Cour de cassation, 3ème Civ. 1 avr. 2009

N° de pourvoi: 08-10070

On se souvient peut être des discussions "d'ascenseur", à propos de savoir s'il s'agissait d'une prison de verre pourvu de l'accent du midi ou d'une abration technique à la charge de l'imeuble?

Alors que je me préparais au sacrifice de l'escargot qui, lui aussi monte et descend entre les places de mon village, la jurisprudence du 1er avril est arrivée.

Madame est tombée de la machine infernale dont on ignore si elle était douée de la parole, ou s'il a refusé de parler...

Elle a assigné la bailleresse, propriétaire de l'immeuble, en réparation de son préjudice.

Cette dernière a appelé en garantie la société Otis, chargée d'un contrat de maintenance et d'entretien complet de l'ascenseur.

Pour débouter la société Mon Logis de son appel en garantie dirigé contre la société Otis, l'arrêt retient qu'aucune pièce n'est produite démontrant antérieurement à l'accident des doléances du bailleur concernant une mauvaise exécution de ses obligations de maintenance et d'entretien par la société Otis.

Mais sur qui pèse la charge de la preuve?

Quelle est la nature de l'obligation de la société en charge de la maintenance?

Réponse claire: "celui qui est chargé d'entretenir et de réparer un ascenseur au titre d'un contrat d'entretien est tenu à une obligation de résultat ; qu'en ayant retenu qu'il n'était tenu qu'à une obligation de moyens, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil".

E t ce n'est pas un poisson!

La portée de cette décision est considérable tant le nombre de cas visés est important.

Il faut relever que le témoignage de tous les ascenseurs n'aétant pas possible, car ils n'ont pas tous la faculté de parole, la décision est de bon sens: il faut bien un responsable!

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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Reims, 24 octobre 2007), que Mme X..., locataire de la société Mon Logis, a fait une chute en raison d'une différence de plusieurs centimètres entre le niveau d'arrêt de la porte d'entrée de l'ascenseur qu'elle s'apprêtait à emprunter et celui du rez-de-chaussée ; qu'elle a assigné la bailleresse, propriétaire de l'immeuble, en réparation de son préjudice ; que cette dernière a appelé en garantie la société Otis, chargée d'un contrat de maintenance et d'entretien complet de l'ascenseur ;

Attendu que la société Mon Logis fait grief à l'arrêt de la condamner à réparer le préjudice de la locataire alors, selon le moyen, que le bailleur n'est tenu qu'à une obligation de sécurité de moyen envers le locataire ; qu'en faisant peser sur le bailleur une obligation de résultat, et en se dispensant de rechercher, pour retenir sa responsabilité, si ce dernier avait commis une faute dans l'exécution de ses obligations, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'il est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l'usage, quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail ; qu'ayant retenu, à bon droit, que la victime n'avait pas à prouver que le bailleur n'avait pas fait le nécessaire pour l'entretien de l'ascenseur mais à démontrer que l'appareil présentait un dysfonctionnement à l'origine de son préjudice, la cour d'appel, qui a constaté que la chute de Mme X... résultait de l'existence d'un décalage entre le seuil de l'ascenseur et celui de l'entrée, et relevé qu'aucune faute exonératoire de responsabilité ne pouvait être imputée à la locataire, en a exactement déduit que la bailleresse était tenue de garantir celle-ci de son préjudice et a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Mais, sur le second moyen :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu que pour débouter la société Mon Logis de son appel en garantie dirigé contre la société Otis, l'arrêt retient qu'aucune pièce n'est produite démontrant antérieurement à l'accident des doléances du bailleur concernant une mauvaise exécution de ses obligations de maintenance et d'entretien par la société Otis, que la dernière intervention de celle-ci, avant l'accident de Mme X..., concernait un problème de contact en haut de gaine qui avait immobilisé la cabine et qui constituait une anomalie sans aucun lien avec l'existence d'un éventuel dénivelé de l'ascenseur, dû pour sa part, à un glissement de l'aimant d'arrêt du rez-de-chaussée d'environ 6 cm vers le bas, que l'accident n'a donné lieu à aucune investigation contradictoire, les allégations de la société Mon Logis, non étayées par un technicien, tendant à considérer le dénivelé litigieux comme en relation directe avec l'intervention en raison de sa manifestation quelques jours après, ne présentent aucune valeur probante, que bien que le dénivelé ait été constaté par d'autres usagers de l'ascenseur, la société Mon Logis ne justifie en aucune façon avoir alerté la société Otis, avant que ne survienne l'accident de Mme X..., que faute de rapporter la preuve d'une carence fautive de la société Otis, cette dernière doit être mise hors de cause ;

