Suite à un accident ayant pour conséquences des dommages corporels, la victime peut avoir besoin d’être assistée dans les actes de sa vie quotidienne. Cette assistance peut être temporaire, avant la consolidation, ou définitive.
Il est essentiel d’évaluer ce besoin pour permettre à la victime d’être restaurée dans sa dignité et d’obtenir la meilleure indemnisation.
La Cour de cassation fixe de nombreux principes pour l’évaluation de l’indemnisation du besoin d’assistance par tierce personne.
Nous allons tout d’abord nous intéresser au cas d’une victime bénéficiant d’une aide familiale puis nous détaillerons ce qu’indemnise l’assistance par tierce personne.
L’indemnisation de l’assistance par une tierce personne en cas d’aide familiale
Très souvent, dans les suites d’un accident, la victime est aidée par ses proches qui se démènent pour être présents à ses côtés et faire face à ses besoins, soit temporairement, soit définitivement.
A titre d’exemple, la plupart du temps, lorsqu’un enfant subit un lourd handicap, l’un des parents est contraint de cesser son activité professionnelle pour devenir aidant.
En application de principe de réparation intégrale et de non-affectation des fonds, c’est le besoin d’assistance qui doit être indemnisé. Le montant du taux horaire d’indemnisation ne saurait être réduit en cas d’assistance familiale
Ainsi, la Cour de cassation rappelle, selon une jurisprudence constante, que « le montant de l’indemnité allouée au titre de l’assistance d’une tierce personne ne saurait être réduit en cas d’assistance d’un membre de la famille ni subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives » (Cass. 2ème civ 4 mai 2017 n° 16-16.885 (1); Cass. Civ. 2ème 15 décembre 2022 n°21-16609).
L’indemnisation de la tierce personne, au-delà des besoins essentiels de la vie courante
Sur la nature du besoin, la Cour de cassation rappelle que "le préjudice lié à l'assistance par une tierce personne ne se limite pas aux seuls besoins vitaux de la victime, mais indemnise sa perte d'autonomie la mettant dans l'obligation de recourir à un tiers pour l'assister dans l'ensemble des actes de la vie quotidienne" (Cass. Civ. 1ère 8 février 2023 n°21-24991)
La Cour de cassation précise encore que « la tierce personne apporte à la victime l'aide lui permettant de suppléer sa perte d'autonomie tout en restaurant sa dignité » (Cass. 2ème civ. 23 mai 2019 n°18-16651)
Ainsi, tous les besoins de la personne doivent être pris en compte, et pas seulement les besoins essentiels (se laver, s’habiller, manger).
Il en résulte que si une personne justifie d’un besoin spécifique, lié par exemple à un loisir, il doit être pris en compte. Il est aussi utile de vérifier si la victime ne justifie pas d’un besoin pour une aide administrative, notamment en cas de troubles cognitifs. Toute aide permettant de rétablir la victime dans son autonomie et sa dignité mérite d’être indemnisée.
La position de la Cour de cassation sur l’absence d’obligation pour la victime de limiter son besoin d’assistance
La 2ème chambre civile de la Cour de cassation rappelle aussi, en application du principe de non-mitigation selon lequel la victime d'un dommage corporel n'a pas l'obligation de limiter son dommage dans l'intérêt du responsable, que l'indemnisation du besoin d'assistance par tierce personne ne saurait être limitée au motif que la victime pourrait fractionner ses courses pour limiter le port de charges lourdes ou faire appel à un service de livraison (Cass. Civ. 2ème 15 décembre 2022 n°21-16712).
Il peut en effet arriver que les régleurs usent de cet argument pour tenter d’échapper au paiement de l’indemnité due au titre du besoin d’assistance pour les courses. La Cour de cassation récuse cette analyse.
Aussi, le besoin d’assistance par tierce personne ne cesse pas pendant les périodes d’hospitalisation. La personne hospitalisée peut avoir besoin d’assistance pour des sorties, pour l’entretien de son linge, ou même pour l’entretien de son logement ou de son jardin.
De plus, si certains Experts précisent dans leurs évaluations le quota d’heures d’aide active ou passive, cette différence ne semble pas pertinente. En effet, la personne assurant une aide passive doit être en mesure d’intervenir dès que cela est nécessaire et présenter les qualifications adéquates. Aussi, très souvent, l’aide passive de surveillance correspond principalement à la surveillance de nuit. Le coût des interventions de nuit est majoré, ce dont il est nécessaire de tenir compte.
Il peut être judicieux en revanche de préciser la nature l’aide apportée : s’agit-il d’une stimulation, d’une incitation, d’une surveillance, d’un soin, d’une aide à l’habillage etc.
Il importe donc, pour l’Avocat et le médecin-conseil, de s’intéresser en détail aux activités de la victime, afin que l’ensemble des besoins d’assistance soit listé, dans le rapport d’expertise et/ou dans les demandes d’indemnisations formulées.
En conclusion :
L'assistance par tierce personne est un volet essentiel de l'indemnisation en cas de dommages corporels. Elle a pour vocation de compenser la perte d’autonomie. Les décisions de la Cour de cassation jouent un rôle fondamental dans la définition et l'évaluation de ces indemnités.
Chaque cas est unique, et la nécessité de bien évaluer les besoins de chaque victime est donc essentielle pour leur permettre de retrouver une certaine sérénité dans leur vie après un accident. Il est donc important pour la victime de lister, avec son avocat spécialisé en dommage corporel et son médecin-conseil, l’ensemble de ses besoins de nature à la rétablir dans sa situation avant l’accident.
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