Vous venez récemment d’apprendre que vous allez hériter d’une personne décédée et vous vous demandez si vous êtes éligibles à un régime d’exonération ? Par principe, lorsque la succession est ouverte, tous les biens doivent être déclarés auprès de l’administration fiscale.

 

Les droits de succession sont en principe assis sur l'actif successoral tel qu'il est déterminé par application des règles civiles. Il existe cependant de nombreuses règles fiscales spécifiques visant soit à exonérer en tout ou partie certains biens ou certaines personnes des droits de succession, soit à l'inverse à faire entrer dans l'assiette de l'impôt des biens ne dépendant pas de la succession (cas par exemple de la taxation partielle des primes des contrats d'assurance-vie en cas de décès ou encore des donations faisant l'objet d'un rappel fiscal à la succession du donateur).

 

La spécificité des règles fiscales s'exprime également sur le terrain de la preuve. Car si la preuve du droit de propriété du défunt est en principe établie par application des règles civiles (présomption de propriété du possesseur de meuble corporel posée par l'article 2276 du Code civil, par exemple), elle est facilitée pour l'administration par l'existence de diverses présomptions purement fiscales.

 

Les règles de territorialité des droits de succession (et de donation) dépendent de la résidence du défunt (ou donateur), du lieu de situation des biens et de la résidence de l'héritier ou légataire (ou donataire). Sous réserve des conventions fiscales internationales (peu nombreuses) qui peuvent y déroger, ces règles sont les suivantes.

 

Si le défunt (ou donateur) était domicilié en France, tous ses biens meubles et immeubles sont imposables, qu'ils soient ou non situés en France (CGI art. 750 ter, 1°). La double imposition est évitée par l'imputation des droits payés à l'étranger sur ceux dus en France à raison des biens situés à l'étranger (CGI art. 784 A).

 

Si le défunt (ou donateur) était domicilié à l'étranger :

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Sous réserve des conventions fiscales, la détermination de la résidence des personnes obéit aux mêmes critères que pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, par application des principes posés par l'article 4 B du CGI (voir n° 74520 s.).

 

Afin de simplifier le règlement des successions internationales, le Conseil de l'Union européenne a adopté un règlement relatif à la compétence, à la loi applicable, à la reconnaissance et à l'exécution des décisions et des actes authentiques en matière de succession et à la création d'un certificat successoral européen. Le règlement s'applique à la succession des personnes décédées depuis le 17 août 2015 (Règl. 650/2012 du 4-7-2012). Le certificat successoral européen doit permettre aux héritiers et légataires de prouver dans un autre État membre leur qualité et la quote-part qui leur revient dans la succession ainsi que l'attribution à leur profit d'un ou plusieurs biens déterminés faisant partie de la succession. En France, il est délivré par un notaire (CPC art. 1381-1). Des modèles de certificat successoral européen figurent en annexe du règlement d'exécution (Règl. 1329/2014 du 9-12-2014 annexe 5, formulaire V).

 

Pour bénéficier de l'exonération, l'héritier ou le légataire doit déposer au bureau des impôts compétent pour enregistrer la déclaration de succession, et dans le délai prévu pour cet enregistrement (6 mois), une offre de donation à l'État ou à un musée municipal, produite en quatre exemplaires précisant le ou les biens qui en font l'objet, et, le cas échéant, les conditions auxquelles cette offre est soumise.

 

En cas d'agrément le demandeur dispose du délai fixé par la décision d'agrément pour accepter les conditions auxquelles celui-ci est subordonné. Il fait connaître son acceptation au ministre, par pli recommandé avec AR.

 

En l'absence de décision notifiée dans le délai d'un an à compter de la date du récépissé de l'offre, celle-ci est considérée comme refusée.

 

 

  1. Biens exonérés en raison de leur nature

Sont susceptibles d'être exonérés de droits de mutation par décès :

à concurrence des trois quarts de leur valeur, les parts ou actions de sociétés ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (CGI, art. 787 B) ;

— à concurrence des trois quarts de leur valeur, les biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels, affectés à l'exploitation d'une entreprise individuelle (CGI, art. 787 C) ;

— à concurrence des trois quarts de leur valeur vénale, les parts des groupements forestiers, les parts des groupements fonciers agricoles, les parts des groupements agricoles fonciers, les bois et forêts et les biens ruraux donnés à bail à long terme. Lorsque la valeur totale des parts des groupements fonciers agricoles, des parts des groupements agricoles fonciers et des biens ruraux loués par bail à long terme transmis par le donateur ou le défunt à chaque donataire, héritier ou légataire, excède – à compter du 1er janvier 2019 – 300 000 €, l'exonération partielle est ramenée à 50 % au-delà de cette limite. Par exemple, si un contribuable recueille une exploitation agricole louée par bail à long terme d'une valeur de 600 000 €. Cette exploitation est taxable à hauteur de 225 000 € [600 000 € - (300 000 € x 0,75) - (600 000 € - 300 000 € x 0,5)]. Dans l'hypothèse où les biens transmis comprennent à la fois des parts de groupements fonciers agricoles et des immeubles ruraux loués par bail à long terme, la doctrine administrative tolère que la limite de 300 000 € s'applique au titre de chaque catégorie de biens (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-30, no 230). Cette tolérance a pour effet de doubler la limite de 300 000 € lorsque la transmission porte à la fois sur des parts de groupements fonciers agricoles et des immeubles ruraux loués par bail à long terme (CGI, art. 793 ; CGI, art. 793 bis) ;

