Règlement du prix d’adjudication : Après l’heure, c’est toujours l’heure… ! (Cour de cassation, 2e chambre civile, 1 Octobre 2020 – n° 19-12.830)

 

L’article L. 322-12 du code des procédures civiles d'exécution dispose qu’à défaut de versement du prix ou de sa consignation et de paiement des frais, la vente par adjudication est résolue de plein droit.

L'article R. 322-66 du code des procédures civiles d'exécution prévoit quant à lui que le versement au séquestre ou la consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations du prix est opéré dans un délai de deux mois à compter de la date d'adjudication définitive, à peine de réitération des enchères.

A la lecture de ces deux articles, on pourrait (trop rapidement) déduire que l’adjudicataire qui ne règle pas le prix dans le délai de deux mois de l’adjudication définitive, c’est-à-dire, à l’expiration du délai de 10 jours de surenchère,  s’expose automatiquement à la sanction de la résolution de la vente…

Or, telle n’est pas l’analyse des textes par la Cour de cassation, dans l’arrêt rendu par la 2ème chambre civile le 1 Octobre 2020 – n° 19-12.830.

Dans cette affaire, le commissaire à l’exécution des plans de redressement des débiteurs (lesquels avaient été placés en redressement judiciaire au cours de la procédure) avait tenté de faire valoir le caractère automatique de la sanction, qui résultait selon lui des termes de l’article L.322-12 du CPCE évoqué supra.

La Cour d’appel ne fut pas de cet avis et considéra que la demande de résolution de la vente par adjudication ne pouvait s'entendre que dans le contexte d'une procédure de réitération d'enchères.

Les juges d’appel faisaient d’ailleurs remarquer que l’article R.322-56 du CPCE prévoit expressément la possibilité d’un paiement au-delà du délai de deux mois (sauf à augmenter de plein droit de prix de vente des intérêts au taux légal jusqu'au versement complet du prix ou sa consignation).

La Cour de cassation approuve les juges du fond.

Elle considère que l’adjudicataire peut parfaitement consigner le prix de vente et payer les frais au-delà du délai de deux mois suivant l'adjudication, la seule sanction du défaut de paiement dans ce délai étant la possibilité pour les créanciers et le débiteur de poursuivre la réitération des enchères.

Selon elle, « ce n'est qu'en l'absence de consignation ou de versement du prix et de paiement des frais à la date où le juge statue que la résolution de la vente peut être constatée, à l'occasion de la procédure de réitération des enchères ou par une action tendant à cette seule résolution ».

 

 

Ainsi, la résolution de la vente de plein droit n'est pas encourue dès l'expiration du délai de deux mois à compter de la date d'adjudication définitive.

Dès lors que l’adjudicataire a pu consigner le prix et les intérêts de retard avant que le juge ne statue, il n’y aura pas lieu de constater la résolution de la vente.

« Moralité »… : Vous, adjudicataires retardataires, qui n’avez pas réglé le prix d’adjudication dans le délai de deux mois, ne stressez pas ! : tant que le juge n’a pas statué dans le cadre de la procédure de réitération des enchères, vous pouvez payer sans crainte!

On ne saurait toutefois que conseiller aux adjudicataires de régler dès que possible le prix d’adjudication, ne serait-ce que pour éviter d’avoir à exposer inutilement des frais dans le cadre d’une procédure de réitération des enchères…

 

Me Florent BACLE
Spécialiste en Droit des garanties, des sûretés et des mesures d'exécution, 
Qualification  spécifique "Vente et saisie immobilière"