La nature sexiste des propos tenus par un salarié-humoriste peut-elle justifier le licenciement d’un animateur de télévision sans que le droit à la liberté d’expression ne puisse constituer un obstacle ?

Oui, répond la Cour de cassation.

Au visa des articles 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article L1121-1 du Code du travail, la Cour de cassation répond de manière nuancée par la positive et rejette le pourvoi formé par le salarié.

En effet, les juges de la Haute Cour soulignent tout d’abord la fondamentalité du droit à la libre expression comme comprenant la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques.

A cet égard, les juges de la Cour de cassation dans leur communiqué de presse ont rappelé que « la chambre sociale de la Cour de cassation juge depuis de nombreuses années que, sauf abus, le salarié jouit de sa liberté d’expression dans l’entreprise et en dehors de celle-ci ».

Néanmoins, quand bien même ce droit est fondamental, il comporte certaines restrictions notamment quant à son exercice qui peut être soumis à certaines formalités légales « qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire ».

Autrement dit, la Cour de cassation pour répondre à la question précédemment posée, va opérer un contrôle de proportionnalité concernant le licenciement subi par l’animateur de télévision en raison de la nature litigieuse de ses propos, en vérifiant si l’ingérence manifeste de l’employeur dans l’exercice du droit à la liberté d’expression de son salarié, n’était pas nécessaire dans une société démocratique, « et pour ce faire, [en appréciant] la nécessité de la mesure au regard du but poursuivi, son adéquation et son caractère proportionné à cet objectif ».

Tout d’abord, elle tient particulièrement compte dans sa mise en balance des intérêts en présence, de la présence d’une clause dans le contrat de travail du salarié, selon laquelle ce dernier s’engageait à respecter l’ensemble des dispositions du cahier des missions et des charges de France 2, de la Charte des antennes de France Télévisions et les droits de la personne.

Or, les propos tenus par le salarié ont manifestement exposé une personne ou un groupe de personnes à la haine ou au mépris notamment pour des motifs fondés sur le sexe, et ce d’autant plus, en pleine actualité médiatique centrée autour du mouvement #metoo [1].

Par conséquent, la Cour de cassation a considéré que le licenciement du salarié poursuivait un but légitime de lutte contre les discriminations à raison du sexe et les violences domestiques et de protection de la réputation et des droits de l’employeur, et était à cet effet proportionné sans avoir porté aucune atteinte excessive à la liberté d’expression du salarié après la prise en compte de « l’impact potentiel des propos réitérés du salarié, reflétant une banalisation des violences à l’égard des femmes ».

Enfin, dans leur communiqué les juges de la Cour de cassation précisent et relativisent la portée de cette décision afin d’encadrer ses potentielles interprétations excessives et attentatoires à la liberté d’expression : « Par cette décision, la Cour de cassation ne juge pas qu’un humoriste n’a pas le droit de faire une telle « blague » à la télévision. En effet, la Cour de cassation se place ici dans le cadre du contrat de travail que l’intéressé avait signé pour exercer un métier d’animateur à la télévision : elle juge qu’au regard des clauses prévues dans le contrat de travail et des circonstances, concernant tant le salarié que l’employeur, qui ont entouré cette « blague », le licenciement ne constituait pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression du salarié ».

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https://www.village-justice.com/articles/blague-sexiste-animateur-television-cour-cassation-juge-licenciement-justifie,42462.html

Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)

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