Arrêt de référence : Cons. Constit., QPC n°2016-588, 21 octobre 2016, CC des sources du Lac d’Annecy
Issue de la loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010, la commune nouvelle se substitue au dispositif de fusion de communes. La commune nouvelle permet non seulement de répondre à la nécessaire mutualisation des moyens, d’assurer les projets d’investissement mais également de continuer à offrir des services publics de qualité aux habitants
La loi NOTRé a apporté de la souplesse dans le fonctionnement et la mise en place de la commune nouvelle, tout en respectant le principe du volontariat, l’identité des communes fondatrices et en prévoyant des incitations financières.
Mais, la création de commune nouvelle a un impact sur la carte intercommunale.
Comme toute commune, la commune nouvelle doit obligatoirement être rattachée à une communauté.
Le dispositif de rattachement à un des EPCI était prévu à l’article L.2113-5 II du CGCT. Il était le suivant :
Lorsque la commune nouvelle est issue de communes contiguës membres d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre distincts, le conseil municipal de la commune nouvelle doit délibérer dans le mois de sa création sur l'établissement public dont elle souhaite être membre.
En cas de désaccord sur le choix, le Préfet saisit le CDCI d’un projet de rattachement à un autre EPCI, la CDCI ayant trois mois pour se prononcer.
La commune nouvelle ne devient membre de l'établissement public en faveur duquel elle a délibéré que si la CDCI s'est prononcée en ce sens à la majorité des deux tiers de ses membres. En l'absence d'une telle décision, elle devient membre de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre désigné par le représentant de l'Etat dans le département.
Un arrêté du représentant de l'Etat dans le département prononçait le rattachement de la commune nouvelle à un établissement public.
Jusqu'à l'entrée en vigueur de cet arrêté, par dérogation à l'article L. 5210-2, la commune nouvelle reste membre de chacun des établissements publics auxquels les communes appartenaient dans la limite du territoire de celles-ci. Jusqu'à l'entrée en vigueur de cet arrêté, les conseillers communautaires représentant les anciennes communes en fonction à la date de la création de la commune nouvelle restent membres de l'organe délibérant de l'établissement public.
Dans ce dispositif, aucune consultation des EPCI concernés, ni des communes membres n’est prévue, alors que le rattachement à l’un emporte le retrait de la commune historique de l’Autre, et le retrait de la commune historique implique des conséquences non négligeables (la répartition des sièges au sein de l’organe délibérant des EPCI-FP en cause, les ressources mises en commun, conséquences sur les équilibres financiers des EPCI, répartition du personnel art. L.5211-4-1 IV CGCT, transfert des biens et des contrats soit à la commune nouvelle soit à l’EPCI de rattachement, selon l’autorité compétente….).
De telle sorte que pour des raisons financières et fiscales, voire politique (en raison du poids démographique impactant sa représentation au sein des EPCI), la commune nouvelle pouvait choisir l’EPCI de son choix, sans avoir à demander l’avis (ou l’accord) de l’EPCI d’accueil, ni celui de l’EPCI délaissé.
Le Conseil Constitutionnel s’est ici attaché à préserver des garanties minimales qui doivent être offertes, aux communes membres des intercommunalités dont la commune nouvelle allait se retirer comme à celles membres de l’EPCI-FP auquel cette commune se rattacherait et aux EPCI concernés.
Le Conseil a ainsi jugé que en ne prévoyant pas la consultation de l’organe délibérant de l’EPCI auquel le rattachement est demandé, ni celui des organes délibérants des EPCI dont la commune nouvelle est susceptible de se retirer, ni la consultation des conseils municipaux des communes membres des EPCI concernés, le législateur a porté une atteinte excessive au principe de libre administration des collectivités.
Encore, il n’est prévu aucun dispositif en cas de désaccord avec le projet de rattachement : ni les EPCI concernés, ne les communes membres ne peuvent provoquer la saisine de la CDCI.
En l’absence de ces deux garanties (la consultation et le recours possible à la CDCI), le paragraphe II de l'article L. 2113-5 du code général des collectivités territoriales est déclaré contraire à la Constitution
Date d’entrée en vigueur de la déclaration d’inconstitutionnalité : le 31 mars 2017.
Effet immédiat : Afin de préserver l'effet utile de la décision, le Conseil constitutionnel énonce que la déclaration d'inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances en cours ou à venir dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles.
En cas d'annulation, sur ce fondement, de l'arrêté préfectoral portant rattachement d'une commune nouvelle à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre :
- la commune nouvelle reste membre de chacun des établissements publics auxquels les communes appartenaient dans la limite du territoire de celles-ci ;
- les conseillers communautaires représentant les communes historiques restent membres de l'organe délibérant de l'établissement public ;
- Les taux de fiscalité votés par les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre auxquels les anciennes communes appartenaient continuent de s'appliquer sur le territoire de celles-ci
On défait et on refait… : on reprend les compétences, on reprend les biens affectés à l’exercice des compétences, on reprend la répartition du personnel, on reprend les contrats en cours.
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