Adopter, comme l’indique l’étymologie du verbe ad optare, signifie « prendre par choix ». Il s’agit effectivement d’un rapport de filiation qui ignore la procréation ; d’un rapport de filiation autrement fondé.

Cette filiation est voulue ; cependant, la volonté seule est impuissante à la créer. Un jugement est indispensable afin d’instituer cette filiation fictive. Notre droit connaît deux formes de filiations, l’adoption plénière qui fait disparaître la filiation de la naissance, et l’adoption simple, qui implique la coexistence de la filiation de la naissance avec la filiation adoptive.

L’adoption simple d’un majeur ne concernant pas cette étude, on peut observer que l’adoption simple et l’adoption plénière d’un mineur sont soumises aux mêmes conditions et empruntent la même procédure. Elles ont en commun de s’adresser à des enfants délaissés par leur famille de naissance. Les adoptants viennent remplacer les parents en assumant le rôle protecteur qui leur était initialement dévolu.

Pour cette raison, dans l’adoption interne d’un enfant pupille de l’État (CASF, art. L. 225-2 à 7) comme dans l’adoption internationale d’un mineur étranger (CASF, art. L. 225-17), les adoptants doivent avoir obtenu préalablement une décision d’agrément. L’agrément pour adopter est délivré par le président du conseil départemental après consultation d’une commission ad hoc, à l’issue d’une procédure comportant une évaluation familiale et psychologique, dont le but est de s’assurer des conditions d’accueil que les candidats à l’adoption peuvent offrir à l’adopté aux plans familial, éducatif et psychologique.

Le consentement à l’adoption implique que le parent qui le donne renonce à élever son enfant. En conséquence, n’est pas valable comme antinomique le consentement à l’adoption donné par la mère au profit de sa partenaire pacsée lorsqu’elle veut continuer à élever son enfant.

Les parents doivent donner leur consentement devant un notaire français ou étranger, ou devant des agents diplomatiques ou consulaires français. La forme authentique du consentement est écartée quand les parents l’expriment en remettant l’enfant au service de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) (Code civil, article 348-3). Parce que l’adoption est irrévocable, les adoptants ne peuvent pas consentir à l’adoption de l’enfant qu’ils ont préalablement adopté.

Le consentement donné à l’adoption des enfants de moins de deux ans n’est valable que si l’enfant a été préalablement et valablement remis au service de l’ASE ou à un OAA (Code civil, article 348-5). Cette disposition tend à protéger au maximum les enfants très jeunes contre toute forme de trafic en imposant un intermédiaire institutionnel. Cette exigence, malheureusement, ne s’applique qu’à l’adoption interne.

L’article 912 du Code civil dispose ainsi que : « La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent. La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités ».

Ainsi conçue, la réserve héréditaire remplit une double fonction de protection de la proche famille contre les libéralités que le de cujus peut vouloir faire à des étrangers au premier cercle familial et de protection individuelle de ses bénéficiaires entre lesquels elle garantit le respect d’une égalité successorale minimale.

En outre, en matière de droit des successions, les enfants adoptés ont des droits. Partant de ce constat, lorsque le défunt a eu des enfants et en a adopté un autre, que se passe-t-il lorsque les enfants naturels contestent la succession et remettent en cause la part de l’héritage revenant à l’adopté ?

Que faut-il entendre par adoption simple et adoption plénière ? Quels sont les droits conférés par le droit des successions à l’enfant adopté simplement à l’enfant adopté plénièrement ?

 

  1. Adoption plénière et adoption simple

 

  1. Adoption plénière

L’adoption est un acte reposant sur la volonté. L’adoption plénière provoque une rupture de tout lien juridique entre la famille d’origine et l’enfant adopté. L’adopté a, dans la famille de l’adoptant, les mêmes droits et les mêmes obligations qu’un enfant dont la filiation est légalement établie.

Les adoptants doivent, avant toute chose, obtenir un agrément délivré par l’aide sociale à l’enfance du conseil général de leur domicile à l’issue d’une procédure dont les modalités sont fixées aux articles L. 225-2 et suivants et R. 225-1 et suivants du Code de l’action sociale et des familles. Les assistants familiaux en sont toutefois dispensés (CASF, art. L. 225-2), tout comme celui qui souhaite adopter l’enfant de son conjoint.

 

  • Conditions tenant à l’adoptant

L’adoption ne peut être demandée que par un couple marié de sexe différent ou non ou une personne seule (Code civil, articles 343, 343-1 et 346, al. 1er).

L’adoption peut être demandée par deux époux mariés, à condition qu’ils ne soient pas séparés de corps. Les époux doivent également être mariés depuis plus deux ans ou être âgés l’un et l’autre de plus de vingt-huit ans (Code civil, article 343).

