L'employeur qui souhaite renoncer à l'exécution d'une clause de non-concurrence dans le cas d'une rupture conventionnelle, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention de rupture, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires.
En l'espèce, les juges du fond avaient accordé le paiement d'une partie de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence entre la date de la rupture de la convention (le 5 mai 2015) et la date de renonciation par l'employeur de l'exécution de la clause (le 11 septembre 2015).
En décidant ainsi, la Cour de cassation juge que la cour d'appel a violé l'article L. 1237-13 du Code du travail et l'article 1134 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Elle retient que la date de rupture fixée par les parties dans la convention de rupture étant le 5 mai 2015, il en résultait que la renonciation par l'employeur au bénéfice de la clause de non-concurrence intervenue le 11 septembre 2015 était tardive.
Par ailleurs, elle rappelle que la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence ayant la nature d'une indemnité compensatrice de salaires, elle ouvre droit à des congés payés. En décidant du contraire au motif que la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, certes calculée sur la base du salaire, est payable postérieurement à la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-1, L. 3141-22 et L. 3141-26 du Code du travail.
- Non-respect des délais
- Renonciation anticipée
En l’espèce, la clause de non-concurrence donnait à l’entreprise la possibilité de lever l’interdiction de concurrence au plus tard dans les huit jours suivant la notification de rupture du contrat de travail. L’employeur avait libéré le salarié de son obligation de non-concurrence par lettre du 7 avril et l’avait licencié le 28 juin suivant. La cour d’appel avait validé cette renonciation à la clause. A tort selon la Cour de cassation pour laquelle le délai courait à compter de la rupture du contrat de travail.
En l’état d’une lettre d’engagement prévoyant que l’employeur pouvait libérer le salarié de la clause de non-concurrence à condition de l’en avertir par écrit dans le délai d’un mois suivant sa démission, la société ne saurait se prévaloir d’une libération faite verbalement lors d’un entretien antérieur au départ de l’intéressé.
Sur la validité de la renonciation anticipée à l’application d’une clause de non-concurrence en vertu de l’accord national interprofessionnel des VRP, voir TB-I-34000 s.
- Renonciation tardive
Selon l’article 32 de l’annexe IV de la convention collective nationale de l’industrie textile, « l’employeur peut toujours libérer l’intéressé de la clause de non-concurrence inscrite dans son contrat et se décharger en contrepartie de l’indemnité prévue à condition de l’en avertir par écrit, au moment de la notification de la rupture, en cas de licenciement ».
La rupture d’un contrat de travail se situe à la date où l’employeur a manifesté sa volonté d’y mettre fin.
Le salarié n’a pas à justifier d’un préjudice pour prétendre en cas de renonciation tardive à la clause de non-concurrence au versement de l’indemnité compensatrice.
- Caractère non équivoque
- Renonciation expresse
La renonciation de l’employeur doit être expresse et ne saurait être déduite des circonstances entourant la rupture. En effet, la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d’actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer. Ainsi, l’indemnité compensatrice de l’obligation de non-concurrence doit être versée au salarié dès lors que l’employeur n’a pas renoncé expressément à la clause dans le délai imparti par la convention collective.
L’employeur prétendait que la clause de non-concurrence étant dépourvue d’intérêt pour l’entreprise (dans la première espèce, il avait négocié l’embauche du salarié par une entreprise non concurrente, dans la seconde espèce le salarié avait été mis à la retraite), il y avait implicitement renoncé.
La mention « libre de tout engagement » figurant dans le certificat de travail est insuffisante pour établir que l’employeur a entendu libérer le salarié de son obligation de non-concurrence : voir NA-III-1480 s.
S’agissant de la portée d’une transaction sur les obligations résultant de la clause de non-concurrence, voir NA-III-17600 s.
Une formulation générale dans l’accord de rupture ne vaut pas renonciation.
- Renonciation dans la lettre de licenciement
En l’espèce, le contrat de travail prévoyait que l’employeur pouvait renoncer à la clause de non-concurrence par une lettre recommandée envoyée dans les 15 jours suivant la notification du licenciement.
La renonciation de l’employeur à se prévaloir de la clause de non-concurrence prévue dans un contrat de travail doit résulter d’une manifestation de volonté claire et non équivoque.
Le plan de sauvegarde de l’emploi prévoyant notamment que la clause de non-concurrence serait systématiquement levée afin de faciliter la recherche d’emploi des salariés licenciés, le chef d’entreprise estimait que cette intention inconditionnelle exprimée devant les représentants du personnel se suffisait à elle-même, sans qu’il ait à la réitérer individuellement. Mais la Cour de cassation lui impose de porter sa décision clairement à la connaissance de chacun des salariés pour qu’il n’existe aucune équivoque sur ses intentions.
Sources :
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