Le divorce d'un chef d'entreprise peut avoir des conséquences majeures sur sa vie professionnelle, même si son conjoint n'est pas directement impliqué dans les activités de l'entreprise. Lorsque la société est créée pendant le mariage sous le régime de la communauté, les parts de l’entreprise sont considérées comme un bien en commun. Le conjoint commun en biens a le droit de revendiquer 50 % des parts de la société au moment du divorce. Il est donc impératif de prendre des mesures pour se protéger et éviter que vos problèmes personnels se répercutent sur votre activité professionnelle.

L’impact du régime matrimonial sur la répartition des biens professionnels entre époux

Le choix du régime matrimonial est essentiel pour protéger l'entreprise en cas de divorce. Les trois principaux régimes matrimoniaux sont : la communauté légale, la séparation de biens, et la participation aux acquêts.

Lorsque les époux n’ont pas établi de contrat de mariage, le régime de la communauté légale (ou communauté réduite aux acquêts) s'applique d'office. Ce régime expose le dirigeant d'entreprise à un risque très élevé. Lorsque la société est créée pendant le mariage, chaque époux en possède la moitié, et au moment du divorce, le conjoint peut réclamer sa part. Cela signifie que les gains, les salaires du dirigeant, les dividendes, et les intérêts des avances en compte doivent être partagés. Pour s'acquitter de cette obligation, la vente de l’entreprise peut s’avérer parfois la seule solution…

Plusieurs situations particulières peuvent se présenter en cas de divorce d'un dirigeant d'entreprise marié sous le régime de la communauté :

  • Entreprise créée avant le mariage : Le conjoint commun en biens n'a aucun droit sur l'entreprise, les parts sociales sont un bien propre du chef d’entreprise. Mais cela n’empêche pas le dirigeant d’être tenu de verser à son ex conjoint une prestation compensatoire.
  • Entreprise créée pendant le mariage avec les économies du couple donc des biens communs : Le conjoint du dirigeant peut réclamer la moitié de la valeur de l'entreprise, y compris tous les actifs (fonds de commerce, titres, actions, parts sociales, etc.).
  • Entreprise créée pendant le mariage avec des fonds personnels du dirigeant de l’entreprise : L'entreprise devient un bien commun en cas de divorce. Il est recommandé d'utiliser une clause de remploi de denier propre pour préciser l'origine des biens et empêcher le conjoint de réclamer des parts sur l'entreprise.

Le contrat de mariage sous la séparation de biens permet de bien séparer les 2 patrimoines du couple et de ne pas faire tomber les parts de société dans une masse commune à partager au moment du divorce. C’est le régime recommandé pour les dirigeants d'entreprises.

Si le régime de la séparation des biens est avantageux pour le dirigeant en cas de divorce, il peut pénaliser le conjoint collaborateur qui a contribué au développement de l'entreprise. Dans ce cas, il est recommandé de mettre en place une société d'acquêts, combinant les règles de séparation et de communauté, pour répartir les avantages équitablement en cas de divorce.

La société d'acquêts est une clause non réglementée intégrée au régime de la séparation des biens, visant à assouplir les règles applicables. Cette démarche est conseillée pour établir un équilibre dans la répartition des biens lors d'une séparation.

Le régime matrimonial est donc à choisir en fonction de votre situation spécifique et de l’implication des conjoints au sein de la société.

L’impact de la forme juridique de l'Entreprise sur les droits du conjoint du chef d’entreprise

Lorsque la structure juridique de l'entreprise est clairement définie, cela offre une protection contre l'ingérence du conjoint du dirigeant dans le capital de l'entreprise et empêche le blocage des organes décisionnels. En cas de divorce, si le chef d'entreprise n'a pas anticipé cette situation et s'est marié sous le régime de la communauté, il expose son entreprise aux revendications de son ex-conjoint. Ce dernier pourrait légitimement demander la moitié des parts de la société en tant qu'associé, conformément à l'article 1832-2 du Code civil, notamment lorsque des titres non négociables comme les parts de SNC ou SARL sont impliqués.

Dans le cas de titres négociables, tels que les actions de SAS ou de SA, le conjoint n'a pas la possibilité de réclamer 50 % de la valeur de l'entreprise. Cependant, il est important de souligner que les actions détenues en commun pendant le mariage peuvent devenir indivises au moment de la séparation.