— à concurrence de 50 % de leur valeur, les immeubles et droits immobiliers lors de la première mutation postérieure à la reconstitution des titres de propriété y afférents, sous réserve que ces titres de propriété aient été constatés par un acte régulièrement transcrit ou publié entre le 1er octobre 2014 et le 31 décembre 2027. Cette exonération est exclusive de l'application au même bien, au titre de la même mutation ou d'une mutation antérieure, de toute autre exonération de droits de mutation à titre gratuit (CGI, art. 793, 2-8º) ;

les réversions de rentes viagères entre parents en ligne directe (CGI, art. 793, 1-5º) ;

— la transmission par décès du bénéfice du contrat de travail à salaire différé en agriculture (CGI, art. 793, 1-6º) ;

— les œuvres d'art, livres, objets de collection et documents de valeur historique ou artistique donnés par l'héritier ou le légataire à l'État ou aux musées municipaux (CGI, art. 1131) ;

— dans la limite de 46 000 € par part reçue par chacun des donataires, héritiers ou légataires, la première transmission à titre gratuit d'une construction nouvelle acquise entre le 1er juin 1993 et le 31 décembre 1994 (CGI, art. 793, 2-4º) ;

— dans la limite de 46 000 € par part reçue par chacun des donataires, héritiers ou légataires, la première mutation à titre gratuit d'immeubles acquis neufs entre le 1er août 1995 et le 31 décembre 1995 (CGI, art. 793, 2-5º) ;

— à concurrence des trois quarts de leur valeur et dans la limite d'un plafond de 46 000 € par part reçue par chacun des donataires, héritiers ou légataires, la première mutation à titre gratuit d'immeubles locatifs acquis entre le 1er août 1995 et le 31 décembre 1996 (CGI, art. 793, 2-6º) ;

— à concurrence des trois quarts de leur valeur, les propriétés non bâties qui ne sont pas en nature de bois et forêts et qui sont incluses dans un site « Natura 2000 », à condition que l'acte constatant la déclaration de succession, d'une part, soit appuyé d'un certificat délivré sans frais par le directeur départemental de l'agriculture et de la forêt attestant que les propriétés concernées font l'objet d'un engagement de gestion conforme aux objectifs de conservation de ces espaces et, d'autre part, qu'il contienne l'engagement par l'héritier ou le légataire, pris pour lui et ses ayants cause, d'appliquer pendant dix-huit ans aux espaces naturels objets de la mutation des garanties de gestion conformes aux objectifs de conservation de ces espaces. Cette exonération n'est pas cumulable avec une autre exonération applicable en matière de droits de mutation à titre gratuit (CGI, art. 793, 2-7º) ;

— la fraction des parts de groupements fonciers ruraux représentative de biens de nature forestière et celle représentative de biens de nature agricole (CGI, art. 848 bis) ;

— les immeubles par nature ou par destination classés ou inscrits sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et les biens meubles en constituant le complément historique ou artistique (CGI, art. 795 A) ;

— dans la limite d'une seule parcelle ou de deux parcelles contiguës, les immeubles non bâtis – ou les droits portant sur ces immeubles – qui sont indivis au sein d'une parcelle cadastrale et dont la valeur totale est inférieure à 5 000 € lorsqu'ils sont constitués d'une seule parcelle et à 10 000 € lorsqu'ils sont constitués de deux parcelles contiguës (CGI, art. 797) ;

— certains immeubles situés en Corse (CGI, art. 1135 bis).

 

 

  1. Biens exonérés en raison de la qualité du successeur

Sous certaines conditions, sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit (CGI, art. 794 et 795) :

— les biens affectés à des activités non lucratives qui adviennent par donation ou succession aux régions, départements, communes, établissements publics et établissements publics hospitaliers ;

— les libéralités faites aux organismes d'administration et de gestion de la sécurité sociale ainsi qu'à la caisse générale de prévoyance des marins et de leurs familles en cas d'accident, de maladie, d'invalidité et de maternité ;

— les dons et legs d'œuvres d'art, de monuments ou d'objets ayant un caractère historique, de livres, d'imprimés ou de manuscrits, faits aux établissements pourvus de la personnalité civile (autres que les établissements publics et les établissements publics hospitaliers) si ces œuvres et objets sont destinés à figurer dans une collection publique ;

