Dans une affaire récente, la Cour de cassation a statué que les salariés à temps partiel peuvent demander la requalification de leur contrat de travail en contrat à temps plein s'ils effectuent des heures supplémentaires portant la durée hebdomadaire ou mensuelle au-delà de la durée légale du travail. Cette application stricte du code du travail en faveur des salariés est une décision importante. Dans cet article, nous vous expliquons les conséquences sur les droits des salariés à temps partiel. Nous vous donnons également les bons réflexes à avoir pour faire valoir vos droits si vous êtes dans cette situation.
Décryptage de la décision de la Cour de cassation Cass. soc. 15-9-2021 n° 19-19.563
Dans cet arrêt, la Cour de cassation a rappelé que :
« L'atteinte ou le dépassement de la durée légale de travail s'apprécie dans le cadre de la semaine, même si la durée de travail prévue au contrat est fixée mensuellement ».
La Cour de cassation relevait en effet que « le salarié avait accompli 1,75 heure complémentaire au mois de février 2015 et qu'au cours de la première semaine de ce mois, le salarié avait effectué 36,75 heures de travail en sorte que l'accomplissement d'heures complémentaires avait eu pour effet de porter la durée du travail accomplie par le salarié à un niveau supérieur à la durée légale du travail, ce dont elle aurait dû déduire que le contrat de travail à temps partiel devait, à compter de ce dépassement, être requalifié en contrat de travail à temps complet, la cour d'appel a violé les textes susvisés »
Le contexte de la décision :
Dans l'affaire en question, un salarié à temps partiel avait travaillé plus de 35 heures par semaine sur différentes périodes. Le salarié avait demandé la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein, mais l'employeur avait refusé. Le salarié avait alors saisi les tribunaux pour obtenir la requalification de son contrat. Sa demande avait été rejetée par la cour d’appel. Il a alors fait valoir son droit de pourvoi en cassation.
La décision de la Cour de cassation :
Dans l’arrêt du 15 septembre 2021, la Cour de cassation a estimé que le salarié avait bien droit à la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein, même si son horaire mensuel n'avait pas changé. La Cour a rappelé que le juge doit vérifier si le salarié a effectué des heures complémentaires portant son temps de travail hebdomadaire au-delà de la durée légale du travail, même si celui-ci est fixé selon une période mensuelle dans le contrat de travail. Elle affirme ainsi que cette situation peut justifier la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein.
Ces pratiques sont courantes dans les secteurs de la restauration, de la vente ou de la sécurité qui ont des activités souvent irrégulières. Les embauches se font alors à temps partiel pour limiter les charges salariales et sont complétées par des heures supplémentaires ou des heures de récupération. Mais le code du travail protège le salarié de cette mise à disponibilité contraignante et à son désavantage. Cette décision le réaffirme.
Les conséquences pour les travailleurs à temps partiel :
Ainsi, c’est une bonne nouvelle pour les travailleurs à temps partiel. En effet, cela signifie que si un salarié à temps partiel effectue des heures complémentaires portant la durée hebdomadaire et/ou mensuelle au-delà de la durée légale du travail, il peut demander la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein.
En cas de refus de l’employeur de requalifier le contrat, le salarié peut saisir les prud’hommes. La requalification peut aller jusqu’à 3 ans en arrière (au-delà il y a prescription).
Les conséquences pour les employeurs :
Pour éviter de se mettre en infraction, il est recommandé d’être vigilant quant à la durée de travail de vos salariés et surtout d’anticiper.
En effet, l’employeur ne pourra pas arguer valablement que le salarié ne se tenait pas à sa disposition pour tenter de faire échec à la déqualification du contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet.
Autrement dit, dès lors que le salarié employé à temps partiel effectue 35 heures de travail au cours d’une seule semaine civile, la requalification est automatique.
Le fait qu’un avenant ait été conclu pour une période temporaire est inopérant.
Il est donc judicieux d’anticiper cette situation, avant que le salarié ne dépasse ses heures contractuelles de travail, en lui faisant signer un avenant portant le contrat à temps plein plutôt que de prendre le risque de poursuites judiciaires et de pénalités financières lourdes.
Que faire si vous êtes salarié à temps partiel et que vous avez dépassé la durée légale de travail ?
Si vous avez effectué 35h, ou plus, sur une seule semaine, même si votre contrat a déterminé la durée de travail sur une période mensuelle, vous êtes en droit de demander la requalification de votre contrat en contrat à temps plein. Et ce quel que soit le mode de rétribution de ces heures : qu’elles vous aient été payées en heures supplémentaires ou que vous les ayez récupérées sur votre temps de travail.
Demander à votre employeur de requalifier votre contrat en contrat à temps plein
Dans un premier temps, il n’est pas nécessaire de mettre en avant la jurisprudence au risque d’entrer en conflit avec votre employeur. Vous pouvez commencer par faire constater à votre employeur que votre poste justifierait un passage à temps plein étant donné que vous effectuez des heures complémentaires à sa demande portant votre temps de travail à hauteur d’un temps plein.
Recueillir toutes les preuves
Si votre demande amiable n’est pas entendue, vous pouvez commencer à constituer votre dossier.
Le cabinet LRF Avocats Conseil peut vous aider à vérifier que vous êtes bien dans votre droit et vous orienter pour réunir toutes les preuves nécessaires :
- Notez vos heures sur un carnet, un agenda ou dans un tableur.
- Conservez tous les échanges avec votre employeur vous demandant d’étendre vos heures de travail : SMS, messages téléphoniques, e-mails…
- Demandez des attestations de témoins : anciens collègues, partenaires, clients…
Faire valoir vos droits auprès de votre employeur
Selon votre situation et votre relation avec votre employeur, cela peut être un bon argument pour négocier une rupture conventionnelle à votre avantage.
Si le conflit est déjà avéré ou que vous faites l’objet d’un licenciement, vous pouvez utiliser cet argument dans la négociation.
Si vous n’êtes toujours pas entendu, vous pouvez aller jusqu’à saisir les prud’hommes. Vous pourrez alors faire valoir l’arrêt de la Cour de cassation susvisé et obtenir un rappel de salaire sur 3 ans maximum y compris sur les congés payés (10%). Vos indemnités de licenciement seront alors calculées également sur la base de votre salaire à temps plein.
Conclusion - Contrat à temps partiel et dépassement du temps de travail hebdomadaire :
Cet arrêt de la Cour de cassation est une avancée importante pour les travailleurs à temps partiel. Il renforce leurs droits. Cela leur donne la possibilité de demander la requalification de leur contrat de travail en contrat à temps plein s'ils effectuent des heures complémentaires au-delà de la durée légale du travail.
Le cabinet LRF Avocats Conseil vous accompagne à toutes les étapes de votre démarche. Nous commençons par évaluer vos droits et nous vous donnons les arguments pour négocier auprès de votre employeur. Si les négociations ne débouchent sur aucun accord satisfaisant nous vous représentons pour porter votre affaire auprès des tribunaux.
Nous sommes à votre disposition pour vous accompagner : Contactez-nous pour en parler
Avocat Conseil en Droit des Affaires, Associé Fondateur – LRF Avocats Conseil
Pas de contribution, soyez le premier