Après le divorce, le dirigeant d'entreprise et son ancien conjoint seront tenus de désigner un mandataire commun pour les représenter au sein de la société, notamment lors des votes en assemblée ou des prises de décision.

Que faire pour protéger son Entreprise des conséquences d’un divorce ?

Bien qu'il puisse être difficile d'aborder la question d'une éventuelle séparation au moment de l’euphorie du mariage, chaque entrepreneur doit envisager l'avenir de son activité professionnelle et le pire dans sa vie personnelle. Que l'entreprise ait été créée avant ou pendant le mariage, il est toujours conseillé de prendre des mesures pour sécuriser l'entreprise, l'activité professionnelle, et les employés. En tant qu'avocat conseil, le cabinet LRF peut vous accompagner pour optimiser la création ou l'acquisition de votre société.

Cette réflexion préalable peut également jouer un rôle clé dans la protection des biens appartenant au couple ou au conjoint en cas de difficultés financières de l'entreprise.

Il est essentiel de noter que les choix en matière de régimes matrimoniaux et de structures juridiques d'entreprise ne sont pas intrinsèquement problématiques, mais ils doivent être adaptés à la situation spécifique de chaque couple. En fonction des particularités de chaque situation, des solutions adaptées peuvent être envisagées pour mieux prévenir les éventuels conflits liés au divorce.

Si vous n’êtes pas encore mariés et que vous envisagez de créer une entreprise, il peut être judicieux soit de créer l’entreprise avant le mariage soit d’opter pour le régime de la séparation de biens.

Si vous êtes déjà mariés sans contrat de mariage au moment de la création de l’entreprise, les parts sociales tombent automatiquement dans la communauté. Pour s’en prémunir, voici les 3 alternatives qui s’offrent à vous :

  1. Faire signer au conjoint commun en biens le modèle de lettre de renonciation ci-jointe. Il s’agit d’une formalité simple et sans frais offrant une protection efficace. Le conjoint du dirigeant déclare simplement renoncer à ses droits à être ou à devenir associé de la société. Il conviendra de la joindre aux statuts de l’entreprise au moment du dépôt auprès du registre du commerce et des sociétés (RCS) sans frais supplémentaires. Vous trouverez ci-dessous un modèle de lettre de renonciation.
  2. Changer de régime matrimonial en mettant en place un contrat de séparation de biens avant la création de la société. Problème : il faut liquider la communauté avant. C’est à dire que si la résidence principale est un bien commun, par exemple, il sera compliqué de liquider la communauté. En effet, cela implique que la résidence principale doit devenir un bien propre de l'un des deux époux. Difficulté supplémentaire : les frais sont élevés car il faut payer non seulement les émoluments du notaire dont la rédaction du contrat de mariage, mais en plus la liquidation de la communauté (soumise à des taxes de l’état sur la valeur des biens concernés) sans compter les frais de publication au journal d'annonces légales pour ouvrir le droit d'opposition. Il faut prévoir entre 2000 et 3000 euros pour le tout.
  3. Astuce si le conjoint commun en biens refuse de signer la lettre type de renonciation : Confier la rédaction de ses statuts de société à un avocat pour les optimiser. Il pourra préciser que l'apport vient de fonds propres au créateur issus par exemple d’une donation comme un don manuel des parents. Il suffit d'une petite somme d'argent pour constituer le capital social de départ d'une société, généralement 1000 euros. Si le capital social est apporté au moyen d'un don manuel, l'apport au capital est un bien propre. L'avocat annexera le don manuel enregistré aux impôts à la fin des statuts de la société.

Si vous êtes dirigeant ou entrepreneur, le cabinet LRF Avocats Conseil vous accompagne pour protéger et optimiser votre création d’activité professionnelle et vous conseille dès que vous envisagez une séparation. Nous pourrons vous fournir des conseils avisés pour prendre des décisions éclairées et protéger au mieux vos intérêts, que ce soit dans le cadre de votre entreprise ou de votre vie personnelle.

Le cabinet LRF dispose également de partenaires professionnels formés qui pourront vous accompagner pour mettre en place une prévoyance ou une assurance dirigeant Homme clé.

Maître Laëtitia RETY-FERNANDEZ