au concurrent (la personne intéressée) la copie des mises en demeure et des décisions judiciaires rendues si ces mises en demeure ont fait l'objet de recours.

Que la "personne intéressée" soit elle-même en règle avec le contrôle des structures, soit parce que l'opération est libre en ce qui la concerne, soit parce qu'elle est munie d'une autorisation d'exploiter dans le cas inverse.

Il conviendrait également que soit clarifié le devenir du droit d'exploiter dont bénéficiait juqu'alors l'exploitant en place, en particulier lorsqu'il était titulaire d'un bail consenti par le propriétaire. En effet, les mises en demeure notifiées au preneur n'ont pas pour effet, en elles-même, de mettre fin à ce bail et on voit mal comment le tribunal pourrait accorder un bail au profit de la "personne intéressée" tant qu'il n'a pas été mis fin au bail en cours.