Le 23 janvier 2025, la société CAP SOLEIL ENERGIE a été condamnée par le tribunal judiciaire de PERPIGNAN pour avoir refusé de remettre en état la toiture d'un de ses clients.
Ce jugement repose sur des principes juridiques solides en matière de nullité contractuelle et de responsabilité extracontractuelle et surtout du principe de réparation par équivalent.
I. LES FAITS
Un couple conclut avec la société CAP SOLEIL ENERGIE un contrat pour l’achat et l’installation de panneaux photovoltaïques, financé par un prêt souscrit auprès de la société COFIDIS.
Aussitôt après la pose, le couple a exercé son droit de rétractation (car encore dans les délais légaux) et la Mairie a indiqué que l'installation était illégale, ce qui a conduit à l'annulation amiable du contrat de vente et du prêt.
Cependant, la société CAP SOLEIL ENERGIE a refusé de procéder au démontage des panneaux installés, invoquant des difficultés techniques : « Nous sommes dans l’incapacité technique de récupérer le matériel installé à votre domicile car cela nécessiterait de casser le faîtage qui est bétonné »,
Le couple a alors fait chiffrer le coût de la désinstallation par une société tierce et a mis en demeure la société CAP SOLEIL ENERGIE de prendre en charge les frais de démontage, ce qu'elle a refusé !
Le couple a alors saisi le tribunal judiciaire pour obtenir le remboursement du coût estimé des travaux.
II. POSITION DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PERPIGNAN
Le tribunal applique de manière rigoureuse les articles 1104 et 1178 du Code civil.
Ces articles encadrent la bonne foi contractuelle et les conséquences de la nullité d'un contrat. En particulier, le rappel de la nécessité de « remettre les parties dans l’état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat », lequel est cohérent avec la jurisprudence en matière de restitution des prestations.
Le tribunal relève que la société CAP SOLEIL ENERGIE a reconnu sa responsabilité en proposant initialement de procéder à la désinstallation, mais son incapacité technique a entraîné un blocage dans la finalisation de la remise en état.
Le tribunal met alors en évidence le manque de diligence de la société, qui n'a pas pris les mesures nécessaires pour résoudre le problème, notamment en recourant à une entreprise tierce comme elle s'y étati engagée.
Cette absence d'action a justifié sa condamnation.
Aussi, le tribunal condamne la société CAP SOLEIL ENERGIE à verser au couple la somme de 13.758€, correspondant au devis fourni, assorti d'intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation, ce qui implique un surplus non négligeable !
Bien plus, la société CAP SOLEIL ENERGIE a dû rembourser les frais d'avocat et de procédure dépensés par le couple.
De fait, par sa carence et son refus d'assumer les effets de la nullité d'un contrat, la société CAP SOLEIL ENERGIE a dû payer plus de 17500€ à ses clients.
III. QUE RETENIR DE CETTE AFFAIRE ?
Ce jugement illustre le principe de la réparation par équivalent du préjudice.
Contrairement à la réparation en nature, qui vise à replacer la victime dans la situation initiale avant la survenance du dommage ou à lui fournir un équivalent de même qualité, les dommages-intérêts offrent une compensation d’ordre quantitatif.
C'est pourquoi on parle de réparation « par équivalent », car ils ne permettent pas de faire disparaître le dommage, mais d’octroyer une indemnisation financière censée en couvrir l’intégralité. Pour être qualifiée de réparation, la mesure ordonnée par le juge doit assurer une compensation complète du préjudice (ce qui est le cas dans la présente affaire), établissant ainsi une correspondance chiffrée avec ce dernier.
Bien que la réparation en nature soit souvent considérée comme la solution la plus appropriée, notamment en matière contractuelle puisqu’elle tend à annuler les effets du dommage, la réparation par équivalent demeure la plus couramment appliquée en pratique.
Evidemment, il n'est pas question de permettre à la victime de s'enrichir, si bien que les juges ne lui accordent pas davantage que ce qui leur est dû.
A ce propos, l'’évaluation du montant des dommages et intérêts peut être envisagée à deux moments :
- soit à la date de la naissance du droit à réparation, c’est-à-dire au jour de la survenance du dommage,
- soit en fonction de l’ampleur du préjudice constatée au jour du jugement qui établit la responsabilité.
Les tribunaux privilégient généralement cette seconde approche (comme le tribunal de PERPIGNAN, en l'espèce), car elle permet de prendre en considération l’évolution du préjudice dans le temps.
En particulier en matière contractuelle, cette méthode facilite la fixation des dommages et intérêts dits « moratoires ».
L’évaluation du préjudice au moment du jugement permet ainsi d’intégrer toutes les modifications intervenues entre la survenance du dommage et la décision du juge. C’est cette orientation qui est retenue par la jurisprudence, comme l’illustre un arrêt de la Cour de cassation du 24 juin 1998 (n° 96-18.534, publié au bulletin), précisant que si le droit à réparation existe dès la réalisation du dommage, son évaluation doit être effectuée au jour de la décision en tenant compte des éléments disponibles à cette date.
D'où le fait que le tribunal a assorti le montant du devis avec des intérêts au taux légal à compter de la date d’assignation. Cela permet d'indemniser le couple pour le retard dans l’exécution de la restitution, renforçant ainsi le caractère coercitif de la décision, car entre la date du devis et son exécution, le prix des matériels augmente.
IV. CONCLUSION
Ce jugement est un très beau cas d'école, car le tribunal a su apprécier l’ensemble des éléments factuels et juridiques en recherchant un équilibre entre les parties. Il sanctionne l’inertie de CAP SOLEIL ENERGIE sans pour autant aller au-delà du préjudice démontré par les demandeurs.
En conclusion, cette décision est bien motivée et repose sur des bases juridiques solides. Elle souligne l'importance pour les prestataires de services de respecter leurs obligations contractuelles et de faire preuve de diligence dans l'exécution des décisions judiciaires.
Me Grégory ROULAND - avocat au Barreau de PARIS
Tél. : 0689490792
Mail : gregory.rouland@outlook.fr
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