La vie de palais m'a séduite, en pré stage, en stage, dès mon arrivée à Dunkerque, et encore tous les jours.

Celle où le Président explique sa juris prudence à l'audience de rentrée, où le Procureur exerce son métier avec loyauté et talent.

Celle où le greffier explique, facilite, ou le magistrat est volontier sur l'échange de pratiques.

Celle dans lasquelle les rapports sont unis par la robe, la foi du palais, le respect mutuel absolu.

Celle qui fait grandir de part la pratique d'une dialectique si particulière qui est celle de l'acte d'une justice vivante, qui passe.

Trois mots échangés après une audience, un sourire de son confrère, un mot de son aîné, de son bâtonnier, de son cadet et on retrouve l'énergie d'avancer en regardant vers le haut.

Je jure comme avocat...

Calviniste ou Zwinglien avait demandé "p'tit chouisse"...

Sérieusement, le journal "Réforme" pointe sur le rapport du contrôleur des lieux de privation de liberté... "Peu d'activité en détention"...

Si, non...?

Et comment récompense - t - on les détenus qui cherchent du travail, et qui s'amendent et qui jouent le jeu d'un projet de sortie?

Bref...

L'esprit des lois me fascine: la résistance à la force, aux arguments d'autorité, l'amour de l'intelligence, de l'écoute de l'autre:

« C'est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser (...) Pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. (1) », cela me rend confiant.

Cette justice là est compatible avec la chasse au gaspi du grand père tranquille, elle est compatible avec la rationalité du pater famillias, mais est-elle compatible avec la 25 ème heure qui n'est toujours pas là et le temps qui passe sans que l'on puisse l'en empêcher?

La modernité n'est pas incompatible avec l'esprit des lois.

Comme le disait le Président du Tribunal de Grande Instance de DUNKERQUE dans son discours de rentrée, c'est la formule "le juge doit" qui dérange...

Merci Monsieur le Président d'avoir ouvert une fenêtre au débat et à la raison face à la dangerosité de ceux que je vais qualifier de "speedés" de la décision rendue et le la croix cochée.

Comme disait mon professeur d'équitation, à l'abord de l'obstacle "il ne faut pas confondre vitesse et précipitation"...

Voyez, au hasard, le RPVA, Paris n'y est pas, Marseille non plus...

Mais quand même, lorsque l'on sait que les logiciels du RPVJ comme Cassiopée peuvent être paramétrés simplement pour contenir huissiers, avocats et autres, il suffit d'un cable entre deux machines localisées physiquement à l'intéroieur du tribunal, de clés usb avec un cryptage correspondant à une identité d'auxilliare de justice, d'autoriser les crpyptologies fortes pour les auxilliaires de justice pour permettre en temps réeel et gratuitement de passer progressivement d'un monde à l'autre et de se connecter à son compte depuis l'étranger sans avoir à déclarer ses codes à la police...

Allez, avec un abonement... par ordre!

Nettement moins juteux, pourtant, plus conforme à l'esprit d'égalité sous la robe que l'on doit reconnaitre à nos chers parisiens et à nos chers marseillais aussi!

Là!

Un référent "bonne pratiques" à chaque étape, et hop!

La bonne vieille méthode Merise, et la gratuité du processus d'accés au service public.

Comme au Tribunal adminsitratif...

Mon amie et celle qui m'a transmis une certaine flamme au cours de sa leçon en 24 heures, Mme Maryse DEGUERGUE, Professeur à l'Université Paris I, à parfaitement décrit les dysfonctionnements du service public de la justice.

Elle sera étonnée que je revienne dans la sphére du "droit" public... et pourtant!

Le service public n'est pas toujours compatible avec la comptabilité et la statistique qui doivent rester derrière le service...

Le magistrat devrait s'appuyer sur un intendant dont la fonction est de compter pour mieux exercer leur métier qui est de juger et peut être un jour d'encadrer l'acte de juger par les "intermitents" issus du processus de déjudiciarisation...

Sans parler des recrutements directs qui sont une bonne chose de mon point de vue...

La justice rapide, économique, moderne, qui se passe de magistrats est un leure!

L'avocat aussi est un aiguillon aussi dépourvu de pouvoirs que nécessaire: "virba volent"...

Si le parquet est enclos à sa place par la règle qui l'enserre, l'avocat est libre comme sa parole, c'est du moins ce que Damien enseigne...

Aujourd'hui, comme disait le Grand Coluche, "il y a des jours ou il vaut mieux la fermer avant de l'ouvrir"!

La force brute est là, écume aux lèvres, gourdin à la main!

Je possède la science donc... je vais régner en ne partageant pas la flamme!

Vous connaissez l'histoire de "pourquoi j'ai mangé mon père"?

La course, le temps, les économies, le progrès qui peut servir à tenter de confisquer un savoir pourtant dans le domaine public...

Éternelle escroquerie scientiste ou prenant la science pour prétexte.

