Rétention – Main levée de la 4e prolongation de la rétention pour défaut de diligences

Mots clés : JLD – rétention - prolongation – diligence – Préfecture - laissez-passer - bref délai

Dans une décision du 17 juin 2024, un retenu placé au centre de rétention de Paris (CRA Vincennes) depuis le mois de juin a obtenu la main-levée de la prolongation de son maintien en rétention lors de la 4e prolongation pour défaut de diligences de l’administration (Préfecture).

Retour rapide sur la décision positive

Dans une Ordonnance du 17 juin 2024, la Cour d’appel de Paris a infirmé l’ordonnance du Juge des Libertés et de la détention (JLD) du 14 juin 2024 ordonnant la prolongation du maintien de l’intéressé dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 15 jours supplémentaires lors de sa 4e prolongation (Cour d'appel de Paris, Chambre 1-11, 17 juin 2024, 24/02727).

Les motifs adoptés par la Cour d’appel sont les suivants :

« Il convient de considérer que c'est à tort que le premier juge a statué sur les moyens tirés du défaut de diligences de l'administration et de l'absence de perspectives d'éloignement à bref délai ainsi que de la violation des dispositions de l'article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pris dans leur ensemble, soulevés devant lui et reprise devant la Cour et a ordonné la quatrième prolongation de la rétention de M. [U] [Y] pour une durée de quinze jours alors que la procédure établit que, parallèlement à la saisine des autorités consulaires libyennes, les autorités consulaires égyptiennes ont été saisies le 3 avril 2024 aux fins d'identification et de délivrance d'un laissez-passer consulaire, qu'à la suite de l'audition de l'intéressé, par courrier en date du 6 juin 2024 le consulat général d’Egypte a indiqué que, faute de papier d'identité, il n’était pas en mesure de délivrer la feuille de route pour un retour en Egypte et qu'il avait transmis la fiche de renseignements de l’intéressé aux autorités compétentes au Caire pour vérification de la nationalité égyptienne. Toutefois, il apparaît que malgré une relance, l'administration na été destinataire daucune information quant à lavancée de la procédure d'identification ce dont il se déduit que lautorité administrative ne démontre pas que la délivrance du laissez-passser consulaire doit intervenir à bref délai. Par ailleurs, s'agissant de la menace pour l'ordre public, il y a lieu d'indiquer que cette notion fait l’objet d’une appréciation in concreto au regard d’un faisceau d'indices permettant ou non d'établir la réalité des faits, la gravité, la récurrence ou la réitération et l'actualité de la menace selon le comportement de l'intéressé et, le cas échéant, sa volonté d'insertion ou de réhabilitation.

Dans le cadre adopté par le législateur, la notion de menace à l’ordre public a pour objectif manifeste de prévenir, pour l’avenir, les agissements dangereux commis par des personnes en situation irrégulière sur le territoire national, ce dont il résulte que la commission d'une infraction pénale n’est donc pas de nature, à elle seule, à établir que le comportement de l’intéressé présenterait une menace pour l'ordre public mais que l'appréciation de cette menace doit prendre en considération les risques objectifs que l'étranger en situation irrégulière fait peser sur l'ordre public. Il en résulte qu’en l’espèce l'élément retenu par le premier juge pour considérer que le comportement de M. [U] [Y] constitue une menace pour l’ordre public, à savoir un unique signalement pour agression sexuelle le 23 juillet 2023 est à lui seul insuffisant pour caractériser une telle menace d'autant que la procédure ne contient aucune information complémentaire concernant ce signalement notamment la plainte, les auditions de la victime et du mis en cause... Dès lors, les conditions posées par les dispositions de l'article L. 742-5 précité ne sont pas réunies pour permettre la prolongation de la rétention de l’intéressé. En conséquence, l'ordonnance querellée doit être infirmée et la requête du préfet rejetée ».

 

Référence de la décision : Cour d'appel de Paris, Chambre 1-11, 17 juin 2024, 24/02727

Pour lire la décision en ligne : https://www.courdecassation.fr/decision/66712327fa9d5900088bef44