Dans trois ordonnances rendues le 20 novembre 2024 (n°2406364, 2406581 et 2406584), le Juge des référés du Tribunal administratif de Toulouse a constaté qu’en l’état actuel de la réglementation, les collectivités territoriales ne pouvaient pas légalement instaurer une autorisation spéciale d’absence pour les agentes souffrant de règles menstruelles douloureuses.

Plus précisément, deux collectivités territoriales et un CCAS avaient adopté des délibérations permettant aux agentes souffrant de règles douloureuses de bénéficier, notamment, d’une autorisation spéciale d’absence.

Ces délibérations ont été déférées au Tribunal administratif par le Préfet au titre de sa mission de contrôle de légalité, dans le cadre de « déférés suspension » régis par l’article L.554-1 du Code de justice administrative.

Contrairement au référé suspension classique de l’article L.521-1 du même code, le déféré suspension (réservé au Préfet) permet d’obtenir la suspension d’un acte administratif sans que le Préfet n’ait à justifier d’une condition d’urgence. Seule sera prise en compte l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité de l’acte attaqué.

Dans ses trois ordonnances, le Juge des référés constate qu’à ce jour aucune disposition législative ou réglementaire ne permet de mettre en place des autorisations spéciales d’absence autres que celles liées à la parentalité et à l'occasion de certains événements familiaux prévus par l’article L.622-1 du Code général de la fonction publique.

Le Juge des référés précise également que de telles autorisations spéciales d’absence liées à des règles menstruelles douloureuses n’entrent dans aucune catégorie d’autorisations spéciales d’absence qui devraient être accordées de droit.

C’est donc en raison de la carence des textes juridiques actuels que le Juge des référés a jugé que les délibérations contestées étaient dépourvues de base légale et que les assemblées délibérantes n’étaient pas compétentes pour créer un nouveau cas d’autorisation spéciale d’absence.

Dans l’une de ses trois ordonnances, le Juge des référés précise que les collectivités territoriales ne peuvent pas non plus se prévaloir du dispositif d’expérimentation locale prévue par l’article 72 de la Constitution dès lors qu’un telle expérimentation potentiellement dérogatoire à l’exercice de leurs compétences doit être prévue par une loi.

Au cas qui lui était soumis, le Juge des référés n’a pu que constater qu’aucune loi ne permettait aux collectivités territoriales d’expérimenter localement une réglementation dérogatoire au régime général des autorisations d’absence.

Selon le Juge des référés, l’ensemble de ces circonstances entachent la légalité des délibérations d’un doute sérieux justifiant la suspension de leur exécution dans l’attente du jugement au fond.

En définitive, ces trois ordonnances confirment qu’il appartient au législateur et au pouvoir réglementaire d’intervenir afin que les congés menstruels puissent être légalement mis en place par les employeurs publics locaux.

Sur ce point, il est à noter qu’une proposition de loi n°1219 tendant à mettre en place un congé menstruel dans le Code général de la fonction publique avait été déposée à l’Assemblée nationale le 10 mai 2023, avant d’être rejetée par le Sénat le 15 février 2024.

Une seconde proposition de loi n°2227 a été présentée à l’Assemblée nationale le 20 février 2024 mais la dissolution de cette assemblée prononcée par le décret présidentiel du 9 juin 2024 n’a pas permis de poursuivre l’examen de cette proposition.

Ces échecs législatifs pourraient potentiellement être couverts, en tout ou partie, par l’intervention d’un décret, lequel ne semble toutefois pas à l’étude à ce jour.