Dans un arrêt du 25 mai 2018 (n°407336), le Conseil d’Etat est venu préciser la portée du principe de reclassement d’un agent contractuel atteint, de façon définitive, d’une inaptitude physique.

Le requérant avait été recruté par Pôle emploi, dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, pour exercer les fonctions de conseiller principal.

Ce dernier a été placé en congé maladie, puis en congé de grave maladie pour une durée d’un an pour une période allant du 31 août 2006 au 30 août 2007.

Conformément à l’avis du comité médical départemental, confirmé par le comité médical supérieur, Pôle emploi a décidé de ne pas renouvelé ce congé de grave maladie et a placé le requérant en congé de maladie sans traitement à compter du 31 août 2007.

Par la suite, ce dernier a été licencié pour inaptitude physique le 5 mars 2012 et a été admis à la retraite.

Le requérant a alors sollicité auprès du Tribunal administratif de Melun, d’une part, l’annulation des décisions par lesquelles Pôle emploi a rejeté ses demandes de régularisation de sa situation et d’indemnisation et, d’autre part, la condamnation de Pôle emploi à l’indemniser des préjudices qu’il estimait avoir subis du fait des fautes commises par Pôle emploi.

Par un jugement du 16 juillet 2015, le Tribunal administratif de Melun a condamné Pôle emploi à lui verser une somme de 16 952,08 € en réparation des préjudices causés par l’absence fautive de régularisation de sa situation entre le 1er septembre 2008 et le 5 mars 2012 et a rejeté le surplus de ses demandes.

Par un arrêt du 29 novembre 2016, la Cour administrative d’appel de Paris a rejeté l’appel formé par le requérant contre ce jugement en tant qu’il avait, pour partie, rejeté ses demandes.

Ce dernier a alors formé un pourvoi en cassation.

Le Conseil d’Etat a commencé par rappeler le principe général du droit en vertu duquel il appartient à l’employeur public de chercher à reclasser son agent devenu inapte à occuper son emploi avant de pouvoir prononcer son licenciement :  « il résulte d’un principe général du droit, dont s’inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires que, lorsqu’il a été médicalement constaté qu’un salarié se trouve, de manière définitive, atteint d’un inaptitude physique à occuper un emploi, il incombe à l’employeur public, avant de pouvoir prononcer son licenciement, de chercher à reclasser l’intéressé dans un autre emploi » (voir notamment en ce sens : CE, 26 février 2007, n°276863).

Ensuite, les juges du Palais royal sont venus préciser la portée de cette obligation de reclassement en indiquant que « la mise en œuvre de ce principe implique que, sauf si l’agent manifeste expressément sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle, l’employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l’emploi précédemment occupé ou, à défaut d’un tel emploi, tout autre emploi si l’intéressé l’accepte ; que ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions ou soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, qu'il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, son licenciement ».  

Appliquant ces principes au cas d’espèce, le Conseil d’Etat relève que la Cour administrative d’appel, après avoir constaté que le médecin mandaté par Pôle emploi avait indiqué que le requérant n’était pas apte à la reprise de « ses fonctions », s’est fondée sur le fait que ce dernier n’avait pas contesté devant Pôle emploi l’inaptitude à toutes fonctions sur laquelle l’établissement s’est fondé pour licencier le requérant sans chercher à la reclasser.

Le Conseil d’Etat indique que, toutefois, « alors même qu’il n’a pas contesté devant son employeur public la portée donnée au certificat médical le concernant établi par un médecin mandaté par l’administration, un agent peut soutenir devant le juge que cet employeur s’est mépris sur la portée de ce certificat, en en déduisant à tort le constat d’une inaptitude définitive à l’exercice de toutes fonctions ».

Les juges du Palais royal en ont conclu qu’en se fondant, pour rejeter la requête, sur la seule circonstance que le requérant n’avait pas contesté auprès de Pôle emploi les constatations médicales faite sur son aptitude, la Cour administrative d’appel a commis une erreur de droit.