Au sein même des procès les plus inquisitoriaux comme la controverse de Valliadolid, des puissants comme le grand Charles Quint ont laissé des voix "autorisées" accéder aux desseins de l'Etat et donner la contradiction sur l'humanité des indigènes. (2)

Désormais un laconique "procédure en enquête" au bas d'un pv laisse le plaignant et son conseil "aux bon soins" d'un système qui ne connaît plus la saisine directe du doyen des juges d'instruction...

Cela va beaucoup plus vite!

Certes...

Plus de demandes d'actes, plus à répondre...

L'avocat se transforme en super détective qui feinte les enquêteurs eux mêmes...

Arrêtez le film!

Stop!

Revenez aux audiences ordinaires: cinq secondes... Bon, Maître, allons...

L'avocat de Monsieur tout le monde n'aura jamais, en l'état de la procédure, les mêmes moyens que le Procureur de la République (au hasard) ...

D'autant que statistiquement pour le coup il y a beaucoup plus d'enquêteurs que d'avocats, alors pour assister aux gardes à vues, et aux auditions en enquête préliminaire, il va falloir que les confrères aient beaucoup de temps...

Ces procédures n'autorisent pas toujours l'égalité des armes... entre les uns et les autres surtout depuis la jurisprudence de la Cour Européenne sur l'indépendance du parquet... (3)

Si comme le dit mon maître es pataphysique du solide, "la magistrature assise ment debout" (4), les photos récentes montrent la vigueur de ce corps qui résiste "assis, debout, mais pas couché!"

Il faut aller vite, fort, mais surtout vite...

Cronos chercherait à dévorer son fils Zeus?

Pas possible!

D'ailleurs, la contre réforme est déjà en marche, le ministère change de méthodes, revient aux fondamentaux...

Des hommes sont morts pour acquérir des libertés que nous bradons car nous ne les voyons plus!

Le temps et la justice, l'esprit des réformes sont les deux thèmes que je souhaitais introduire dans ce billet pour prolonger une conversation "de palais", presque amicale, profonde, comme un apport à une pensée commune forgée par l'apprentissage et la pratique qui fait que paradoxalement nous n'avons pas le temps d'approfondir.

Alors voilà, pour traiter du temps et de la justice, j'ai décidé d'offrir la pensée de l'une de mes premières initiatrices au droit civil, Mme le Professeur Horatia Muir Watt.

Le Professeur Bismuth et le professeur Ancel ont perfectionné en burinant les étudiants que nous étions sur les bases de cette matière façonnée par Mme MUIR WATT.

Elle dit aujourd'hui que l'on doit se poser les bonnes questions au regard des notions de temps, d'économie et de justice, l'étude en droit comparé de la déjudiciarisation est édifiante: "En elle-même, la notion d'économie de la justice n'appelle pas d'explications approfondies, qui seraient redondantes en ces lieux et déplacées de ma part. Pour reprendre les termes de Loïc Cadiet[1], elle implique une analyse de la rentabilité interne de l'institution judiciaire, qui inclut par exemple celle du rapport coût-avantages de la régulation judiciaire par rapport aux modes alternatifs de règlement des litiges. Elle traduit très clairement un souci d'intendance et emprunte un vocabulaire managérial. De façon souvent péjorative, on relève que le justiciable devient "un client" et l'institution judiciaire "un fournisseur ». En France, on n'aime pas parler de la justice en termes de rentabilité ou de coût. Et il est vrai que sous sa forme actuelle, le débat trouve son origine aux États-Unis dans le sillage de l'analyse économique du droit en général, qui tentait de répondre au problème de la surcharge des juridictions fédérales, elle-même directement corrélée à l'accroissement de l'activité législative - et donc du contentieux - dans les années 1970. Posner s'attaque au problème du coût de la justice et lance un débat important sur le service judiciaire comme bien public ou privé."

La fascination pour le temps du procès obsède le législateur, la réduction serait un gage d'efficacité du système...

Il est des Républiques bannières dans lesquelles, effectivement le procès ne coûte pas cher...

Le Professeur Soraya Amrani Mekki a écrit un ouvrage sur le temps et le procès civil.

Une "hiérarchie devra être faite entre les affaires" pour "assurer la rentabilité" du service public de la justice...

C'est la raison principale de la concurrence entre les maisons de la justice et du droit et le tribunaux...

Les questions posées sur les pancartes de la manifestation d'hier expriment clairement les inquiétudes des professionnels et demandent des réponses rapides et concrètes.

J'entends certains esprit chagrins murmurer que mieux que pour la tolérance il existe désormais des maisons pour la justice, mais plus ou moins grandes en fonction de la hiérarchie des dossiers!

Restons sérieux: mais qui arbitrera de l'importance des dossiers et de l'orientation?

Le juge ou l'actuaire?

(1) Montesquieu, De l'esprit des lois, L. XI Ch IV.

(2) (humanité qui du reste est restée contestée par les plus grands esprits des lumières comme MONTESQUIEU...)

(3) Voir sur ce point l'analyse de M. J. - P. Dinthillac pour la Cour de Cassation

(4) Joel Martin, Manuel de Contrepet, Albin Michel, 1986, p. 101

(5) S. Amrani Mekki, conférence des bâtonniers, avr. 2008 p. 9