Principes généraux de la détermination de la résidence fiscale
En matière de fiscalité internationale, la détermination de la résidence fiscale emprunte généralement le raisonnement suivant :
- Examen des règles internes de chaque pays en concours pour déterminer, selon leur législation respective, le domicile fiscal du contribuable.
- Application des critères de la convention fiscale internationale, si la personne est considérée comme domiciliée dans les deux États au regard des droits internes, afin de trancher le conflit de résidence selon une hiérarchie de critères conventionnels.
Le domicile fiscal français est défini à l'article 4 B-1 du Code Général des Impôts. Celui-ci énonce les critères alternatifs qui doivent être examinés pour déterminer si le domicile fiscal du contribuable se situe en France. Si l’un seul d'entre eux est rempli :
1. Le contribuable est considéré comme domicilié fiscalement en France au regard des dispositions fiscales françaises en vigueur ;
2. Celui-ci est soumis à une obligation fiscale illimitée, c’est-à-dire sur l’ensemble de ses revenus de source française ou étrangère.
Sont donc considérés comme ayant leur domicile fiscal en France :
- Les personnes ayant en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal.
- Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire.
- Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.
La nationalité n’est pas un critère retenu par administration fiscale française.
Spécificité de la convention franco-marocaine en date du 29 mai 1970
La convention fiscale conclue entre la France et le Maroc le 29 mai 1970 présente une particularité notable : elle définit le domicile fiscal en fonction de critères purement conventionnels, sans faire référence à la législation interne des États contractants. Ainsi, "la convention fiscale franco-marocaine du 29 mai 1970 définit le domicile fiscal en fonction des seuls critères conventionnels sans se référer à la législation interne des États contractants. Par suite, le fait qu'une personne physique soit ou non considérée comme ayant son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts (CGI) est indifférent pour la détermination de son domicile au sens de cette convention."
Quels sont ces critères?
Critères de détermination du domicile fiscal selon la convention franco-marocaine
Selon l’article 2 de la convention franco-marocaine du 29 mai 1970 :
- "Une personne physique est domiciliée dans l'État où elle a son foyer permanent d'habitation. Si cette personne possède un foyer permanent dans les deux États, elle est réputée posséder son domicile dans celui des États contractants où elle a le centre de ses activités professionnelles et, à défaut, où elle séjourne le plus souvent."
La jurisprudence et les commentaires administratifs précisent que :
- Toute résidence dont une personne dispose de manière durable constitue, au sens de la convention, un foyer permanent d'habitation.
- Le critère du "séjour le plus long" n'intervient que si une personne dispose d'un foyer permanent d'habitation en France et au Maroc et qu'il est impossible de déterminer le centre de ses activités professionnelles.
- Exemple jurisprudentiel : "Dans le cas d'un contribuable marié sous le régime de la séparation de biens disposant d'un foyer permanent d'habitation dans les deux États, et dont le centre de ses activités professionnelles se situe au Maroc, il conviendra de considérer que son domicile fiscal se situe au Maroc. En revanche, le domicile fiscal du conjoint séjournant en France plus de six mois par an et n'exerçant pas d'activité professionnelle au Maroc doit être considéré comme demeurant situé en France."
Conséquences pratiques et points de vigilance :
- Identifier si la personne dispose d’un foyer permanent d’habitation dans un seul État ou dans les deux (France et Maroc) :
- Si un foyer permanent existe dans les deux États, déterminer dans lequel se situe le centre des activités professionnelles ; si ce critère est indéterminé, retenir l’État où le séjour annuel est le plus long :
- L’activité professionnelle doit être appréciée selon sa consistance réelle et sa localisation effective, y compris en tenant compte de la nature des revenus (salariés, non-salariés, dirigeants, etc.) :
- En l’absence d’activité professionnelle déterminante, le critère du séjour le plus long s’applique strictement ; il convient de rassembler tous justificatifs de présence (passeports, billets, attestations, etc.) :
- Pour les contribuables mariés, apprécier séparément la situation de chaque époux si leurs foyers ou activités divergentLe fait, pour une personne physique, d’être ou non considérée comme domiciliée fiscalement en France au sens de l’article 4 B du CGI est indifférent pour l’application de la convention franco-marocaine : c’est la convention qui prévaut, selon ses propres critères, pour déterminer dans quel État la personne est considérée comme résidente aux fins d’imposition ("la convention fiscale franco-marocaine du 29 mai 1970 définit le domicile fiscal en fonction des seuls critères conventionnels sans se référer à la législation interne des États contractants. Par suite, le fait qu'une personne physique soit ou non considérée comme ayant son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts (CGI) est indifférent pour la détermination de son domicile au sens de cette convention.")
- Exemple de mise en œuvre : "Une personne qui, d'une part, réside avec son épouse au Maroc la plus grande partie de l'année et, d'autre part, dispose de façon permanente d'un logement en France où elle réside deux mois par an, est réputée disposer dans les deux pays d'un foyer permanent d'habitation au sens de l'article 2-1 de la convention franco-marocaine du 29 mai 1970. Pour déterminer l'État de résidence fiscale de l'intéressée, il convient donc de faire application des critères subsidiaires énoncés par l'article 2-1."
Cas pratique :
Une personne physique possède un foyer permanent d’habitation à la fois en France et au Maroc, réside la majorité de l’année au Maroc, mais détient plusieurs immeubles et de nombreuses participations dans des sociétés civiles immobilières en France. Elle perçoit en outre une retraite agricole française et occupe des fonctions d’administrateur de sociétés au Maroc.
Selon la convention fiscale franco-marocaine du 29 mai 1970, la détermination de la résidence fiscale ne s’effectue pas en référence au droit interne des États contractants mais uniquement selon les critères posés par la convention. L’article 2 prévoit, en cas de double foyer permanent d’habitation, d’appliquer d’abord le critère du centre des activités professionnelles, puis, à défaut, celui de la durée du séjour le plus long. Dans ce cas, la personne est réputée disposer d’un foyer permanent d’habitation dans les deux pays. Cependant, n’ayant pas d’activité professionnelle en France, et le centre de ses activités professionnelles étant situé au Maroc (où elle exerce les fonctions d’administrateur de sociétés), et séjournant la plus grande partie de l’année au Maroc, elle est considérée comme domiciliée fiscalement au Maroc. Les revenus de capitaux mobiliers et les pensions de retraite de source française ne sont donc imposables qu’au Maroc, conformément aux articles 2 et 17 de la convention franco-marocaine. Cette solution a été confirmée par la jurisprudence (CAA Nantes 29 juin 1994, Lesmaris).
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