Selon l’article L 123-15 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) : «Le locataire d'une parcelle atteinte par l'aménagement foncier agricole et forestier a le choix ou d'obtenir le report des effets du bail sur les parcelles acquises en échange par le bailleur, ou d'obtenir la résiliation totale ou partielle du bail, sans indemnité, dans la mesure où l'étendue de sa jouissance est diminuée par l'effet de l'aménagement foncier agricole et forestier».

Cette disposition s’applique également en cas d’échange amiable de biens ruraux en dehors d’un périmètre d’aménagement foncier -> article L 124-1 du CRPM.

Dans ce cas, il est précisé que « En cas d’opposition du titulaire … des baux, l’acte d’échange est soumis, avant sa publication au fichier immobilier, à l’homologation du président du tribunal judiciaire statuant par voie de requête sur ordonnance » (Article L 124-1 du CRPM.alinéa 2).

Tout preneur dispose donc d’une option entre :

  • l’acceptation du report de son bail sur les parcelles attribuées à son bailleur (l’acceptation pouvant être tacite),

et

  • la résiliation totale ou partielle de son bail (sans indemnité cependant). Cette résiliation peut être tacite.

L’option pour la résiliation peut être exercée tacitement.

En cas d’option pour le report, les effets du bail sont reportés sur les nouvelles parcelles attribuées en échange au bailleur à l’issue de l’aménagement.

Si cette procédure n'est pas respectée de grosses difficultés sont à prévoir.

Ainsi, un bailleur (Mr A) échange les terres grevées d'un bail rural avec un voisin (Mr B). Il cède les parcelles X (objet du bail) et reçoit les parcelles Y (libres de bail). De façon surprenante, l'acte authentique indique qu'il n'y aura pas de transfert de bail pour le locataire, lequel continuera à exploiter les terres dont il est locataire (en l'espèce les parcelles X).

Cette disposition a pour effet d'imposer au preneur (Mr C) de continuer à exploiter les parcelles X, alors que le texte prévoit le report du bail sur les parcelles Y.

Par acte notarié, Mr A (pensant que les terres qu'il a reçues en échange sont libres de bail) loue ces parcelles (parcelles Y) à un autre locataire (Mr D).

Par lettre recommandée avec accusé de réception, le preneur A met en demeure Mr A de mettre en oeuvre toutes dispositions utiles afin qu'il puisse prendre possession des parcelles Y (que le bailleur A a reçu dans le cadre de l'échange).

Par l'intermédiaire de son notaire, Mr A lui répond que l'exécution du bail incombait désormais à Mr B (nouveau propriétaire des parcelles X).

Le preneur C saisit le Tribunal paritaire des baux ruraux en vue d'obtenir la poursuite du bail sur les parcelles Y.

La juridiction paritaire déboute le preneur de sa demande.

Dont appel.

La cour d'appel réforme la décision de première instance. Elle ordonne que le bail consenti intialement par Mr A à Mr C se poursuive sur les parcelles Y. Elle ordonne également que le nouveau locataire (Mr D) libère les lieux (parcelles Y).

A juste titre, elle a considéré que l'échange est intervenu dans des conditions qui ont méconnu le caractère personnel du bail et qu'il a imposé au preneur une substitution de bailleur à laquelle il n'a pas consenti (et qui est contraire au texte). CA Reims, 5 février 2022, n° 21/02109.