si le salarié pendant ses heures de travail utilise sa messagerie personnelle pour se plaindre de son employeur, voire se répand sur la vie de ce dernier, il n’y a pas là   motif à licenciement .

Le  23 oct. 2019,  la chambre sociale de la cour de cassation ( n° 17-28.448) précise   que la  boîte  électronique personnelle  du salarié est  couverte par le secret des correspondances , y compris lorsqu’elle est utilisée  pendant le temps de travail.

La cour de cassation se situe dans la droite ligne d’un arrêt de la cour européenne des droits de l’homme du 5 septembre 2017 (arrêt  Bărbulescu c. Roumanie (requête no 61496/08)) qui retenait à la charge de l’employeur  qui avait procédé au licenciement du salarié une violation de l’article 8 de la CEDH relatif au droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance

Dans cette affaire,  le salarié avait   échangé  par l’intermédiaire du logiciel Yahoo Messenger depuis l’ordinateur de l’entreprise pendant les heures de bureau ,contrairement aux règles découlant du règlement intérieur de l’entreprise .

Si  le pouvoir de l’ employeur peut le conduire à vérifier la manière dont ses salariés utilisent leur temps de travail, il n’en demeure pas moins que l’employeur doit se montrer extrêmement prudent avant de mettre fin au contrat de travail de son salarié au sujet de courriels émis durant le temps de travail. 

En effet, si la correspondance mentionne qu’elle est personnelle ,l’employeur ne pourra  y faire référence dans le cadre d’un avertissement ou d’un licenciement.

En tout état de cause, si la juridiction prud’homale est saisie, elle  aura à vérifier en outre la proportionnalité et la justification du contrôle conformément aux dispositions de  l’Article L1121-1 du code du travail.

Ce faisant, la cour de cassation dans cet arrêt du 23 octobre 2019 ne remet pas  en cause la position par elle adoptée  le 16 mai 2013, (n°12-11.866). Elle  affirmait déjà que « les courriels adressés et reçus par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf si le salarié les identifie comme personnels ». 

Toutefois, l’introduction dans l'entreprise, des traitements automatisés de gestion du personnel et toute modification de ceux-ci , impose la consultation  préalable du comité d’entreprise (bientôt CSE ) ,et son information avant toute  décision de mise en œuvre  de l’utilisation, de «  moyens ou (les) techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés » . (article L2323-47du Code du travail). Il en va de même de l’information du  salarié avant tout recueil d’ information le concernant personnellement ( article  L1222-4 du Code du travail).

Le numérique impose donc une attention accrue lors de la  rédaction du contrat de travail, du règlement intérieur ,des notes à destination des nouveaux entrants….et ce encore plus depuis l’introduction en droit interne du  RÈGLEMENT (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD) qui vient renforcer l’ information destinée au  salarié notamment, concernant les finalités et la base juridique du traitement,  les intérêts légitimes poursuivis ,la durée de conservation des données à caractère personnel ,l'existence du droit accès aux données à caractère personnel, la rectification ou l'effacement de celles-ci, ou  le droit de s'opposer au traitement , le droit à la portabilité des données.

Le doyen Carbonnier avait souligné le caractère flexible de notre droit , les nouvelles technologies conduisent à une nécessaire adaptation de nos modes de réflexion et d’action.