Si l’adoption est demandée par une personne seule, il faut qu’elle soit également âgée de plus de vingt-huit ans. Elle peut être célibataire ou mariée. Lorsque la personne est mariée, non séparée de corps, le consentement de son conjoint est requis, à moins qu’il ne soit dans l’impossibilité de manifester sa volonté (Code civil, article 343-1).

La condition d’âge n’est pas requise en cas d’adoption de l’enfant de son conjoint (Code civil, article343-2)

En plus de la condition d’âge de l’adoptant, le législateur pose également une condition liée à la différence d’âge entre l’adoptant et l’adopté. L’adoptant doit avoir quinze ans de plus que l’adopté. Cette différence est réduite à dix ans lorsque l’adoption concerne les enfants du conjoint de l’adoptant (Code civil, article 344).

 

  • Conditions relatives à l’adopté

Tout enfant n’est pas adoptable ; l’article 347 du Code civil dresse donc la liste de ceux pouvant être adoptés :

« 1 ° Les enfants pour lesquels les père et mère ou le conseil de famille ont valablement consenti à l’adoption ;

2 ° Les pupilles de l’État ;

3 ° Les enfants déclarés abandonnés dans les conditions prévues aux articles 381-1 et 381-2 ».

Seul l’enfant qui n’a plus de lien avec sa famille d’origine, et pour lequel les parents consentent à l’adoption ou qui n’ont plus de droit sur l’enfant, peut être adopté.

Il faut en principe, afin d’adopter un enfant de façon plénière, que l’enfant soit âgé de moins de quinze ans et qu’il ait été accueilli au foyer de sa famille adoptive depuis au moins six mois (Code civil, article 345, al. 1er). Cependant, si l’enfant a plus de quinze ans et a été accueilli avant d’avoir atteint cet âge par des personnes qui ne remplissaient pas les conditions légales pour adopter, l’adoption plénière pourra être demandée, si les conditions en sont remplies, pendant la minorité de l’enfant et dans les deux ans suivant sa majorité. Il en va de même lorsque l’enfant a fait l’objet d’une adoption simple avant d’avoir atteint l’âge de quinze ans.

Dans tous les cas, si l’enfant a plus de treize ans, son consentement est requis (Code civil, article 345, 348-3).

  • Consentement à l’adoption plénière

L’existence d’un lien de filiation n’est pas nécessairement un obstacle à l’adoption lorsque le ou les parents ont conservé l’autorité parentale, pourvu qu’ils donnent leur consentement (Code civil, article 348). À défaut, lorsque les père et mère de l’enfant sont décédés, dans l’impossibilité de manifester leur volonté ou s’ils ont perdu leurs droits d’autorité parentale, le conseil de famille donnera son consentement, après avis de la personne qui prend soin de l’enfant (Code civil, article 348-2).

En l’absence de lien de filiation établi, si l’enfant est un pupille de l’État (Code civil, article 349) ou s’il a été déclaré abandonné (Code civil, articles 381-1 et 381-2), le représentant légal de l’enfant doit consentir à l’adoption.

Le consentement est recueilli par le service de l’aide sociale à l’enfance si l’enfant lui est confié, un notaire français ou étranger ou devant les agents diplomatiques ou consulaires français (Code civil, article348-3). L’enfant âgé de moins de deux ans sera en tout état de cause remis au service d’aide sociale à l’enfance, à moins qu’il n’ait un lien de parenté jusqu’au sixième degré inclus avec l’adoptant (Code civil, article 348-5).

Le consentement donné à l’adoption peut être rétracté dans les deux mois (Code civil, article 348-3 ; C. pr. civ., art. 1165).

Une fois le délai de deux mois passés, si le consentement des parents n’a pas été rétracté, les parents peuvent encore demander la restitution de l’enfant si celui-ci n’a pas été placé en vue de l’adoption. Si la personne qui a recueilli l’enfant s’y oppose, les parents peuvent saisir le juge qui appréciera l’intérêt de l’enfant et ordonnera ou non la restitution (Code civil, article 348-3).

Le consentement est également requis lorsque l’enfant vient de l’étranger. En ce cas, quelle que soit la loi applicable, l’adoption requiert le consentement du représentant légal de l’enfant. Le consentement doit être libre, obtenu sans aucune contrepartie, après la naissance de l’enfant et éclairé sur les conséquences de l’adoption plénière, sur le caractère complet et irrévocable de la rupture du lien de filiation préexistant (Code civil, article 370-3).

 

  1. Adoption simple

L’adoption simple est une adoption laissant subsister des liens juridiques entre l’enfant adopté et sa famille d’origine, tout en créant des liens de filiation entre l’adoptant et l’adopté.

 

  • Conditions relatives à l’adoptant

Les adoptants doivent obtenir un agrément délivré par l’aide sociale à l’enfance du conseil général de leur domicile (CASF, art. L. 225-2 s.).

