Si l’employeur peut mettre fin de façon discrétionnaire à une période d’essai (sauf abus), une telle rupture n’est pas pour autant exempte de règles à respecter, qui sont autant de pièges potentiellement lourds de conséquences.

Focus sur les modalités de rupture.

 

  • Rupture de la période d’essai : quelles règles appliquer ?

Les dispositions légales excluent la période d’essai du champ d’application des règles relatives à la rupture du contrat à durée indéterminée.

En d’autres termes, durant la période d’essai, les parties peuvent rompre le contrat de travail sans être tenues, sauf dispositions conventionnelles contraires, aux obligations afférentes au licenciement.

L'intérêt pratique de ne pas considérer la rupture de la période d'essai comme un licenciement est donc de dispenser l'employeur d'avoir à énoncer les motifs de la rupture et d'avoir à respecter la procédure de licenciement.

De même, le salarié dont le contrat de travail est rompu pendant la période d’essai ne peut prétendre à aucune indemnité de licenciement ou de préavis, ni aux indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul.

Néanmoins, si la rupture de l’essai peut théoriquement avoir lieu sans motif ni procédure spécifique, elle reste soumise à certaines règles qu’il convient de respecter.

 

  • Rupture de la période d’essai : pour quel motif ?

L’employeur qui met fin à la période d’essai d’un salarié n’est pas tenu de motiver sa décision.

Toutefois, les principes généraux de la responsabilité civile demeurent applicables, de sorte que la liberté offerte à l’employeur de rompre la période d’essai ne doit pas dégénérer en abus de droit.

Ainsi, la rupture ne doit pas intervenir pour un motif :

  • Discriminatoire, les dispositions légales interdisant les discriminations étant applicables pendant la période d’essai ;
  • Abusif, tant s'agissant du motif que des circonstances de la rupture, notamment si elle est fondée sur un motif non inhérent à la personne du salarié (ex : motif économique) ou si le salarié n’a pas été mis en mesure de faire ses preuves.

 

  • Rupture de la période d’essai : quels délais respecter ?

Pour les contrats prévoyant une période d’essai d’au moins une semaine, les dispositions légales imposent le respect par l’employeur d’un délai de prévenance.

Il s’agit du délai dans lequel le salarié doit être informé de la rupture de sa période d’essai, et correspond au temps devant obligatoirement être laissé entre la notification de la décision et la date à laquelle la rupture prendra effet.

La durée de ce délai varie selon l’ancienneté du salarié :

-  24 heures en deçà de 8 jours de présence ;

-  48 heures entre 8 jours et un mois de présence ;

-  2 semaines après un mois de présence ;

-  un mois après 3 mois de présence.

A noter : certaines conventions collectives prévoient également un délai de prévenance. En cas de conflit entre la durée légale et conventionnelle, il convient de faire application du principe de faveur, et d’appliquer le délai le plus long.

Attention, l’application du délai de prévenance ne doit pas avoir pour effet de prolonger la période d’essai au-delà du terme normalement prévu.

Ces délais de prévenance obligent donc l’employeur à anticiper la rupture, dont le salarié doit être informé plusieurs jours, voire semaines, avant sa prise d’effet, en fonction de son ancienneté dans l’entreprise.

 

  • Rupture de la période d’essai : quelle forme adopter ?

La rupture de la période d'essai n'a en principe pas à respecter de condition de forme pour être valable, mais doit être expressément notifiée au salarié.

A noter : si l’employeur invoque une faute disciplinaire du salarié à l’origine de la rupture de la période d’essai, il sera tenu de respecter la procédure disciplinaire.

Pour des questions de preuve, il est recommandé de notifier la rupture de la période d’essai par écrit (lettre recommandée avec accusé de réception ou lettre remise en main propre contre décharge).

A noter : Sauf intention contraire des parties, la clause de non-concurrence s'applique lorsque la rupture du contrat intervient pendant la période d'essai. L’employeur devra donc penser à la levée aux termes de la notification le cas échéant.

 

  • Rupture de la période d’essai : quelles sanctions en cas de manquement ?

Les manquements aux règles entourant la rupture de la période d’essai peuvent être sanctionnés :

  • Non respect du délai de prévenance :

Lorsque le délai de prévenance n’a pas été respecté, le salarié a droit à une indemnité compensatrice égale au montant des salaires et avantages qu’il aurait perçus s’il avait travaillé jusqu’à l’expiration du délai de prévenance (indemnité compensatrice de congés payés comprise).

  • Notification tardive de la rupture :

La poursuite du travail par le salarié au-delà du terme de la période d’essai, même afin de respecter le délai de prévenance du fait d’une notification tardive de la rupture, rend le contrat définitif.

Il ne pourra dès lors être rompu à l’initiative de l’employeur que par un licenciement.

  • Rupture abusive ou discriminatoire :

La rupture de la période d’essai par l’employeur considérée comme abusive ou discriminatoire ouvre droit pour le salarié à des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

En revanche, le régime du licenciement étant exclu pendant la période d’essai, elle ne donne pas droit à l’indemnité pour licenciement abusif ou nul, ni à l’indemnité compensatrice de préavis.

 

Ainsi, l’employeur aura tout intérêt à se montrer vigilant quant au contexte, au délai et au contenu de la notification de la rupture de la période d’essai.