Cass. 1e civ., 25 septembre 2024, n° 23-14.777

LES FAITS

Par acte authentique du 19 juillet 1990, une dame âgée a consenti un pacte de préférence à durée indéterminée à un couple portant sur des terrains non bâtis.

En mai 2011, la promettante écrit un courrier aux bénéficiaires leur notifiant son intention de vendre aux conditions stipulées au pacte (en viager et à un prix très bas au regard du marché).

En juillet 2011, les bénéficiaires indiquent à la promettante leur intention d'exercer leur droit de préférence afin d'acquérir.

En septembre 2011, coup de théâtre : lors d'un rendez-vous chez le notaire, un monsieur disant intervenir pour le compte de la dame âgée, a indiqué que cette dernière ne signerait pas l'acte authentique invoquant, après l'acceptation des bénéficiaires, la résiliation du pacte de préférence. Ce monsieur était en fait le légataire universel de la dame.

Suite au décès de la promettante en novembre 2012, un long contentieux en vente judiciaire forcée des biens va suivre.

LA DÉCISION

La Cour d'appel d'Aix-en-Provence (7 mars 2023, RG n° 19/12704) va d'abord juger, au regard du pacte de 1990 qui constitue la loi des parties, que l'article 1210 du Code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, édictant que les engagements perpétuels sont prohibés n'est pas applicable à la présente affaire, l'article 9 de ce texte prévoyant que les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent régis par la loi ancienne.

En effet, la jurisprudence antérieure considérait que le pacte de préférence qui confère un droit imprescriptible échappe en raison de sa nature à la prohibition des engagements perpétuels (par ex. CA Aix-en-Provence, 22 octobre 2019, n° 18/00539).

Il ne pouvait donc être fait droit à la demande de résiliation du pacte de préférence invoquée par le légataire universel.

Conséquence pour les parties au litige : il y avait accord sur la chose et sur le prix et une vente parfaite dès la réception du courrier des bénéficiaires manifestant leur volonté d'exercer leur droit de préférence aux charges et conditions leur ayant été notifiées. A la date du décès de la promettante, le bien ne se trouvait dès lors plus dans son patrimoine.

La Cour de cassation rejette ainsi le pourvoi du légataire universel en ces termes :
"Les engagements perpétuels ne sont pas sanctionnés par la nullité du contrat mais chaque contractant peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable.
Il en résulte qu'en l'absence de résiliation du pacte de préférence, M. et Mme [U] pouvaient exercer leur droit de préférence.
"

_________________________
Une question ? Mon cabinet est à votre disposition :
Me Jonathan Quiroga-Galdo, Avocat à la Cour
07 83 46 63 63 - jqg@jqg-avocat.fr - www.jqg-avocat.fr