L’article 361 du Code civil renvoie à l’essentiel des dispositions relatives à l’adoption plénière.

L’adoption ne peut être demandée que par un couple marié ou une personne seule dans les mêmes conditions que l’adoption plénière (Code civil, articles 361, 343, 343-1 et 346, al. 1er). Toutefois, l’exigence d’un accueil depuis six mois au foyer de l’adoptant n’est pas requise. En cas d’adoption de l’enfant du conjoint, il suffit que l’adoptant ait dix ans de plus que l’adopté.

 

  • Conditions relatives à l’adopté

Les conditions relatives à l’enfant adopté de manière simple sont les mêmes que celles relatives à l’adopté faisant l’objet d’une adoption plénière ; il en va de même pour les modalités de consentement des parents ou du conseil de famille (Code civil, article 361 et 347 s). La seule différence tient à ce qu’il n’existe pas de condition d’âge relative à l’adopté. En effet, l’adoption simple est permise, quel que soit son âge (Code civil, article 360, al. 1er). Toutefois, lorsque l’adopté est âgé de plus de treize ans, il doit consentir personnellement à l’adoption (Code civil, articles 360, al. 4).

En revanche, le placement de l’enfant n’est pas nécessaire et l’adoption simple de l’enfant de son conjoint est toujours possible.

 

  • Consentement à l’adoption simple

Les parents par le sang doivent donner leur consentement à l’adoption, tout en gardant la possibilité de se rétracter dans un délai de deux mois (Code civil, articles 361, 348 et 348-3). Aucun consentement n’est requis lorsque l’enfant est majeur.

 

  1. Les droits conférés par le droit des successions à l’enfant adopté simplement à l’enfant adopté plénièrement

 

  1. Les droits successoraux de l’adopté plénière

L’enfant adopté cesse définitivement d’appartenir à sa famille par le sang. L’enfant perd tous les droits qu’il avait avec sa famille d’origine et n’est plus tenu légalement d’aucun devoir. Ce qui ne lui interdit pas pour autant de rechercher sa famille biologique (CASF, art. L. 147-2, L. 147-3). Cependant, les prohibitions à mariage sont maintenues entre l’adopté et sa famille d’origine (Code civil, article 356).

L’enfant adopté est considéré comme le véritable enfant de l’adoptant. Le lien de filiation nouvellement établi confère à l’adopté tous les droits et les devoirs en découlant. Il a la qualité d’héritier réservataire, même à l’égard des ascendants.

L’enfant prendra donc le nom de l’adoptant dans les conditions prévues par l’article 357 du Code civil. L’adopté peut également se voir attribuer de nouveaux prénoms par le tribunal saisi de l’adoption (Code civil, articles 361 et 357).

Les transmissions qui interviennent entre adoptants et adoptés ayant fait l’objet d’une adoption plénière bénéficient de plein droit du régime fiscal des transmissions à titre gratuit en ligne directe.

A ce titre, en tant qu’héritier réservataire, il peut exercer toute contestation liée à l’atteinte de sa réserve héréditaire par l’action en réduction. C’est une action spéciale par laquelle un héritier réservataire peut obtenir des bénéficiaires de libéralités consenties par le de cujus au-delà de la quotité disponible la restitution de la part excédentaire de ces libéralités afin de rétablir la réserve héréditaire qui a été entamée.

 

  1. Les droits successoraux de l’adopté simple

L’adopté simple acquiert des droits successoraux dans sa famille adoptive, sans avoir, toutefois, la qualité d’héritier réservataire à l’égard des ascendants de l’adoptant (Code civil, article 368). Si l’adopté décède sans descendants ou conjoint survivant, sa famille adoptive et sa famille par le sang vont se partager par moitié la succession, une fois les biens reçus par elles repris (Code civil, article 368-1).

L’adopté simple supporte normalement des droits de mutation à taux plein (60 %), sauf exceptions : notamment lorsque l’adopté est mineur au moment du décès de l’adoptant ou lorsque l’adopté majeur au moment du décès de l’adoptant a, soit dans sa minorité et pendant cinq ans au moins, soit dans sa minorité et sa majorité et pendant dix ans au moins, reçu de l’adoptant des secours et des soins non interrompus au titre d’une prise en charge continue et principale.

À l’instar de l’adopté plénière et en tant qu’héritier réservataire, il peut exercer toute contestation liée à l’atteinte de sa réserve héréditaire par l’action en réduction. C’est une action spéciale par laquelle un héritier réservataire peut obtenir des bénéficiaires de libéralités consenties par le de cujus au-delà de la quotité disponible la restitution de la part excédentaire de ces libéralités afin de rétablir la réserve héréditaire qui a été entamée.

 

 

SOURCES :