Peut-on licencier un salarié en arrêt maladie prolongée ?

L'article L1132-1 du code du travail prévoit :"Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français."

Un licenciement intervenu en raison de l'état de santé du salarié est discriminatoire au sens de l'article L1235-3-1 du code du travail.

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006072050/LEGISCTA000006189445?init=true&page=1&query=L1235-3-1+du+code+du+travail&searchField=ALL&tab_selection=all&anchor=LEGIARTI000036762026#LEGIARTI000036762026

Le juge peut alors prononcer la nullité du licenciement et condamner l'employeur à payer au salarié des dommages et intérêts dont le montant varie en fonction de l'ancienneté du salarié et de son salaire brut, sans pouvoir être inférieurs aux salaires des 6 derniers mois.

Dans un arrêt récent rendu le 10 mars 2021, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a rappelé que "lorsque l'absence prolongée du salarié en raison d'un accident du travail résulte du comportement de l'employeur, ses conséquences sur le fonctionnement de l'entreprise ne peuvent être invoquées pour justifier un licenciement, que celui-ci est donc nul en application de l'article L1132-1 du code du travail car fondé sur l'état de santé du salarié".

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000043302079?cassFormation=CHAMBRE_SOCIALE&dateDecision=10%2F03%2F2021+%3E+10%2F03%2F2021&isAdvancedResult=&page=3&pageSize=10&query=&searchField=ALL&searchProximity=&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=juri&typePagination=DEFAULT

Mais qu'en est-il en cas de licenciement du salarié suite à une absence prolongée pour maladie ou accident non professionnel ?

En pratique, la preuve de la discrimination, et donc l'absence de motivation du licenciement hormis par l'état de santé du salarié, s'avère complexe.

La tendance actuelle des Cours d'Appel est de rejeter la demande principale de nullité du licenciement fondé sur l'état de santé du salarié mais de reconnaître que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse lorsque l'employeur ne prouve pas :

  • que les absences répétées, ou l'absence prolongée du salarié, a désorganisé l'entreprise
  • et la nécessité de remplacer définitivement le salarié absent (le remplacement temporaire par d'autres salariés suffit).

Cour d'Appel d'Aix en Provence, 08 février 2019, n°16/03082

Cour d'Appel de Paris, 23 février 2017, n°15/13070

Cour d'Appel de Rennes, 30 novembre 2016, n°15/06472.