Qu'en statuant ainsi, alors que celui qui est chargé de la maintenance et de l'entretien complet d'un ascenseur est tenu d'une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité, la cour d'appel, qui n'a pas relevé que le dysfonctionnement de l'ascenseur était dû à une cause extérieure à l'appareil, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il a mis la société Otis hors de cause, l'arrêt rendu le 24 octobre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la société Otis et la société Mon Logis, ensemble, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mon Logis à payer à Mme X... la somme de 2 300 euros, condamne la société Otis à payer à la société Mon Logis la somme de 2 500 euros, rejette la demande de la société Otis ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier avril deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Blanc, avocat aux Conseils pour la société Mon Logis.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST REPROCHE à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Mon Logis à payer à sa locataire Mme Simone X... la somme de 12 843,37 euros en réparation des préjudices résultant de la chute faite par cette dernière dans l'ascenseur de l'immeuble dans lequel elle louait un appartement ;

AUX MOTIFS QUE la société Mon Logis était tenue envers sa locataire d'une obligation de résultat ; que la victime n'avait pas à prouver que le bailleur n'avait pas fait le nécessaire pour l'entretien de l'ascenseur ; qu'aucune faute exonératoire ne pouvait être relevée à l'encontre de la victime ;

ALORS QUE le bailleur n'est tenu qu'à une obligation de sécurité de moyen envers le locataire ; qu'en faisant peser sur le bailleur une obligation de résultat, et en se dispensant de rechercher, pour retenir sa responsabilité, si ce dernier avait commis une faute dans l'exécution de ses obligations, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION (Subsidiaire)

IL EST REPROCHE à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Mon logis de son appel en garantie contre la société Otis ;

AUX MOTIFS QUE l'obligation d'entretenir et de maintenir en état l'ascenseur doit être de résultat quand la technique est simple et éprouvée et lorsqu'elle touche à des organes vitaux d'un appareil ou dans le cadre d'une réparation considérée comme défectueuse ; que par contre, lorsqu'existe quelque aléa, s'agissant de mécanismes complexes, fragiles et délicats, utilisés par des usagers nombreux et divers, soumis à des manipulations intempestives souvent ignorées, l'obligation ne pouvait être que de moyens ; qu'aucune pièce n'était produite aux débats démontrant antérieurement à l'accident des doléances du bailleur concernant une mauvaise exécution de ses obligations de maintenance et d'entretien par la société Otis ; que la dernière intervention de la société Otis avant l'accident de Madame X... datait du 12 novembre 2002 et concernait un problème sans rapport avec le dénivelé à l'origine de l'accident ; que bien que le dénivelé ait été constaté par d'autres usagers, notamment le 15 novembre par Mme Z... et Mme A..., la société Mon Logis ne justifiait aucun aucune façon avoir alerté la société Otis avant que ne survienne l'accident de Mme X... ; que l'un des locataires indiquait qu'il avait appelé luimême la société Otis, soit postérieurement à l'accident ; qu'à défaut de preuve d'une carence fautive, elle devait être mise hors de cause ;

ALORS QUE celui qui est chargé d'entretenir et de réparer un ascenseur au titre d'un contrat d'entretien est tenu à une obligation de résultat ; qu'en ayant retenu qu'il n'était tenu qu'à une obligation de moyens, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.