— les dons et legs consentis aux établissements publics ou d'utilité publique ;

— les dons et legs faits aux établissements publics charitables (autres que les établissements publics et les établissements publics hospitaliers), aux mutuelles, à tous autres organismes reconnus d'utilité publique dont les ressources sont affectées à des œuvres d'assistance et de bienfaisance, à la défense de l'environnement naturel ou à la protection des animaux ainsi qu'aux associations simplement déclarées qui poursuivent un but exclusif d'assistance et de bienfaisance ;

— les dons et legs faits aux fondations universitaires, aux fondations partenariales et établissements d'enseignement supérieur reconnus d'utilité publique, aux sociétés d'éducation populaire gratuite reconnues d'utilité publique et subventionnées par l'État, aux associations d'enseignement supérieur reconnues d'utilité publique et aux établissements reconnus d'utilité publique ayant pour objet de soutenir des œuvres d'enseignement scolaire et universitaire régulièrement déclarées ;

— les dons et legs de sommes d'argent ou d'immeubles faits aux établissements pourvus de la personnalité civile (autres que les établissements publics et les établissements publics hospitaliers) avec obligation, pour les bénéficiaires, de consacrer ces libéralités à l'achat d'œuvres d'art, de monuments ou d'objets ayant un caractère historique, de livres, d'imprimés ou de manuscrits, destinés à figurer dans une collection publique, ou à l'entretien d'une collection publique ;

— les dons et legs faits aux organismes d'habitations à loyer modéré ou à leurs unions ;

— les dons et legs faits à l'office national des anciens combattants et victimes de guerre ;

— les dons et legs faits aux associations cultuelles, aux unions d'associations cultuelles et aux congrégations autorisées ;

— les dons et legs faits aux établissements publics ou d'utilité publique (autres que les établissements publics et les établissements publics hospitaliers), aux sociétés particulières ou autres groupements régulièrement constitués, en tant qu'ils sont affectés, par la volonté expresse du donateur ou du testateur, à l'érection de monuments aux morts de la guerre ou à la gloire de nos armes et des armées alliées ;

— les dons et legs d'immeubles faits au profit du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres ;

— les dons et legs d'immeubles situés dans les cœurs des parcs nationaux, faits au profit de l'établissement public du parc national concerné ;

— et les dons et legs consentis aux fonds de dotation.

 

  1. Biens exonérés en raison de la qualité du de cujus

 

Tout d'abord, le conjoint survivant et le pacsé survivant sont exonérés de droits de mutation par décès (CGI, art. 796-0 bis).

Ensuite, la part de chaque frère ou sœur du défunt est susceptible d'être exonérée de droits de succession. Le bénéfice de cette exonération est subordonné au respect de trois conditions cumulatives (CGI, art. 796-0 ter). Au moment de l'ouverture de la succession, le frère ou la sœur doit :

— être célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps ;

— être âgé de plus de 50 ans ou atteint d'une infirmité le mettant dans l'impossibilité de subvenir par son travail aux nécessités de l'existence ;

— avoir été constamment domicilié avec le défunt pendant les 5 années ayant précédé le décès.

Lorsqu'une ou plusieurs de ces conditions font défaut, le frère ou la sœur se voient octroyer un abattement à titre subsidiaire.

Enfin, lorsque le de cujus est soit un militaire décédé dans certaines circonstances, soit une victime de guerre ou une personne décédée du fait d'actes de terrorisme ou des conséquences directes de ces actes dans un délai de trois ans à compter de leur réalisation, soit un sapeur-pompier, professionnel ou volontaire, décédé en opération de secours et cité à l'ordre de la Nation, soit un policier ou un gendarme décédé dans l'accomplissement de sa mission et cité à l'ordre de la Nation, soit un agent des douanes décédé dans l'accomplissement de sa mission et cité à l'ordre de la Nation, les parts nettes recueillies par ses ascendants, ses descendants, ses frères et sœurs et leurs descendants et son conjoint sont exonérées de droits de succession (CGI, art. 796, I).

 

Sources :

https://www.heritage-succession.com/article-quelles-sont-les-exonerations-de-droits-de-succession.html

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/texte_lc/LEGITEXT000006069577?etatTexte=VIGUEUR&etatTexte=VIGUEUR_DIFF

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/texte_lc/LEGITEXT000006069568?etatTexte=VIGUEUR&etatTexte=VIGUEUR_DIFF

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/texte_lc/LEGITEXT000006069569?etatTexte=VIGUEUR&etatTexte=VIGUEUR_DIFF

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/texte_lc/LEGITEXT000006069574?etatTexte=VIGUEUR&etatTexte=VIGUEUR_DIFF

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/texte_lc/LEGITEXT000006069576?etatTexte=VIGUEUR&etatTexte=VIGUEUR_DIFF