À l’occasion d’une proposition de rectification consécutive à l’examen de la situation fiscale personnelle de mon client, le service vérificateur avait constaté une discordance majeure entre les montants déclarés et les crédits bancaires figurant sur ses comptes.
⚖️ Point de procédure en exergue : En pareille situation, l’administration s’appuie sur l’article L 16 du Livre des Procédures Fiscales pour adresser une demande d’éclaircissements ou de justifications sur l’origine des crédits constatés ("l'administration peut demander au contribuable des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que celui-ci dispose de revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés...")
En l’absence de réponse jugée suffisante, elle engage la procédure de taxation d’office fondée sur l’article L 69 du même Livre
Classique ? Oui… sauf que.
Plutôt que d’engager une vérification de comptabilité sur l’activité professionnelle déclarée du contribuable (vente de fruits et légumes, immatriculée , déclarations et SIRET connus du service), le vérificateur choisit une autre voie :
➡️ Article L.16 LPF : demande de justifications sur l’origine des crédits.
➡️ Faute de réponse jugée suffisante : Article L.69 LPF – taxation d’office au titre de revenus d’origine indéterminée.
⚖️ Le problème
La jurisprudence constante du Conseil d’État est claire :
L’administration commet un détournement de procédure lorsqu’elle utilise la demande de justifications (L.16) et la taxation d’office (L.69) pour imposer des sommes dont elle sait déjà qu’elles constituent un revenu catégoriel.
CE, 30 déc. 2009, n°307131, Bragaglia : Les sommes inscrites au crédit d’un compte courant d’associé ne peuvent être imposées comme “revenus d’origine indéterminée” qu’après avoir recherché si elles ne proviennent pas des résultats sociaux.
CE, 13 mars 2006, n°249895, Pasco : même exigence — lorsque l’origine des sommes est connue, la procédure adaptée doit être suivie.
En d’autres termes :
Si l’origine est connue (ex. revenus professionnels, BIC, BNC, capitaux mobiliers…), l’administration doit suivre la procédure adaptée à cette catégorie.
Elle ne peut pas classer artificiellement ces sommes en “revenus d’origine indéterminée” pour appliquer la taxation d’office.
À retenir :
La demande de justifications (L.16 LPF) n’est pertinente que si l’administration ignore l’origine des crédits et que la discordance atteint le seuil de la “règle du double”.
La taxation d’office (L.69 LPF) n’est régulière que lorsque l’origine exacte n’est pas identifiée.
En cas contraire, il y a détournement de procédure et le redressement encourt l’annulation.
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