Dans son arrêt la Cour de cassation - troisième chambre civile du 14 décembre 2022 / n° 21-21.305 annonce modifier sa jurisprudence en raison de la multiplicité des recours préventifs en matière de construction.

Dans le cas d’espèce, l'office public de l'habitat d'Aubervilliers (l'OPH) a confié au groupement constitué notamment de la société ATE, assurée auprès de la MAF, la maîtrise d'œuvre de travaux de restructuration et de réhabilitation d'un immeuble.

La société Arcade développement, devenue Arcade ingénierie, assurée auprès de la société L'Auxiliaire, est intervenue en qualité de sous-traitant de la société ATE.

La réception a eu lieu le 2 novembre 2008.

Se plaignant de désordres, l'OPH a, sur requête adressée le 13 septembre 2011 au tribunal administratif, obtenu la désignation d'un expert par ordonnance du 1er décembre 2011.

Par jugement du 19 janvier 2016, confirmé par arrêt de la cour administrative d'appel du 15 mars 2018, la société ATE a été condamnée, avec d'autres constructeurs, à payer à l'OPH une certaine somme pour remédier aux désordres.

Par acte du 6 mars 2018, la société ATE et la MAF ont assigné la société Archibald, ès qualités, et la société L'Auxiliaire pour que celle-ci soit condamnée à leur rembourser les sommes qu'elles avaient payées à l'OPH.

L’arrêt d’appel a déclaré irrecevables, comme prescrites, les demandes formées contre la société l’Auxiliaire.

La Cour de cassation censure cet arrêt et annonce opérer une évolution de jurisprudence.

Après avoir rappelé que par un arrêt de la 3eme chambre Civile rendu le 16 janvier 2020 n° 18-25.915, il a été jugé que le recours d'un constructeur contre un autre constructeur ou son sous-traitant relevait des dispositions de l'article 2224 de code civil et se prescrivait par cinq ans à compter du jour où le premier avait connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, et que d'autre part, tel était le cas d'une assignation en référé-expertise délivrée par le maître de l'ouvrage à l'entrepreneur principal, laquelle mettait en cause la responsabilité de ce dernier, cette règle oblige cependant les constructeurs, dans certains cas, à introduire un recours en garantie contre d'autres intervenants avant même d'avoir été assignés en paiement par le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, dans le seul but d'interrompre la prescription

Désormais le constructeur ne pouvant agir en garantie avant d'être lui-même assigné aux fins de paiement ou d'exécution de l'obligation en nature, il ne peut être considéré comme inactif, pour l'application de la prescription extinctive, avant l'introduction de ces demandes principales.

Dès lors, l'assignation, si elle n'est pas accompagnée d'une demande de reconnaissance d'un droit, ne serait-ce que par provision, ne peut faire courir la prescription de l'action du constructeur tendant à être garanti de condamnations en nature ou par équivalent ou à obtenir le remboursement de sommes mises à sa charge en vertu de condamnations ultérieures.

La Cour de cassation précise que la jurisprudence nouvelle s'applique à l'instance en cours, dès lors qu'elle ne porte pas une atteinte disproportionnée à la sécurité juridique de la société L'Auxiliaire tout en préservant le droit d'accès au juge de la société ATE et de la MAF.