Le 26 novembre 2024, la Cour d'appel de PAU (RG n° 24/00782) a condamné la société CAP SOLEIL ENERGIE à remettre en état un mur sur lequel était installé l'onduleur d'une centrale photovoltaïque qu'elle a déposé suite à rétractation.
Une affaire surprenante, mais riche d'enseignements.
FAITS ET PROCEDURE
Suivant bon de commande du 27 novembre 2020, la société CAP SOLEIL ENERGIE a procédé à la pose et à l'installation de 12 panneaux photovoltaïques et d'un onduleur au domicile d'une personne vivant seule.
Les panneaux ont été rapidement posés, mais l'acquéreur s'est immédiatement rétracté (car dans le délai de 14 jours).
La société CAP SOLEIL ENERGIE a souhaité récupérer le matériel installé, sans succès malgré une mise en demeure.
Aussi, la société CAP SOLEIL ENERGIE a assigné sa cliente aux fins de la voir condamner sous astreinte à la laisser pénétrer dans son domicile, récupérer son matériel et remettre en état la toiture.
C'est naturellement que le tribunal de TARBES a satisfait à la demande de la société CAP SOLEIL ENERGIE et :
- enjoint à la cliente "de laisser la société Cap soleil pénétrer à son domicile afin de pouvoir récupérer l'ensemble de son matériel (panneaux photovoltaïques et onduleur) et de remettre en état la toiture, et ce sous astreinte",
- condamné la cliente à payer à la société CAP SOLEIL ENERGIE la somme de 1 500 euros au titre de ses frais d'avocat
La décision est de bon sens : si l'entreprise accepte d'annuler la vente, il est obligatoire de la laisser reprendre son matériel !
Aucun avocat ne peut conseiller l'inverse.
EN REVANCHE, cette décision était critiquable, car elle ne donnait que le droit pour la société CAP SOLEIL ENERGIE de reprendre son matériel et remettre la toiture en état, rien de plus...
Effectivement, qQuid des trous laissés dans le mur par les câbles et l'onduleur ?
La décision de justice n'en disait rien, si bien que la société CAP SOLEIL ENERGIE s'est contentée d'une remise en état de la toiture, rien de plus.
Or, une annulation implique une remise en état du domicile, comme au jour de la signature du bon de commande.
Ainsi, la cliente qui ne s'est finalement plus opposée à l'enlèvement du matériel, a fait appel de la décision, car incomplète faute d'avoir ordonné, outre la remise en état de la toiture, la remise en état des autres éléments de sa maison affectés par l'installation de la centrale photovoltaïque.
La cliente était dans son bon droit !
Effectivement si la société CAP SOLEIL ENERGIE est intervenue pour récupérer son matériel, il est apparu que :
- elle avait grossièrement rebouché au silicone blanc cinq trous dans un mur
- elle n'avait pas rebouché deux autres trous
- deux témoins ayant assisté à l'intervention de dépose, ont fait état de traces de remise en état très visibles au niveau du tableau électrique
- le bon d'intervention de la société CAP SOLEI ENERGIE, signé des parties, indique que la toiture a été remise en état, et que l'onduleur a été enlevé et les trous rebouchés au mastic blanc, et qu'il "manque joints et peinture".
Il résulte de ces éléments que les travaux de remise en état étant incorrects, la Cour d'appel de PAU a enjoint à la société CAP SOLEIL ENERGIE de procéder à la remise du mur en son état antérieur à l'installation de l'onduleur de la centrale photovoltaïque, sous astreinte.
QUE RETENIR DE CETTE AFFAIRE ?
1. Article 1187 du Code civil (relatif à la caducité)
Il dispose que :
"La caducité met fin au contrat"
Cela signifie que la caducité entraîne la disparition rétroactive des obligations du contrat. Chaque partie doit restituer ce qu’elle a reçu.
L'acquéreur devait laisser le vendeur reprendre son matériel.
2. Article L221-18 du Code de la consommation (pour le droit de rétractation des consommateurs)
Cet article s’applique aux contrats conclus à distance ou hors établissement et précise :
"Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, sans avoir à motiver sa décision."
Dans le cadre d'une rétractation valide, le vendeur est tenu de rembourser les sommes perçues et de rétablir la situation initiale.
3. Article 1352 et 1352-1 du Code civil(relatif aux restitutions et à leurs effets)
Lorsqu’un contrat est caduc, les restitutions doivent être effectuées en nature ou, si cela est impossible, en valeur.
"La restitution d'une prestation a lieu en nature ou, si cela est impossible, par équivalent."
"Celui qui restitue la chose répond des dégradations et détériorations qui en ont diminué la valeur, à moins qu'il ne soit de bonne foi et que celles-ci ne soient pas dues à sa faute."
Cela peut inclure la remise en état d’un bien, comme dans le cas d’une rétractation ayant conduit à des installations spécifiques (par exemple des panneaux solaires).
Ainsi, en l'espèce, la caducité du contrat de vente entraînait la remise en état des parties dans la situation où elles se trouvaient avant la signature du bon de commande et donc avant l'installation des dits panneaux photovoltaïques sur le toit du domicile de l'acquéreur, comprenant donc l'enlèvement des dits panneaux, de ses accessoires et la remise du domicile dans le même état qu'au jour de la signature du bon de commande.
Cependant, en deuxième lieu, si cette demande de remise en état est mal formulée par un juge, le vendeur risque d'opérer une lecture stricte de la décision et ne pas aller plus loin.
Et c'est ce qui s'est passé dans la présente affaire, le vendeur avait troué les murs du domicile de l'acquéreur et les avait rebouchés grossièrement, pour ne pas dire salement...
Mais était-il en tort ? sur le plan pratique, cela ne fait aucun doute, la conscience professionnelle était absente, mais sur le plan juridique, il était protégé par une décision de justice l'ayant uniquement condamné à remettre la toiture en état.
Aussi, le premier juge aurait dû condamner la venderesse à remettre le domicile dans le même état qu'au jour de la signature du bon de commande, en ce compris reboucher les trous résultant du passage des câbles et de la pose de l'onduleur, de manière à ne ce qu'ils soient pas apparents.
Nous veillons en général dans nos dossiers à être prudent dans la formulation de nos demandes, afin d'éviter ce type d'écueil.
Pour me contacter
Me Grégory ROULAND - avocat au Barreau de PARIS
Tél. : 0689490792
Mail : gregory.rouland@outlook.fr
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