Jurisprudence - CAA Versailles, 20 mars 2025, req. n° 22VE02067

Le 22 octobre 2018, une commune a attribué à une société un marché public de restauration scolaire, lequel a été annulé par décision de justice. Pour réparer les conséquences de cette annulation, les parties ont, le 26 décembre 2019, conclu un protocole transactionnel par lequel la commune s'engageait à verser à la société une indemnité forfaitaire de 249 000 euros.

Par un arrêt rendu le 20 mars 2025, la cour administrative d'appel de Versailles, suivant le raisonnement adopté par le juge de première instance (TA Versailles, 13 juin 2022, req. n° 2002376), considère que l'objet de ce protocole transactionnel est illicite.

En effet :

  • d'une part, il prévoit une indemnité correspondant à la quasi-totalité de la rémunération fixée par le marché alors que celui-ci, ayant été annulé, est réputé n'avoir jamais existé et n'a pas pu faire naître d'obligation contractuelle à la charge de la commune ;
  • d'autre part, il méconnaît l'autorité de la chose jugée résultant du jugement annulant le marché.

Le protocole transactionnel comporte donc une libéralité consentie par une collectivité publique, ce qui, d'ordre public, est prohibé (CE, sect., 19 mars 1971, Mergui, req. n° 79962).

La cour considère que le juge de première instance a, à bon droit, annulé ce protocole.

 

Considérant de principe : 

"12. Il résulte de l'instruction que, par le protocole transactionnel litigieux, la commune de Chilly-Mazarin s'est engagée à verser à la société Elres la quasi-totalité de sa rémunération fixée par le marché annulé par le jugement précité du 29 mars 2019 ou résultant de sa facturation hors marché. Toutefois, le marché du 22 octobre 2018 ayant été annulé et, par suite, étant réputé n'avoir jamais existé, n'a pu faire naître aucune obligation contractuelle à la charge de la commune. Ainsi, la transaction visant en réalité à donner son plein effet à un marché résolu en assurant au cocontractant le versement de la quasi-totalité de la rémunération stipulée par ce marché, a un objet illicite et méconnaît l'autorité absolue de chose jugée résultant du jugement précité. En outre, il n'est nullement établi que l'indemnité transactionnelle résultant du protocole litigieux correspond aux dépenses utiles exposées par la société Elres qui comprennent, à l'exclusion de toute marge bénéficiaire, les dépenses qui ont été directement engagées par le cocontractant pour la réalisation des prestations destinées à l'administration. Il n'est pas davantage établi qu'elle correspondrait au préjudice subi par la société Elres à raison de fautes commises par la commune de Chilly-Mazarin. Ainsi, le protocole litigieux comporte une libéralité. En l'absence de tout contrat, la société Elres ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance par la commune du principe de loyauté des relations contractuelles."