ARRÊT DU TPICE (31 janvier 2008) - Aff T 95/06
Obtentions végétales, conditions de recevabilité d'un recours devant la chambre de recours de l'Office communautaire des variétés végétales, refus.
Federación de Cooperativas Agrarias de la Comunidad Valenciana/Office communautaire des variétés végétales (OCVV),
Pour une première décision rendue en la matière le TPICE "tape assez fort"!
Les faits
Le propriétaire des droits de la variété de mandarine « Nadorcott » a déposé une demande de protection communautaire de cette variété végétale auprès de l'Office communautaire des variétés végétales (OCVV). Celle-ci lui a été accordée.
La "Federación de Cooperativas Agrarias de la Comunidad Valenciana" (FECOAV), fédération regroupant les syndicats de coopératives agricoles des provinces d'Alicante, de Castellón et de Valence (Espagne), a formé un recours devant la chambre de recours de l'OCVV contre la décision d'octroi.
Le recours a été rejeté comme irrecevable en raison d'un défaut de qualité pour agir.
La FECOAV conteste cette décision auprès du Tribunal de première instance des Communautés européennes.
Elle considère notamment que l'OCVV a méconnu sa qualité pour agir, que la chambre de recours aurait dû lui notifier ses doutes et l'inviter à démontrer sa qualité pour agir et qu'elle aurait dû convoquer une deuxième audience afin de lui permettre la remise d'une documentation prouvant, selon elle, sa qualité pour agir.
Le recours du FECOAV est refusé.
Commentaire
Il s'agit de la première décision du Tribunal de première instance en matière d'obtentions végétales.
Assez importante pour être soulignée.
Un régime de protection communautaire des obtentions végétales, a été institué sur la base du règlement (CE) nº 2100/94 du Conseil, du 27 juillet 1994 (JO L 227, p. 1).
Il s'agit d'un régime spécifique permettant l'octroi de droits de propriété industrielle pour des variétés végétales, valable sur l'ensemble du territoire de la Communauté.
La mise en oeuvre et l'application de ce régime communautaire sont assurées par l'OCVV.
Cette agence décentralisée de la Communauté dispose d'une personnalité juridique propre et s'autofinance principalement sur base de taxes versées.
L'OCVV est opérationnel depuis le 27 avril 1995 et son siège est situé à Angers (France).
Le Tribunal constate que la FECOAV, ne figurant pas parmi les destinataires de la décision de l'OCVV, ne peut introduire de recours devant la chambre de recours que si elle est directement et individuellement concernée, conformément au règlement instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales.
Afin de déterminer la condition de l'affectation individuelle, le Tribunal applique les critères précédemment dégagés dans la jurisprudence, selon lesquels une personne autre que le destinataire d'une décision ne saurait prétendre être concernée individuellement que si cette décision l'atteint en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d'une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et l'individualise d'une manière analogue à celle dont le serait le destinataire de la décision.
Le Tribunal applique, plus particulièrement, sa jurisprudence selon laquelle une association professionnelle constituée pour la défense et pour la représentation des intérêts de ses membres peut introduire un recours en annulation devant le Tribunal si elle est individualisée en raison de l'atteinte à ses intérêts propres en tant qu'association, si elle représente les intérêts d'entreprises qui, elles-mêmes, seraient recevables à agir ou si elle possède une série de facultés à caractère procédural reconnues expressément par une disposition légale.
En l'espèce, le Tribunal constate que la FECOAV n'est pas elle-même atteinte individuellement en tant que producteur ou fournisseur de matériel végétal ou en tant que titulaire de droits subjectifs enregistrés à l'échelle nationale ou communautaire, bénéficiant d'une protection. Le Tribunal estime aussi que, conformément à ses statuts, la FECOAV peut représenter, devant la chambre de recours, les intérêts des syndicats de coopératives qui sont ses membres, mais qu'elle n'a pas démontré que ses membres seraient eux-mêmes individuellement atteints par la décision d'octroi, dès lors que ces syndicats n'ont vocation qu'à défendre les intérêts généraux de leurs propres membres, à savoir les coopératives agricoles.
Dans la mesure où la FECOAV se réfère aussi à l'affectation de producteurs individuels de mandarines, membres indirects de la requérante, le Tribunal relève que ses statuts n'indiquent pas qu'elle est habilitée à agir en justice pour défendre les intérêts de personnes autres que ses membres directs et que, en tout état de cause, elle n'a pas démontré que ces producteurs individuels seraient eux-mêmes individuellement affectés par la décision d'octroi.
Enfin, la requérante n'ayant pas participé à la procédure d'octroi de la protection, elle ne peut faire valoir aucun droit procédural y afférent qu'elle pourrait tendre à faire sauvegarder.
Par ailleurs, le Tribunal considère que le règlement instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales n'oblige la chambre de recours à notifier et à inviter à remédier à des irrégularités constatées que s'il est possible de remédier à celles-ci.
Considérant qu'il ne peut pas être remédié à un défaut de qualité pour agir, le Tribunal rejette le grief de la FECOAV.
Enfin, le Tribunal constate que le règlement instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales ne permet la tenue d'une seconde audience que lorsqu'elle s'avère nécessaire en raison d'une modification des faits pertinents s'étant produite pendant ou après l'audience.
Estimant que les preuves que voulait remettre la FECOAV pendant ou après l'audience ne réunissaient pas ces conditions, le Tribunal rejette aussi ce grief.
Partant, le Tribunal rejette le recours.
Si un pourvoi, limité aux questions de droit, peut être formé devant la Cour de justice des Communautés européennes contre la décision du Tribunal, dans les deux mois à compter de sa notification de la décision, cette question reste à suivre car les conditions d'admission des associations de représentation collectives semble très restrictives au regard des règles communément admises sur l'accés au juge...
En effet, dans la mesure où il semble exister de notables différences de lecture possible des règlements de procédure, il semble très restrictif de concevoir comme le TPICE semble l'avoir fait le droit a représentation des coopératives agricoles dans les recours contre les décisions en matière d'obtentions végétales...
A suivre
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