Par quatre arrêts rendus le même jour par la 1ère Chambre Civile le 11 février 2016 (n°14-22.938, n°14-28.383, n°14-27.143 et n°14-29.139), la Cour de Cassation vient de bouleverser les règles applicables en matière de prescription des actions en recouvrement des crédits immobiliers.
La Haute juridiction continue de considérer que les dispositions de l’article L. 137-2 du code de la consommation selon lesquelles « l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent au consommateur, se prescrit par deux ans » est applicable aux crédits immobiliers.
En revanche, la Cour de Cassation modifie le point de départ de ce délai biennal de prescription.
Auparavant, la Cour de Cassation faisait courir ce délai à compter de la première échéance impayée non régularisée sans faire de distinction entre les échéances impayées et le capital restant dû.
Cette position était très critiquée notamment en ce qu'elle faisait courir le délai de prescription du recouvrement du capital à une date antérieure à son exigibilité, qui comme chacun le sait, se situe à la date de la déchéance du terme.
Désormais, la Cour de Cassation estime « qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ces fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéances successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ».
Ainsi, la Cour de Cassation apporte une double inflexion à sa jurisprudence antérieure.
D'une part, les échéances impayées se prescrivent non plus à compter de la première échéance impayée non régularisée mais à compter de leurs dates d'échéances.
Il y a ainsi autant de délais de prescription qu'il y a d’échéances impayées.
D'autre part, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter non plus de la première échéance impayée non régularisée mais à compter de la déchéance du terme ce qui est parfaitement logique dès lors que c’est à compter de cette date que le capital est exigible.
Il s'agit là d'un revirement important de la jurisprudence de la Cour de Cassation en matière de crédit immobilier qui ravira naturellement les établissements bancaires mais également d'une certaine façon, les débiteurs.
En effet, la position de la Cour de Cassation obligeait les établissements bancaires à diligenter sans tarder les procédures de recouvrement afin de ne pas se voir opposer la prescription de leur action ce qui naturellement, ne laissait pas beaucoup de place au recouvrement amiable…
De plus, ce revirement est plus conforme aux sources même de la prescription qui a pour but, rappelons-le, non pas de favoriser les débiteurs peu scrupuleux mais bien de sanctionner le créancier qui n'est pas diligent.
Désormais, l'établissement bancaire qui tardera plus de deux ans après le prononcé de la déchéance du terme à agir en recouvrement à l'encontre de son débiteur se verra déchu de son action en paiement du capital.
Il s'agit là d’un juste retour des choses qui va permettre selon l'auteur de ces lignes de « détendre » quelque peu les relations entre les établissements bancaires et leurs clients confrontés à des difficultés passagères pour honorer leurs engagements.
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