Tout locataire d’un bail d’habitation doit user paisiblement des locaux loués.

Il s’agit d’une disposition d’ordre public (qui s’applique automatiquement, à laquelle on ne peut déroger).

Ainsi, le locataire ne doit pas abuser de la chose louée c’est-à-dire qu’il doit en faire un « usage raisonnable » (un usage de « bon père de famille » conformément à l’ancienne notion du Code civil).

Le locataire ne peut donc pas avoir un comportement susceptible de causer un trouble ou une gêne excessive aux autres occupants de l'immeuble ou au voisinage notamment par des nuisances auditives, olfactives, des voies de fait, des injures ou des violences.

En résumé, il ne doit pas perturber la vie de l’immeuble.

Le locataire est également responsable des personnes qui résident avec lui ou qu'il héberge même temporairement.

De son côté, le bailleur a l’obligation de faire sanctionner les manquements de son locataire à cette obligation.

Mais comment se matérialise cette obligation du bailleur ? Que doit-il faire face à un locataire qui cause des troubles anormaux de voisinage ? Que risque-t-il s’il ne fait rien ?

 

Le bailleur a l’obligation de faire sanctionner les manquements de son locataire à la jouissance paisible du logement

Tout bailleur doit  faire sanctionner les manquements de son locataire à l’obligation de jouissance paisible du logement.

Il doit naturellement faire sanctionner les manquements commis dans les lieux occupés mais également ceux qui concernent les parties communes ou encore les abords des lieux loués.

Ainsi, dès qu’il a connaissance de troubles anormaux de voisinage commis par son locataire, il doit le mettre en demeure de faire cesser ces troubles (il peut faire le courrier de mise en demeure directement ou passer par la voie d’un avocat pour un effet davantage comminatoire).

Mais, lorsque les troubles persistent, il doit également envisager la résiliation du bail pour expulsion du locataire qui perturbe le voisinage.

En effet, la résiliation du bail peut être prononcée aux torts du locataire sur le fondement de la jouissance paisible lorsque celui commet des manquements à l’obligation de jouissance paisible des lieux.

Il faudra alors apporter la preuve des troubles anormaux de voisinage allégués (attestations de voisins, plaintes, mains courantes, pétitions etc) et prouver le caractère excessif du trouble invoqué au regard des « inconvénients normaux du voisinage » (Civ. 3e, 14 janv. 2014, n° 12-29.545).

Cette résiliation pourra alors prendre plusieurs formes.

Elle pourra se faire par le jeu de la clause résolutoire lorsqu’une clause prévoit que le bail peut être résilié de plein droit en cas de non-respect de l'obligation d'user paisiblement des locaux loués, résultant de troubles de voisinage.

La résiliation pourra également être « judiciaire » : le bailleur devra saisir le juge afin qu'il prononce la résiliation du bail pour inexécution des obligations contractuelles par le locataire.

Le bailleur aura alors à prouver les troubles de voisinage et ainsi les manquements à la jouissance paisible des lieux que le juge appréciera souverainement.

Une fois en possession d’une décision constatant la résiliation (par le jeu de la clause résolutoire) ou prononçant la résiliation (par la résiliation judiciaire), le bailleur pourra recourir à un Huissier de Justice pour les diligences d’expulsion du locataire si ce dernier ne quitte pas spontanément les lieux.

 

Le bailleur peut être condamné à indemniser la victime d'un trouble causé par son locataire

Le bailleur d'un local d'habitation doit utiliser tous les droits dont il dispose en propre pour faire cesser les troubles de voisinage causés à des tiers par son locataire par une mise en demeure et le cas échéant par la résiliation du bail.

Ceci est logique car le tiers lui-même victime des troubles de voisinages ne peut pas agir directement à l’encontre du locataire auteur des troubles en résiliation de son bail. Il peut uniquement assigner la personne à l'origine du trouble anormal de voisinage afin d'obtenir la cessation du trouble et le versement de dommages et intérêts.

C’est au bailleur de mettre en oeuvre la procédure en résiliation du bail.

Le tiers victime des troubles de voisinage du locataire pourra toutefois reprocher au bailleur son inaction, son manque de diligences à l’encontre du locataire auteur des troubles.

La victime veut même demander réparation au bailleur.

Dans un arrêt récent, un locataire d’un HLM avait assigné le bailleur en condamnation à remédier aux troubles anormaux de voisinage causés par un autre occupant de l’immeuble et à réparer son préjudice.

La Cour d’appel l’avait débouté, considérant que le bailleur ayant adressé trois lettres recommandées aux auteurs de ces troubles, ces diligences apparaissaient « suffisantes », sans qu’il puisse être reproché au bailleur « de ne pas avoir engagé une procédure judiciaire aléatoire de résiliation du bail ».

La Cour de cassation casse la décision et exige un résultat décidant qu’il ne suffisait pas que le propriétaire ait adressé des lettres recommandées aux auteurs de troubles pour s’exonérer - seul le cas de force majeure pouvant l’exonérer - et qu’il est responsable envers le locataire des troubles de jouissance causés par les autres locataires ou occupants de l'immeuble (Cass. Civ 3, 8.3.2018, C 17-12.536).

En clair, le bailleur doit « faire la police » dans l'immeuble, et s'assurer que son locataire ne trouble pas la tranquillité du voisinage.

A défaut, il peut devoir réparation au tiers victime de son locataire...