La CRPC pourrait se résumer à l'adage : faute avouée, faute à moitié pardonnée... La procédure du plaider-coupable existe en France depuis la Loi du 9 mars 2004 sous le nom de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Initialement prévue pour les petits délits, la CRPC concerne désormais une large majorité de délits, à condition que le mis en cause soit majeur et qu'il reconnaisse les faits qui lui sont reprochés.
La CRPC concernait principalement les délits routiers, pour entre autres, désengorger les tribunaux.
Aujourd'hui dans la pratique, la CRPC s'applique à des délits très variés (vol simple, détention de stupéfiants...)
Le rôle de l'avocat dans le cadre de la procédure, sera de peser le pour ou le contre, procédure qui implique de renoncer à se défendre sur le fond du dossier, et d'accepter ou non la peine proposée par un Procureur de la République.
Or, contrairement à ce que beaucoup de justiciables pensent, une peine de prison ferme est tout à fait possible dans le cadre d'une CRPC.
A/ Pour quels délits peut-on recourir à une CRPC ?
La CRPC est prévue par l'article 495-7 du Code de Procédure Pénale :
"Pour tous les délits, à l'exception de ceux mentionnés à l'article 495-16 et des délits d'atteintes volontaires et involontaires à l'intégrité des personnes et d'agressions sexuelles prévus aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal lorsqu'ils sont punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à cinq ans, le procureur de la République peut, d'office ou à la demande de l'intéressé ou de son avocat, recourir à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité conformément aux dispositions de la présente section à l'égard de toute personne convoquée à cette fin ou déférée devant lui en application de l'article 393 du présent code, lorsque cette personne reconnaît les faits qui lui sont reprochés."
Concrètement :
Pour pouvoir bénéficier d'une procédure de CRPC, il faut être majeur.
Il faut avoir commis un délit.
Les crimes et les contraventions sont exclues du champ d'application de la CRPC.
Les délits qui sont punis de plus de 5 ans de prison sont exclus également du champ d'application de la loi ( agressions sexuelles, violences volontaires)
Il faut évidemment plaider coupable, c'est à dire reconnaître, et sans réserve les faits.
Il faut donc avouer sa culpabilité.
B/ CRPC : Une procédure sans procès
Pour le justiciable, le premier avantage de la CRPC est souvent la discrétion.
Dans le cadre d'une CRPC, il n'y a pas de procès public.
Le mis en cause est convoquée ou déférée devant le Procureur de la République, dans un bureau et non dans une salle d'audience.
La CRPC a lieu au Tribunal mais à l'abris des regards.
Le mis en cause est assisté de son avocat.
Concrètement, dans le bureau, il y a le Procureur, son Greffier, la personne mis en cause et son avocat.
L'avocat ne défend pas le fond du dossier, puisque les faits sont reconnus.
On ne va donc pas remettre en cause la parole de la victime ou des témoins, contester la procédure ou l'enquête qui a été menée. On ne peut remettre en cause une expertise, ou des analyses de sang (alcool, drogue), demander des actes complémentaires, comme par exemple l'exploitation de la vidéo surveillance etc.
Le Procureur ne reviendra pas sur les faits, mis à part pour demander au mis en cause s'il reconnait bien sa culpabilité.
Il va alors proposer une peine.
1/ La proposition de peine du Procureur
Le procureur va proposer une peine avec ou sans sursis.
Le rôle de l'avocat va être de discuter et de "négocier" la peine si elle n'est pas adaptée ou trop sévère par rapport aux faits reprochés ou au regard des éléments de personnalité du mis en cause.
L'avocat est absolument obligatoire dans ce type de procédure, une CRPC ne peut être homologuée sans la présence d'un avocat.
Le second avantage pour le justiciable est évidemment que la peine proposée sera moins sévère ( du moins en théorie) que celle qui aurait pu être prononcée par un Tribunal Correctionnel.
La durée de l'emprisonnement ne peut pas être supérieure à 3 ans, ni dépasser la moitié de la peine encourue.
Nous sommes effectivement dans l'esprit : faute avouée, faute à moitié pardonnée...
Les peines peuvent être assortis du sursis ( les peines d'amende ou de prison ne sont donc pas appliquées, l'amende ne sera pas payée ou la personne n'ira pas en prison, SAUF s'il récidive)
Des peines de prison ferme peuvent également être proposées.
Dans l'immense majorité des cas, la personne ne sera pas incarcérée juste après la CRPC, mais cela reste possible.
En principe, si peine de prison il y a, le justiciable sera convoquée plus tard devant un autre magistrat : un Juge d'Application des Peines ( le JAP)
Le JAP pourra décider d’exécuter cette peine de prison ferme, ou la "convertir" en une autre forme de peine comme l'assignation à résidence sous surveillance électronique ou une semi-liberté par exemple)
Le Procureur peut également décider sur demande de l'Avocat que la condamnation ne figure pas sur son casier judiciaire ( B2 et B3)
Le procureur peut également proposer des peines complémentaires comme la suspension du permis de conduire par exemple.
