La question est de savoir si, dans le régime des revenus fonciers, il est possible de déduire dans les charges le coût d'achat des meubles, lorsque la location inclut des meubles, comme par exemple une cuisine équipée.

La réponse est positive : il est possible de déduire le coût d'achat et de remplacement des meubles dans le régime des revenus fonciers, à condition toutefois que ces meubles soient mentionnés dans le bail.

(la photo des bébés est sans rapport avec le sujet mais les bébés c'est sympa, et je n'ai pas de photos de femme nue libre de droit)

 

Le régime des revenus fonciers peut s'appliquer à une location incluant des meubles

La question de la déduction du coût des meubles en revenus fonciers pourrait paraître incongrue puisque le régime des revenus fonciers s'applique en principe à la location nue, donc sans meuble.

En réalité, le régime des revenus fonciers n'est pas réservé à la location nue et peut s'appliquer à une location d'immeuble incluant des meubles, à condition toutefois de ne pas relever d'un autre régime.

En particulier, le régime des BIC s'applique en cas de location meublée. Mais encore faut-il qu'il y ait suffisamment de meubles offrant un minimum d'habitabilité.

La location d'un logement avec quelques meubles relève en principe du régime des revenus fonciers si les meubles ne sont pas suffisants pour habiter les lieux, par exemple s'il manque le lit. La location d'un logement nu avec une cuisine équipée relève donc des revenus fonciers.

Il en va de même en cas de location d'un local professionnel, qui contient des meubles, mais sans que ces meubles permettent d'exercer une activité professionnelle.

Il est proposé de s'intéresser plus particulièrement à la possibilité de déduire les meubles ménagers nécessaires à une cuisine équipée, dans la mesure où cette question a donné lieu à des décisions publiées et des doctrines. Et les solutions retenues pour la déduction des meubles d'une cuisine équipée pourraient être étendues à tous les types de meubles.

Cette solution pourrait aussi être étendue au coût d'un service de ménage ou d'assistance en petites réparations.

La question de la déduction des meubles en revenus fonciers est un sujet important car de plus en plus de propriétaires louent leurs locaux avec des meubles. Par ailleurs, il est envisagé dans le rapport LE MEUR de rattacher les loueurs en meublé non professionnels (LMNP) au régime des revenus fonciers et la question pourrait se poser également dans ce cadre.

 

La doctrine administrative et la jurisprudence n'admettent que la déduction de l'installation d'une cuisine équipée

En revenus fonciers, en principe, seules les charges visées à l'article 31 du CGI sont déductibles. Parmi cette liste, il n'y a aucune mention de l'achat de meubles et du coût de leur remplacement.

Il est possible de se demander si le coût des meubles ne pourrait pas être rattaché aux dépenses d'amélioration ou aux dépenses de réparation et entretien, visées à l'article 31.

Mais la doctrine administrative refuse un tel rattachement, sauf pour le cas de la première installation de la cuisine équipée, considérée comme une dépense d'amélioration.

La première installation d'une cuisine équipée dans un logement est une dépense d'amélioration toujours déductible (BOI-RFPI-BASE-20-30-10 n°70).

En résumé, seules les dépenses d'installation de la cuisine équipée sont déductibles si le bail prévoit une cuisine équipée mais les dépenses de remplacement ne sont pas déductibles, ce qui est pour le moins curieux.

La jurisprudence valide pour l'essentiel la doctrine de l'administration. S'il s'agit d'une première installation, il s'agit d'une dépense d'amélioration déductible. Mais toute dépense complémentaire, ou même de remplacement, ne serait pas déductible car n'étant, ni une dépense d'amélioration, ni une dépense d'entretien.

Il pourrait être conclu que seules les dépenses d'installation d'une nouvelle cuisine équipée sont déductibles alors que les dépenses de renouvellement des éléments de la cuisine ne sont pas nécessairement déductibles. Et en tout cas, l'installation de nouveaux équipement dans une cuisine équipée ne pourrait être qualifiée ni de dépenses d'amélioration, ni de dépenses de réparation et d'entretien.

 

Mais, conformément à l'article 13 du CGI, les dépenses effectuées en vue de l'acquisition ou la conservation du revenu sont admises en déduction

Cette déduction est possible sauf lorsqu'il s'agit de dépenses expressément exclues des charges foncières déductibles par l'article 31 du CGI, même si ces dépenses ne sont pas citées à l'article 31.

Autrement dit, la liste de l'article 31 n'est pas une liste limitative.

Il s'agit d'une position ancienne du Conseil d'Etat et confirmée ensuite : CE 23 novembre 1963, n° 60577 : Dupont 1/64 p. 74, RO p. 438 ; CE 11 mai 1977, n° 450 : RJF 7-8/77 n° 408 . CE 8 novembre 1978, n° 8603, 7e et 8e s.-s. RJF 12/78 n° 545 à propos des dépenses de mise en service d'un immeuble (nettoyage des sols et analyse d'eau) pour permettre sa mise en location ; CE 20 octobre 1978 n° 7157 : RJF 12/78 n° 54 pour le versement d'un pas de porte.

Ainsi, selon moi, toutes les dépenses d'achat de meubles sont déductibles des revenus fonciers, que ce soit au moment de leur installation ou au moment de leur renouvellement.

Mais, selon moi, une telle déduction suppose que les meubles en question soient mentionnés dans le bail d'habitation.

A partir du moment où la location d'un appartement inclut une cuisine équipée et que cette cuisine équipée est citée dans le bail, toute dépense d'entretien, de réparation ou de renouvellement du matériel de cette cuisine équipée doit être considérée selon moi comme déductible.

Cette solution s'applique, non seulement aux dépenses relatives aux appareils ménagers de la cuisine équipée, mais à tous les meubles cités dans le bail comme faisant partie des biens loués, et même au coût de tous les services complémentaires proposés par le bailleur (sous réserve de rester en régime des revenus fonciers évidemment).

S'agissant des locaux professionnels, il faut appliquer la règle selon laquelle les travaux d'amélioration ne sont pas déductibles et la question pourrait se poser s'il faut considérer que l'installation d'une cuisine équipée, dans un bureau par exemple, ne doit pas être considérée comme une dépense d'amélioration.

Mais, sous cette réserve de la qualification de dépense d'amélioration, toutes les dépenses de meubles relatives à la location de locaux professionnels doivent être considérées comme déductibles selon moi, si le bail prévoit les meubles.

Cela étant, à ce jour, le BOFIP contredit en partie ma position et peut susciter des interrogations.

Il y a lieu de regretter l'existence d'une telle incertitude mais, évidemment, cela n'est ni original ni nouveau.

C'est ainsi que dans la conclusion d'une étude sur les charges déductibles en revenus fonciers (RJF 7/92 - 25/06/1992), le professeur Jean-François PICARD indiquait déjà :

"Finalement, à l'issue de ces études consacrées aux revenus fonciers on peut se demander comment il peut encore exister des titulaires de revenus fonciers quand à la complexité de la matière on ajoute le faible rendement des locations immobilières."