Démarchés à leur domicile, des particuliers signent des bons de commandes de vente de panneaux photovoltaiques, ballon thermodynamique, isolation, etc.... pour des montants dépassant couramment les 20.000 euros. Parallèlement, les mêmes commerciaux font signer des contrats de crédit affecté, indiquant que la production d'énergie amortira le crédit.
Bien sûr, tout cela n'est que tromperie, le bon de commande étant réalisé sans aucun audit énergétique préalable de l'habitation concernée.
Après quelques mois, le consommateur se retrouve engagé par un contrat de crédit onéreux, alors que la production des panneaux ne couvre qu'une faible partie du crédit. Pire encore, l'entreprise se contente le plus souvent d'installer les panneaux, sans autorisation d'urbanisme, sans consuel, sans DACT, sans assurance décennale, et sans établir le contrat de revente. Enfin, classiquement, la société est rapidement mise en liquidation judiciaire, ce qui interdit toute régularisation possible de la situation des consommateurs désemparés.
En droit, les consommateurs floués peuvent agir en sollicitant la nullité de tels bons de commande, et donc du crédit affecté.
Pour tenter de s'opposer à cette nullité, certains établissements de crédit ont soutenu que le défaut de déclaration de créance faite par le consommateur malheureux auprès du liquidateur judiciaire de l'entreprise liquidée , empêcherait le consommateur d'agir en justice contre l'établissement de crédit affecté.
Notre Cabinet soutient depuis des années que cet argument n'a aucun sens, par une simple lecture de l'article L622-21 I du Code de Commerce qui dispose que la liquidation judiciaire d'une société autorise les actions en annulation des bons de commande irréguliers engageant la société liquidtée.
La Cour d'appel de PARIS a pourtant retenu l'argument des établissements de crédit, à notre plus grande consternation.
Il aura donc fallu l'intervention de la Cour de Cassation au terme de deux arrêts ; notamment Chambre commerciale, 7 octobre 2020, 19-12.640 :
"1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 novembre 2018), le 21 février 2013, M. H... a commandé à la société Ouest alliance la fourniture et l'installation sur sa maison de panneaux photovoltaïques et d'une éolienne. Le même jour, la société Banque Solfea, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal finance (la banque), a accordé à M. H... et à Mme X..., épouse H..., un prêt destiné à en financer l'installation. 2. Le 24 septembre 2013, la société Ouest alliance a été mise en liquidation judiciaire, M. U... étant désigné liquidateur. 3. Les 20 et 21 avril 2015, M. et Mme H..., invoquant l'absence de raccordement de l'installation au réseau électrique, ont assigné le liquidateur et la banque devant un tribunal d'instance en demandant la résolution pour inexécution, et l'annulation, du contrat de vente et du contrat de prêt. 4. M. et Mme H... font grief à l'arrêt de les déclarer irrecevables à agir en application de l'article 122 du code de procédure civile contre le liquidateur et, en application de l'article L. 311-32 du code de la consommation, contre la banque, alors « que le jugement d'ouverture d'une procédure collective interdit toute action en justice de la part des créanciers tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent, ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent ; que les actions en nullité du contrat ou en résolution pour inexécution d'une obligation de faire sont autorisées ; que M. et Mme H... demandaient à titre principal la nullité du contrat de prestation conclu avec la société Ouest Alliance pour violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation, et à titre subsidiaire sa résolution pour violation d'une obligation de faire ; qu'en estimant cette action soumise à l'arrêt des poursuites, la cour d'appel a violé l'article L. 622-21 du code de commerce. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 622-21, I, du code de commerce : 5. Selon ce texte, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant : 1° à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; 2° à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent. 6. Pour déclarer les emprunteurs irrecevables à agir contre le liquidateur du vendeur et contre la banque, l'arrêt retient que les demandes d'annulation et de résolution formées par M. et Mme H... à l'encontre du vendeur affecteront nécessairement le passif de la liquidation judiciaire et constituent une action prohibée, sauf à ce qu'il soit justifié d'une déclaration de créance et que, tel n'étant pas le cas, leur irrecevabilité à agir contre le vendeur leur interdit , en application de l'article L. 311-32 du code de la consommation, d'agir également contre le prêteur. 7. En statuant ainsi, alors que les emprunteurs fondaient leur demande d'annulation du contrat de vente sur la violation de l'article L. 121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, et leur demande subsidiaire de résolution sur l'inexécution de prestations, sans demander de condamnation du vendeur au paiement d'une somme d'argent ni invoquer le défaut de paiement d'une telle somme, ni même réclamer la restitution du prix de vente, de sorte que leurs demandes ne se heurtaient pas à l'interdiction des poursuites, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;" Nous pouvons donc espérer que cet argument soit définitivement abandonné par les établissements de crédit.
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