Un bail rural type "9 ans" (soumis au Statut du Fermage) est conclu par acte notarié sur une surface de 11 hectares, ainsi qu'une location verbale sur une "petite" surface de 44 ares, le même jour, par le même propriétaire au profit du même locataire.

Dans le département en question, l'arrêté préfectoral fixe à 1 hectare le seuil de superficie en-deça de laquelle s'applique le régime (plus souple) des "petites parcelles". Ladite parcelle ne constitue ni un corps de ferme, ni un élément essentiel de l'exploitation du preneur. Dès lors, on peut penser que les dispositions de l'article L 411-3 du Code Rural et de la Pêche Martime s'appliquent.

Par la suite, le propriétaire délivre au locataire un congé portant sur la seule "petite" parcelle, lequel congé est délivré pour le terme de l'année culturale en cours et n'est pas motivé (puisqu'il n'a pas à l'être, selon le bailleur).

Le locataire saisit alors  le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux en annulation du congé et en reconnaissance d'un bail de 9 ans sur la "petite" parcelle.

Le tribunal, puis la cour d'appel rejettent sa demande, en considérant que la coexistence d'un bail écrit et d'une location verbale consentis le même jour ne permet pas d'établir l'intention du bailleur de faire échapper la "petite" parcelle au statut du fermage. Le juge ajoute que "la parcelle se trouvait dans une zone partiellement urbanisée, d'où l'éventualité d'un changement de destination de la parcelle agricole, justifiant ainsi l'établissement de baux soumis à des régimes distincts".

La haute juridiction casse et annule l'arrêt au motif que le juge du second degré aurait dû "caractériser l'existence, dans les prévisions des parties, d'un projet concret de changement de destination de la parcelle, de nature à justifier la renonciation par l'exploitant agricole aux dispositions impératives du statut des baux ruraux" (Cass. 3° civ., 12 déc. 2019, n° 18-11056).

Ainsi, la Cour de Cassation ne s'oppose pas à l'établissement concomitant de baux soumis à des régimes différents, mais sous deux conditions :

- qu'une cause objective, étayée par des éléments concrets, justifie l'adoption d'un régime dérogatoire,

- que l'exploitant ait une parfaite connaissance de cette cause et qu'il renonce, sans équivoque, au bénéfice du statut du fermage.

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