Au cours de la scolarisation de leur enfant, les parents d’élèves en situation de handicap se trouvent souvent confrontés à la problématique de l’aménagement des conditions d’examens.
Ainsi, après avoir formulé la demande d’aménagements auprès du SIEC (Service Interacadémique des Examens et Concours), le verdict tombe : refus total ou partiel des aménagements sollicités, et ce, bien que souvent, lesdits élèves bénéficient de ces aménagements dans le cadre de leur scolarisation, prévus par le plan d’accompagnement.

S’agissant d’une décision administrative, deux types de recours s’ouvrent à l’encontre de la décision du SIEC, dans un délai de deux mois à compter de sa notification :

  • le recours gracieux devant le SIEC d’une part ;
  • le recours contentieux devant le Tribunal administratif d’autre part.

Il est primordial d’exercer l’un de ces recours, voire les deux, le cas échéant, pour manifester son désaccord avec cette décision. L’absence de recours gracieux ou contentieux vaudrait acceptation de la décision et il ne serait plus possible de revenir dessus par la suite.

Toutefois, s’agissant du recours gracieux, le SIEC dispose d’un délai de deux mois pour rendre une décision, à compter du courrier contestant le refus, et s’agissant du recours contentieux, les délais de traitement du Tribunal administratif ne permettent pas d’obtenir une décision rapidement.

Il en résulte que bien souvent, les parents d’élèves n’obtiennent pas une nouvelle décision à temps pour la tenue des épreuves.

Face à l’urgence de la situation, il convient de recourir, outre les procédures de recours « classiques », à la juridiction des référés, qui assure, pour sa part, une décision rapide, pour peu que les conditions pour la saisir sont réunies.

Deux types de référés peuvent être envisagés dans cette hypothèse :

  • Le référé suspension (article L521-1 du Code de Justice administrative),
  • Le référé liberté (article L521-2 du Code de Justice administrative).

1°/ Le référé suspension suppose la réunion des conditions suivantes :

  • avoir déposé un recours à l’encontre de la décision dont on demande la suspension,
  • la justification de l’urgence,
  • l’existence d’un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision.

Une fois les conditions réunies, de quels pouvoirs dispose le juge des référés dans ce cadre ?

En vertu des dispositions de l’article L521-1 du code de justice administrative, le référé suspension permet au juge d’ordonner la suspension de l’exécution de la décision litigieuse ou de certains de ses effets.

Mais une fois l’exécution de la décision de refus suspendue, qu’advient-il de la demande d’aménagements ?

A l’occasion d’une ordonnance en date du 6 juin 2017 (N°1703873), le juge des référés du Tribunal administratif de Melun, a rappelé l’étendue de ses pouvoirs en la matière.

Dans cette espèce, le Juge des référés a été saisi de la décision de refus rendue par le SIEC à une demande d’aménagement, sur le fondement des dispositions de l’article L521-1 du code de justice administrative.

Il lui était alors demandé de suspendre la décision du SIEC, d’une part, et d’enjoindre au directeur du SIEC d’accorder les aménagements des conditions d’examens à l’élève, d’autre part.

Après avoir relevé l’existence d’une urgence et de moyens créant un doute sérieux quant à la légalité de la décision rendue par le SIEC, le juge des référés a ordonné la suspension de la décision.

Il a toutefois précisé que, saisi sur le fondement des dispositions de l’article L521-1 CJA, il ne lui appartenait pas d’enjoindre au SIEC d’accorder les aménagements des conditions d’examens à l’élève pour les épreuves du brevet.

Le Juge des référés a ainsi enjoint au SIEC de procéder au réexamen de la demande du requérant dans un délai de 10 jours à compter de la réception de l’ordonnance.

Par conséquent, ce référé est utile pour obtenir une nouvelle décision du SIEC dans un délai plus rapide, dès lors qu’il est démontré l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision.

En revanche, il ne permet pas au Juge d’accorder les aménagements demandés, ni d’enjoindre au SIEC d’ordonner les aménagements. Ces questions seront tranchées par le juge lors de la procédure au fond.

2°/ Le référé liberté est, quant à lui, particulièrement efficace, puisque son objet suppose que le juge des référés statue en 48 heures, et qu’il lui ouvre des pouvoirs beaucoup plus étendus et coercitifs.

Toutefois les conditions pour recourir à ce type de procédure sont strictes : en présence d’une situation d’urgence, le juge des référés saisi sur le fondement des dispositions de l’article L521-2 CJA, peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale.

Par une décision en date du 15 décembre 2010 (N° 344729), le Conseil d’Etat a placé le droit à l’égal accès à l’instruction au rang de liberté fondamentale, dont l’atteinte grave et manifestement illégale peut ouvrir le recours au référé liberté.

Si l’égal accès à l’instruction a été reconnu comme une liberté fondamentale, son atteinte grave et manifestement illégale par une administration, telle que le SIEC, devra néanmoins être évaluée au regard des circonstances de l’espèce et soumise à l’appréciation du juge des référés.

Ainsi, la décision de refus d’aménagements rendue par le SIEC pourra, dans certaines situations, constituer une atteinte grave et manifestement illégale au droit à l’égal accès à l’instruction, ouvrant la voie du recours au référé liberté.

Toutefois, cela n’est pas systématique.

Par une décision en date du 20 septembre 2018 (N° 423727), le juge des référés du Conseil d’Etat a ainsi semblé considérer que les conditions de déroulement des épreuves d’un master, même entachées d’une rupture d’égalité, ne pouvaient porter atteinte à une liberté fondamentale : « Considérant que les conditions de déroulement des épreuves d’un master, à supposer même qu’elles soient entachées d’une rupture d’égalité, ne portent pas, en elles-mêmes atteinte à l’exercice d’une liberté fondamentale ».

Puis, rappelé, s’agissant des élèves atteints d’un handicap :
« (…) compte tenu du droit reconnu, notamment par l’article L. 112-4 du code de l’éducation, aux élèves et étudiants atteints d’un handicap ou d’un trouble de santé invalidant à des aménagements des conditions de passation de leurs épreuves d’examen ou de concours, une carence caractérisée dans la mise en oeuvre, par une personne publique, des obligations qui en découlent, eu égard, d’une part, à l’état de santé de l’intéressé et, d’autre part, des pouvoirs et moyens dont cette personne publique dispose, est susceptible d’être regardée comme portant une atteinte manifestement illégale à une liberté fondamentale ».

Dans cette espèce, le Conseil d’Etat a ainsi procédé à un examen de la situation de santé de l’élève et il a apprécié les pouvoirs et moyens apportés par l’administration dans l’accomplissement de ses obligations à l’égard des élèves en situation de handicap, pour caractériser ou non l’atteinte illégale.

L’intérêt d’une telle procédure, lorsque les conditions de recevabilité sont réunies, est indéniable : le juge des référés investi de pouvoirs étendus pourra mettre fin à l’atteinte à la liberté fondamentale en cause, en rendant sa décision dans les 48 heures, notamment par le prononcé d’une injonction au SIEC de mettre en place les aménagements sollicités.

Pour conclure, plusieurs voies de recours, plus ou moins rapides, s’ouvrent aux élèves en situation de handicap qui se voient opposer un refus d’aménagement de leurs conditions d’examens par le SIEC. Néanmoins, une évaluation préalable de la situation de l’élève et des motivations du refus du SIEC est primordiale pour déterminer la voie de recours la plus adaptée.