2/ La décision du justiciable : Accepter, réfléchir ou refuser cette proposition de peine
Le Procureur propose une peine, cela n'implique pas automatiquement que le justiciable l'accepte.
Il peut évidemment dire non à cette proposition ou demander également un délai de réflexion.
Le mis en cause pourra en discuter avec son avocat librement avant de donner sa décision.
a) S'il refuse la peine proposée, la personne mis en cause sera jugée devant un Tribunal Correctionnel avec une procédure "classique', donc un procès.
b) S'il demande un délai de réfléxion, la personne sera convoquée à nouveau devant le Procureur pour donner sa décision finale dans un délai maximum de 10 jours.
Attention, si la peine proposée par le Procureur était une peine d'emprisonnement de plus de deux mois, il est possible qu'un placement en détention provisoire soit mis en place dans l'attente de la nouvelle convocation devant le Procureur ( donc en prison le temps de ce délai de réflexion....)
En effet, si le mis en cause demande un délai de réfléxion, le Procureur peut saisir un autre juge : le JLD / Le juge des Libertés et de la Détention.
Ce magistrat va s'assurer que le justiciable ne profite pas de ce délai de réfléxion pour échapper à la justice.
Si le JLD craint que la personne ne se présente pas à nouveau devant le Procureur à l'issue du délai de réléxion, il peut placer la personne sous Contrôle Judiciaire ( remise du passeport, pointage au commissariat ...) ou également le placer en détention provisoire ( pour les peines proposées de plus de deux mois avec demande d'éxécution immédiate de la peine par le Procureur)
Dans la majorité des cas, les propositions (avec ou sans négociation à la baisse de l'avocat) sont acceptées par les justiciables.
Mais la procédure n'est pas encore terminée.
Il faut après acceptation par le mis en cause, qu'un autre magistrat "homologue" la peine proposée.
3/ Homologation par un magistrat du siège
Se tient, suite au passage dans le Bureau du Procureur, une audience d'Homologation.
Cette audience est tenue par un magistrat du siège.
Le magistrat va examiner la peine proposée et il va la valider ou non.
Il ne peut pas compléter ou remplacer la peine proposée, c'est oui ou non. C'est homologué ou pas.
S'il n'homologue pas c'est soit parce que finalement le justiciable revient sur sa décision, soit parce qu'il estime que la peine proposée par le Parquet n'était pas assez sévère ou au contraire trop sévère.
L'avocat du mis en cause a la parole durant cette audience et pourra essayer de persuader le juge d'homologuer malgré tout, si cela est dans l'intérêt de son client ( peine légère qui ne sera sans doute pas prononcée dans le futur par une juridiction classique...)
a) S'il valide la peine proposée par le Procureur et acceptée par le mis en cause, le juge rend une ordonnance d'homologation, cette ordonnance a exactement la même valeur qu'un jugement classique.
La personne est déclarée coupable des faits qui lui sont reprochés et il est expressément indiqué qu'elle reconnaît ces faits. La décision doit préciser que la peine proposée est justifiée au regard des faits, des circonstances et de la personnalité de l'auteur des faits.
Il est tout à fait possible de faire appel de la décision, comme n'importe quel jugement correctionnel.
La personne mis en cause peut interjeter appel dans les 10 jours à compter de l'audience.
b) S'il décide de ne pas homologuer, le dossier sera finalement jugé devant le Tribunal Correctionnel.
4/ Le rôle de l'avocat ?
L'avocat est obligatoire pour garantir les droits du justiciable. Le mis en cause doit pouvoir faire son choix de manière éclairée. Il doit comprendre la portée de sa reconnaissance de culpabilité. Il doit surtout pouvoir compter sur les conseils de son avocat pour accepter ou non la proposition faite.
L'avocat va également "négocier" la peine si elle n'est pas adaptée, mettre en avant les éléments de personnalité de son client pour éviter l'incarcération par exemple ( travail, études, famille, suivi psychologique)
L'avocat va également analyser le dossier afin de voir si des vices de procédures ne seraient pas susceptibles de faire tomber le dossier devant un tribunal correctionnel ( puisque les vices de procédure ne pourront être évoqués en CRPC, mais pourront l'être devant le Tribunal)
L'avocat dans le cadre d'une CRPC ne fait pas de marchandage, il doit analyser s'il est plus judicieux d'accepeter la proposition du Procureur ou finalement, de peut-être prendre le "risque" d'aller devant un Tribunal.
Car cela arrive parfois les propositions du Parquet soient plus sévères que ce que l'on pourrait "espérer" devant certains tribunaux.
En fonction donc de la "jurisprudence" de chaque juridiction et des délits poursuivis, il faudra que l'avocat pèse le pour et le contre dans l'intérêt de son client.
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