L’article 1583 du Code civil pose le principe selon lequel, la vente « est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ».

Il est néanmoins possible de conditionner la vente à une condition suspensive.

La condition est suspensive lorsqu’elle soumet la naissance même de l’obligation à la réalisation d’un événement futur et incertain (art. 1304, al. 2 du Code civil).

En matière de vente immobilière, il est fréquent de conditionner la vente à l’obtention d’un prêt bancaire, il s’agit de la condition suspensive d’obtention de prêt insérée classiquement dans la majorité des promesses synallagmatiques.

Ainsi, en cas de vente conclue sous condition suspensive, l’obligation produira ses effets qu’au moment de la survenance de l’événement érigé en condition ; tant que la condition est pendante, autrement dit, pas réalisée, l’obligation n’existe pas (encore).

Par voie de conséquence, en cas de non-réalisation de la condition, l’obligation sera considérée comme n’ayant jamais existé et permettra de libérer les parties de leurs engagements ou sanctionner leur inexécution par l’application de la clause pénale contractuellement prévue.

A contrario, en cas de réalisation de la condition suspensive, l’obligation devient pure et simple (art. 1304-6, al. 1er du Code civil).

En pratique, la condition suspensive de prêt tend à protéger l’acquéreur, dans l’hypothèse où il ne pourrait obtenir le prêt lui permettant de procéder à son acquisition ; son engagement serait caduc. Toutefois, pour éviter les dérives, le législateur a précisé qu’une condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement (art. 1304-3 du Code civil).

La jurisprudence est venue préciser les contours de la notion de condition suspensive d’obtention de prêt, en imposant notamment à l’acquéreur qui se prévaut d’un refus de prêt de prouver que sa demande était conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de vente (Civ. 1re, 9 févr. 1999, n° 97-10.195 ; Cass. civ. 3, 8 février 2012, n° 10-21.670 ; Cass. civ. 3, 30 janvier 2008)

Ainsi, il a pu être retenu que dans le cas où l’acquéreur demande un prêt pour une durée trop courte ou pour un taux trop bas, par rapport aux conditions stipulés dans la promesse, il ferait défaillir la condition par son fait et en perdrait donc le bénéfice. (Cass. civ. 3, 17 octobre 2019, n° 17-21.859)

Cette solution pourrait s’expliquer par le fait qu’en sollicitant une durée ou un taux inférieur à ce qui était prévu en condition, l’acquéreur augmenterait le risque de refus bancaire.

C’est dans ce contexte que l’arrêt rendu le 14 janvier 2021 par la Cour de cassation vient donc apporter une précision opportune : en l’espèce, l’acquéreur a sollicité un prêt d’un montant plus bas que celui stipulé à la promesse, qui lui a été accordé par la banque.

La Cour a considéré que le fait que l'acquéreur obtienne un crédit d'un montant inférieur au montant maximal stipulé suffit pour que la condition suspensive soit jugée remplie.

Cette solution s’inscrit dans la logique selon laquelle un acquéreur qui demande un montant inférieur à celui stipulé à la promesse, n’augmente pas le risque de défaillance de la condition.

La Cour de cassation met en exergue un point important, qu’il était utile de rappeler en l’espèce, le montant du prêt visé aux termes de la promesse, représentait le « maximum » du montant du prêt à obtenir pour bénéficier de la condition suspensive et non, le montant exact du prêt à solliciter.

En effet, l’acquéreur ne peut invoquer le bénéfice de la condition suspensive lorsqu’il sollicite un crédit pour un montant supérieur à celui prévu à la promesse (Cass. civ. 3, 16 janv. 2013, n° 11-26.557 ; Cass. 3e civ. 9-7-2020 n° 19-18.893).

L’arrêt rendu le 14 janvier 2021 apporte donc une seconde précision bienvenue : l’impossibilité du vendeur de se dédire en invoquant la caducité de la promesse au motif de la non-obtention du crédit ; en effet, le vendeur pourrait invoquer cette défaillance seulement une fois la date butoir de la promesse dépassée.

En définitive, si la promesse de vente prévoit une condition suspensive d’obtention d’un prêt pour un montant maximum, le prêt accordé pour un montant inférieur est parfaitement conforme et la condition est donc réalisée ; à condition, tout de même, que l’acquéreur puisse payer l’intégralité du prix et des frais de la vente.